Auschwitz est le complexe concentrationnaire nazi le plus grand de son genre, et joue un rôle essentiel dans le projet nazi de « solution finale ». Il reste dans l’histoire comme le plus tristement célèbre des camps de la Shoah.
Points de repère
1- Situé dans la Pologne occupée par les Nazis, Auschwitz se divise en trois camps comprenant un centre de mise à mort. Ils ont été ouverts chacun leur tour sur une période de presque 2 ans entre 1940 et 1942. Le complexe a fermé en janvier 1945 à la libération par l’armée sovié-tique.
2- Plus de 1,1 million de personnes sont décédées à Auschwitz, dont près d’un million de Juifs. Ceux qui n’étaient pas directement envoyés aux chambres à gaz se voyaient condamnés aux travaux forcés.
3- On confond souvent le complexe d’Auschwitz et « Auschwitz-Birkenau ». Birkenau, ou Auschwitz II, ne représente qu’une section de l’ensemble. Le centre de mise à mort — Birkenau — est l’endroit où se situaient les chambres à gaz.
Nombre de victimes
On estime à au moins 1,3 million le nombre de personnes déportées par les SS et la police vers le complexe du camp d’Auschwitz entre 1940 et 1945. Environ 1,1 million d’entre eux ont été assassinés.
La meilleure estimation du nombre de victimes dans le complexe, comprenant le centre de mise à mort d’Auschwitz-Birkenau, dans ces années est la suivante :
- Juifs (1 095 000 déportés à Auschwitz, 960 000 décédés)
- Polonais non juifs (140 000-150 000 déportés, 74 000 décédés)
- Tsiganes (23 000 déportés, 21 000 décédés)
- Prisonniers de guerre soviétiques (15 000 déportés et décédés)
- Autres nationalités (25 000 déportés, 10 000-15 000 décédés)
Auschwitz-Birkenau a le taux de mortalité le plus élevé, mais aussi le taux de survie le plus élevé de tous les centres de mise à mort.
Au cours de la Shoah, un camp seulement apposait un tatouage aux prisonniers de camp de concentration : Auschwitz. Ceux qui arrivaient se voyaient attribuer un Numéro de matricule qui était cousu à leur uniforme. Ceci ne concernait que les prisonniers sélectionnés pour le travail. Ceux qui étaient envoyés directement dans les chambres à gaz n’étaient ni enregistrés ni tatoués.
Auschwitz I
Auschwitz I, le camp principal, fut le premier établi près de la ville polonaise d’Oswiecim. Sa construction commença en avril 1940 dans des baraquements abandonnés de l’armée polonaise, dans une banlieue de la ville.
Les autorités SS ne cessèrent de recourir au travail forcé, les prisonniers ayant pour tâche d’agrandir le camp. Pendant la première année, les SS et la police dégagèrent une zone d’environ 40 kilomètres carrés dite « zone de développement », réservée exclusivement au camp.
Les premiers prisonniers à Auschwitz comprenaient des Allemands transférés du camp de concentration de Sachsenhausen, en Allemagne, où ils avaient été incarcérés en tant que délinquants criminels récidivistes, ainsi que des prisonniers politiques polonais. Ceux-ci venaient de Lodz via le camp de concentration de Dachau ou de Tarnow, dans le district de Cracovie du Generalgouvernement (Gouvernement général, la partie de Pologne occupée, non annexée à l’Allemagne nazie, administrativement rattachée à la Prusse orientale allemande ou incorporée à l’Union soviétique occupée).
Comme la plupart des camps de concentration allemands, Auschwitz I fut construit pour trois raisons :
– Pour incarcérer les ennemis, réels ou supposés, du régime nazi et des autorités d’occupation allemandes en Pologne, pour une durée indéterminée ;
– Pour disposer d’une réserve de travailleurs forcés déployés dans des usines de construction appartenant aux Nazis (puis, plus tard, des usines d’armement ou autres productions liées à la guerre) ;
– Pour servir de site où de petits groupes ciblés de la population étaient tués, leur mort étant considérée par les autorités SS et policières comme essentielle à la sécurité de l’Allemagne nazie.
Comme d’autres camps de concentration, Auschwitz I disposait d’une chambre à gaz et d’un crématorium. Les ingénieurs SS avaient d’abord construit une chambre de gaz improvisée dans le sous-sol d’un bâtiment pénitentiaire, le Bloc 11. Une autre, permanente et formant une partie du crématorium original, fut ensuite érigée dans un bâtiment séparé en dehors de la prison.
À Auschwitz I, les médecins SS se livrèrent à des expériences médicales dans l’hôpital, au bloc 10 (« Barrack 10 »). Ils effectuèrent des recherches pseudo-scientifiques sur des nourrissons, des jumeaux et des nains et pratiquèrent des stérilisations forcées et des castrations sur des adultes. Le plus connu d’entre eux fut le capitaine et docteur SS Josef Mengele.
