Aout / Septembre 1944 : les syndicalistes dans l’insurrection de Varsovie

Le 1er août 1944, la résistance polonaise (Armia Krajowa) déclenche à Varsovie un soulèvement armé contre l’occupant nazi allemand dans le cadre du plan militaire national « action Tempête » (Burza en polonais). Il s’accompagna de la sortie de la clandestinité des structures de la Résistance, dont les unités formées par les syndicalistes, auxquelles participaient les anarchosyndicalistes polonais.

Côté militaire, le soulèvement a été dirigé contre les forces allemandes, mais le but de ce plan était l’ultime essai de préserver la souveraineté de la Pologne face à l’avancée de l’Armée rouge et la position ambiguë des Alliés occidentaux vis-à-vis des intentions de l’Union soviétique.

Parmi les forces engagées de la Résistance dans l’insurrection de Varsovie, la 104ème compagnie syndicaliste, formée en 1943 par le groupe de combat des anarchosyndicalistes du ZSP. (Związek Syndykalistów Polskich, ZSP).

Le ZSP était lui même une organisation de résistance armée, active entre avril 1941 et la moitié de 1945, et qui regroupait la tendance anarchosyndicaliste du syndicat clandestin « Liberté et Peuple » (Związek „Wolność i Lud) fondé à Varsovie ke 21 octobre 1939.

La 104ème compagnie Syndicaliste

la compagnie se composait de trois pelotons d’assaut, d’un peloton de réserve et de deux pelotons de travail.

Le 30 juillet, la compagnie reçu 12 grenades artisanales du commandement du district. Le quartier général du groupe était initialement situé dans l’usine de rideaux Szlenkiern,10 rue Świętojerska.

Le premier jour du soulèvement, le 1er août , avant 17h00 le 1er août, soixante soldats – dont quinze femmes – arrivèrent QG. Leur armement était sommaire : 5 pistolets, 200 cartouches, deux revolvers et 12 grenades.

La Participation des anarchosyndicalistes à l’Insurrection de Varsovie

Au début, la Compagnie comptait une cinquantaine de soldats, mais elle pris rapidement pris de l’ampleur, avec de nombreux volontaires se joignant aux premiers résistants.

Au troisième jour de l’insurrection, la compagnie comptait quelque 360 ​​volontaires, qui manquaient cependant cruellement d’armes.Malgré tout, dans la première phase du soulèvement, ils se battirent dans la vieille villeIls et jouèrent un rôle primordial dans de nombreux combats,entre autres lors de la conquête du château royal, du quartier Saint-Jean, du palais Krasiński et de l’imprimerie de la sécurité nationale dont ils s’emparèrent dans la nuit du 1er août.

La situation s’améliora quand ils capturèrent le palais de Krasiński, le 2 août, mettant la main sur de nombreux fusils et des grenades, et capturant 42 prisonniers de guerre allemands.

Par conséquent, selon les insurgés eux-même, ils étaient la meilleure unité armée combattant dans la vieille ville. Cela signifiait qu’ils étaient souvent affectés à des tâches spéciales, telles que la capture de bâtiments clés ou la gestion de sections dangereuses du front de rue

La Compagnie n’était pas seulement engagée dans des combats : elle possédait sa propre boulangerie de campagne, qui fabriquait du pain qui était distribué à la population civile, ainsi qu’un hôpital de campagne, dirigé par le docteur Adam Krakowski. Elle avait aussi sa propre fabrique de grenades.

En outre, elle disposait de son propre service de presse, composé de membres de l’Union des syndicalistes polonais (ZSP). Elle publia deux journaux : Iskra (« étincelle ») et Syndykalista.

La compagnie créa également le Comité civique de la vieille ville et le Comité d’aide aux enfants, qui aidaient les civils. En un mot, même dans des conditions de combat difficiles, ils ont mis en œuvre des idéaux anarcosyndicalistes tels que l’autosuffisance ou l’attention aux plus faibles

la Compagnie marqua son autonomie vis à vis de l’Armée de l’Intérieur (Armia Krajowa, AK) : ils combattirent sous leurs propres couleurs, le drapeau rouge et noir des anarcho-syndicalistes, ornant leurs uniformes et leurs casques de ces couleurs, ce qui était en contradiction avec la politique de l’Armée Intérieure (la résistance officielle) qui exigea qu’ils le remplacent par le drapeau national polonais rouge et blanc et qu’ils changent le nom de leur unité, abandonnant toute référence au syndicalisme pour celui 104ème Compagnie de l’Armée de l’Intérieur.

Après de violents combats dans les premières semaines d’août 1944, la Compagnie devint l’unité polonaise la mieux équipée dans la région de la Vieille Ville. Elle participa à la capture du gratte-ciel PASTA et à des escarmouches autour du château royal de Varsovie. Puis, sous la pression des nazis, elle participa à l’organisation de la défense de la vieille ville, dont la cathédrale Saint-Jean.

Vieille ville, rue Długa. Un insurgé avec un fusil Mauser à une position de tir dans la tranchée séparant la rue Długa de la cathédrale de l’armée polonaise. Les soldats de la 104e compagnie des syndicalistes tenaient leurs positions ici

Dans la deuxième quinzaine d’août, la Compagnie établit son quartier-général dans la Maison des professeurs, au 12, rue Brzozowa, où elle resta jusqu’à l’effondrement de la vieille ville. C’est ici, dans l’appartement du professeur Kazimierz Zakrzewski, qu’avait été créé l’Union des syndicalistes polonais (ZSP)

Septembre 1944 : les derniers combats

Les pertes lors des combats furent particulièrement lourdes, les historiens estiment que plus de 50% des combattants furent mis hors de combats, blessés,tués ou prisonniers. Fin août 1944, la compagnie, qui ne comptait plus qu’une centaine de combattants, s’échappa par les égouts vers Warszawa-Śródmieście (centre-ville de Varsovie). Là, il rejoignirent une partie du bataillon de Boncza et participèrent aux combats dans le district de Powiśle, au cours desquels, le 6 septembre 1944, la 104e compagnie syndicaliste fut écrasée.

Les survivants du peloton d’assaut, avec 26 hommes, réussit à se rendre à Czerniaków, où il s’engagèrent dans de violents combats. Début septembre, ils menèrent des actions d’arrière-garde lors de l’évacuation de la vieille ville de Varsovie.

Le 15 septembre 1944, trois rescapés de la compagnie parviennent à traverser la rive orientale de la Vistule

Plus tard, d’autres hommes réussirent à s’enfuir en traversant le fleuve, où ils rejoignirent la Première Armée polonaise. Les survivants s’enfuirent pour reformer une brigade syndicaliste dans le centre ville (Śródmieści.)

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