Là où ça sent la merde,
ça sent l’être.
L’homme aurait très bien pu ne pas chier,
ne pas ouvrir la poche anale,
mais il a choisi de chier
comme il aurait choisi de vivre
au lieu de consentir à vivre mort.
Dieu est-il un être ?
S’il en est un c’est de la merde.
Antonin Artaud (pour en finir avec le jugement de Dieu)
« Dans ce qu’il qualifiait de « recherche de la fécalité », Artaud manifestait sa douleur, cette nécessité de vivre dans les excréments : « l’homme a eu peur de perdre la merde, ou plutôt il a désiré la merde. »
Au talent près, ces imprécations rejoignent les paroles de la chanson entonnée par Ravachol lorsqu’il marchait vers la guillotine : « si tu veux être heureux, nom de Dieu, pends ton propriétaire et fous l’bon Dieu dans la merde ; » Tout comme Artaud, François Claudius Koenigstein, dit Ravachol, associait Dieu et la merde, ce qui, finalement redonnait toute sa dimension à l’homme. De son côté, Le Père Peinard, de l’anarchiste Emile Pouget, rendait compte du procès de Ravachol en décrivant la cour d’assise de la Seine : « Ça sent la merde dans toute la salle ! » ….
Ces rappels injurieux à Dieu, au milieu de mes déchirements, ce sursaut d’humour pour tenir tête au désespoir [étaient malgré ma situation] très plaisants. »
Maurice Rajfus (Le chagrin et la Colère, 2005)