Quand on pense aux crimes des médecins nazis, ce qui vient à l’esprit, ce sont les expériences cruelles et parfois fatales qu’ils y ont perpétrées… Pourtant lorsque l’on en arrive à leur rôle à Auschwitz, le plus significatif, ce ne sont pas les expériences, mais leur participation active au processus d’extermination… ils ont en effet supervisé les meurtres de masse à Auschwitz du début jusqu’à la fin. 1
Entre le baraquement dédié aux expériences médicales et la prison, le bloc 11, se trouvait « le mur noir », où les gardes SS exécutèrent des milliers de prisonniers.
Auschwitz II
La construction d’Auschwitz II, ou Auschwitz-Birkenau, commença à côté de Brzezinka en octobre 1941.
Des trois camps établis près d’Oswiecim, le camp d’Auschwitz-Birkenau comptait le plus grand nombre de prisonniers. Il était divisé en dix sections séparées par des fils barbelés électrifiés et, comme à Auschwitz I, des gardes SS y faisaient des patrouilles, assistés, après 1942, de maîtres-chiens.
Le camp comportait des sections pour les femmes, pour les hommes, et pour les familles tsiganes déportées d’Allemagne, d’Autriche et du protectorat de Bohême et de Moravie, ainsi qu’une autre pour les familles juives déportées du ghetto de Theresienstadt.
Auschwitz-Birkenau disposait également un centre de mise à mort. Le camp joua un rôle central dans le plan allemand d’élimination des Juifs d’Europe. Au cours de l’été et de l’automne 1941, les Nazis commencèrent à utiliser le gaz Zyklon B dans les camps de concentration allemands comme instrument d’extermination. Dans le camp Auschwitz I, les SS testèrent pour la première fois le Zyklon B afin de procéder à des exterminations massives en septembre. Les tests s’étant avérés « concluants », les Nazis adoptèrent le Zyklon B dans toutes les chambres à gaz du complexe d’Auschwitz.
Près de Birkenau, les SS convertirent d’abord deux fermes en chambres à gaz. La première, « temporaire », entra en service en janvier 1942 puis fut démantelée. La chambre à gaz provisoire II fonctionna de juin 1942 à l’automne 1944. Les SS jugèrent que ces installations étaient inadaptées par rapport à l’ampleur des gazages qu’ils planifiaient à Auschwitz-Birkenau.
Ce sont alors quatre grands crématoriums qui furent construits entre mars et juin 1943. Chacun comportait trois parties : une zone de déshabillage, une vaste chambre à gaz, et des fours crématoires. Les SS poursuivirent les opérations de gazage à Auschwitz-Birkenau jusqu’en novembre 1944.
Les déportations vers Auschwitz
Des trains arrivaient fréquemment à Auschwitz-Birkenau, transportant des Juifs provenant de pratiquement tous les pays d’Europe que l’Allemagne occupait ou qui comptaient parmi ses alliés, et ce de 1942 jusqu’à la fin de l’été 1944.
Décompte approximatif par pays :
- Hongrie : 426 000
- Pologne : 300 000
- France : 69 000
- Pays-Bas : 60 000
- Grèce : 55 000
- Bohême et Moravie : 46 000
- Slovaquie : 27 000
- Belgique : 25 000
- Yougoslavie : 10 000
- Italie : 7500
- Norvège : 690
- Autres pays : 34 000
Avec les déportations de Hongrie, le rôle joué par Auschwitz-Birkenau dans le plan allemand d’extermination des Juifs d’Europe atteignit son efficacité maximale. Entre la fin avril et le début du mois de juillet 1944, ce sont environ 440 000 Juifs qui furent déportés de Hongrie. Des 426 000 déportés à Auschwitz, environ 320 000 furent envoyés directement dans les chambres à gaz d’Auschwitz-Birkenau, et environ 110 000 furent soumis au travail forcé au sein du complexe. Parmi ces derniers, un grand nombre fut transféré dans d’autres camps de concentration en Allemagne et en Autriche dans les semaines suivant leur arrivée.
Les nouveaux arrivants à Auschwitz-Birkenau passaient par un processus de sélection. La majorité d’entre eux était jugée inapte au travail forcé et envoyée immédiatement dans les chambres à gaz, aménagées comme des douches afin de tromper les victimes. Les objets personnels des personnes gazées étaient confisqués et triés au « Kanada » (Canada), l’entrepôt d’où les cargaisons repartaient en Allemagne, ce pays étant synonyme de richesse pour les détenus qui y étaient affectés.
La révolte des prisonniers à Auschwitz
Le 7 octobre 1944, des centaines de prisonniers affectés au crématorium IV à Auschwitz-Birkenau se rebellèrent après avoir appris qu’ils allaient être tués. Au cours de l’émeute, ils tuèrent trois gardes et firent exploser le crématorium ainsi que la chambre à gaz adjacente grâce à des explosifs que des femmes juives, soumises au travail forcé dans une usine d’armement toute proche, avaient introduits clandestinement dans le camp.
Les Allemands écrasèrent la révolte et exterminèrent pratiquement tous les prisonniers impliqués. Les femmes qui avaient fourni les explosifs furent pendues en public au début de janvier 1945.
Les opérations de gazage se poursuivirent quand même jusqu’en novembre 1944, date à laquelle les SS, sur ordre de Himmler, démantelèrent les chambres à gaz encore en service. Les SS détruisirent les installations de gazage restantes à l’approche des troupes soviétiques en janvier 1945.
Auschwitz III
Auschwitz III, également appelé Buna ou Monowitz, fut construit en octobre 1942 pour loger les prisonniers affectés à l’usine de caoutchouc synthétique de la Buna, située en périphérie du petit village de Monowitz.
Au printemps 1941, le conglomérat allemand I.G. Farben y établit une usine où les responsables comptaient exploiter la main-d’œuvre du camp qui y manufacturerait des caoutchoucs synthétiques et des carburants. I.G. Farben investit plus de 700 millions de Reichsmarks (soit 2,8 millions de dollars américains de 1941) à Auschwitz III. De mai 1941 à juillet 1942, les prisonniers furent transférés d’Auschwitz I au « détachement Buna », d’abord à pied puis en train (sauf entre juillet et octobre 1942 en raison d’une épidémie de typhus qui requérait une quarantaine). Avec la construction d’Auschwitz III à l’automne 1942, les prisonniers affectés à la Buna vécurent sur place dans le camp.
Auschwitz III disposait également d’un « camp de formation au travail » pour les prisonniers non juifs supposés avoir enfreint la discipline de travail imposée par les Allemands.
Les sous-camps d’Auschwitz
Entre 1942 et 1944, les responsables SS d’Auschwitz construisirent 44 sous-camps dont certains dans une zone dite « de développement » qui incluait Budy, Rajsko, Tschechowitz, Harmense et Babitz.
D’autres, comme Blechhammer, Gleiwitz, Althammer, Fürstengrube, Laurahuette et Eintrachthuette, se trouvaient en Haute-Silésie au nord et à l’ouest de la Vistule. D’autres encore si situaient en Moravie, comme Freudental et Brünn (Brno).
En règle générale, les sous-camps qui produisaient ou traitaient des biens agricoles dépendaient d’Auschwitz-Birkenau tandis que ceux qui exploitaient des prisonniers dans des unités de production d’armement ou d’extraction (mines de charbon, carrières) dépendaient d’Auschwitz-Monowitz. Cette division administrative fut officialisée après novembre 1943.
Les prisonniers d’Auschwitz étaient employés dans de grandes fermes, notamment dans la station agricole expérimentale de Rajsko. Ils étaient également forcés de travailler dans des mines de charbon, des carrières, des usines de poissons et, surtout, dans des usines d’armement, telles que des usines d’équipement DAW, « Deutsche-Ausrüstungs-Werke », établies en 1941. Les prisonniers passaient par une sélection périodique : si les SS les jugeaient trop malades ou trop faibles pour continuer à travailler, ils étaient transférés à Auschwitz-Birkenau et tués.
À Auschwitz I, ceux qui étaient sélectionnés pour le travail forcé étaient enregistrés et leur bras gauche était tatoué d’un numéro d’identification. Ils étaient ensuite assignés au travail forcé dans l’un des camps du complexe ou ses sous-camps.
L’évacuation d’Auschwitz et ses sous-camps
A la mi-janvier 1945, alors que les troupes soviétiques approchaient, les SS commencèrent à évacuer Auschwitz et ses sous-camps.
Soixante mille prisonniers furent contraints de marcher vers l’ouest. Des milliers d’autres avaient été tués sur place quelques jours avant le début de ces marches de la mort.
Des dizaines de milliers de prisonniers, pour la plupart juifs, furent forcés de parcourir 55 kilomètres vers le nord-ouest jusqu’à la ville de Gliwice (Glei-witz) ou 63 kilomètres vers l’ouest jusqu’à Wodzislaw (Loslau) en Haute-Silésie. Les premiers furent rejoints par des prisonniers des sous-camps dans l’est de la Haute-Silésie — Bismarckhuette, Althammer, Hindenburg et d’autres. Les seconds furent rejoints par des prisonniers des sous-camps du sud d’Auschwitz, comme Jawischowitz, Tschechowitz et Golleschau.
Article issu de la brochure » AUSCHWITZ : NE PAS OUBLIER ! Contre l’antisémitisme, ni oubli ni circonstances atténuantes ( https://cnt-ait.info/2024/05/03/bro-auschwitz/ )
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