La lutte anarchiste en Birmanie

Anarchistes à Yangon dans les protestations contre le Coup d’Etat militaire début 2021

Cet article explique comment l’anarchisme est apparu en Birmanie au début du 21ème siècle et comment il se développe actuellement. Il explique comment les mouvements anarchistes en Birmanie ont été déviés par les politiques identitaires clivantes (« divisives ») néolibérales et comment ils sont de nouveaux revendiqués par les anarchistes dans une perspective intersectionnelle basée sur la classe.

La lutte des anarchistes en Birmanie

Le Myanmar[1] a une longue tradition de gauche totalitaire et de stalinisme depuis l’époque coloniale, histoire forgée dans la résistance au colonialisme britannique. Plus tard, [entre 1962 et 1988], un régime socialiste stalinien dirigé par le dictateur militaire, le général Ne Win, a gouverné le pays. Par la suite, le régime socialiste stalinien s’est transformé en une bureaucratie militaire où les officiers militaires sont devenus la nouvelle classe opprimant les mouvements démocratiques.

La gauche en Birmanie au vingtième siècle

Le parti communiste de Birmanie (PCB) a été créé formellement en 1939, essentiellement comme un mouvement de libération nationale. Si sa création s’est placée sous l’influence idéologique du Parti Communiste Indien et de la vision réformiste du communisme d’Earl Browder[2], il s’est ensuite dégradé en un culte de la personnalité stalinien et maoïste sous les direction successives des  analphabète politiques Thakin Than Tun, Thakin Zin et Thakin Chit[3]. D’une manière générale, la direction du parti communiste de Birmanie peut être classée en trois factions :

  • La première est celle de l’allégeance idéologique au « browdérisme » [politique de Front Populaire et neutralité bienveillante envers les USA comme l’URSS] ;
  • La seconde faction est celle de la tradition Léniniste, mais elle  ne concernait qu’une infime minorité au sein du Politburo qui a ensuite été purgée par les maoïstes au cours des années 1960 ;
  • La dernière faction est celle du culte de la personnalité maoïste. C’est cette faction qui contrôle toujours le parti actuel.

En dehors du PCB, il y avait d’autres mouvements de gauche qui s’identifiaient séparément du PCB. Le Parti Socialiste, représenté par les sociaux-démocrates et les militaires, était l’une de ces fractions. Il a existé aussi des sortes de mouvements syndicalistes sous la bannière de la Fraction socialiste rouge, dirigée par Thakin Lwin, actif notamment dans le Syndicat des travailleurs du pétrole. Bien que brandissant la bannière du syndicalisme, Thakin Lwin et sa faction ont choisi de rester fidèles au culte de la personnalité stalinien.

Cependant, l’anarchisme n’a jamais fait partie de ces fractions, du moins dans leurs références historiques contemporaines. Alors que le concept de prise de pouvoir de l’État par une avant-garde élitiste est trop courant en Birmanie, le concept de construction de communautés à partir de la base, le concept d’aide mutuelle et l’idée anti-autoritaire étaient inconnus du public. Thakin Nu (1907-1995), le premier Premier ministre de Birmanie en 1948, était connu pour avoir écrit [dans sa jeunesse] quelques articles soit disant anarchistes. Cependant, ses articles étaient loin de l’anarchisme et n’avaient rien à voir ni avec cette pensée ni avec ce mouvement.

Ainsi, l’anarchisme est devenu une insulte pour les gauchistes autoritaires qui veulent accuser quelqu’un avec qui ils ne sont pas d’accord. Le terme « anarchiste » est utilisé pour déshumaniser une personne ou dévaloriser son héritage politique.

Le cas de Thakin Ba Tin (H.N. Goshall) est exemplaire à cet égard : Thakin Ba Tin fut le seul membre du Politburo à avoir voté contre l’approche de la guérilla maoïste lors de la réunion du Comité juste avant que le PCB ne commence la guerre civile en avril 1948. Avant cette réunion, Thakin Ba Tin avait écrit, alors qu’il était membre du Parti Communiste Indien, un livre intitulé « La situation politique actuelle en Birmanie et notre tâche »[4], qui préconisait essentiellement l’approche marxiste orthodoxe de la « grève de masse ». Thakin Ba Tin décida de défendre sa position en faveur de l’approche marxiste orthodoxe de la « grève de masse » par rapport à l’approche de la guérilla maoïste lors d’une réunion du politburo du PCB. Cependant, la faction de Thakin Than Tun, favorable à la guérilla maoïste, remporta la majorité des voix, et le Parti Communiste de Birmanie déclencha la première guerre civile historique et la plus longue contre le gouvernement social-démocrate de la Birmanie postcoloniale. Ce débat ou cette lutte politique s’est poursuivi au sein du politburo du PCB jusqu’à ce que Thakin Ba Tin et ses partisans soient assassinés sans pitié dans la forêt au cours des années 1960 (lorsque le Parti du programme socialiste de Birmanie avait pris la tête du gouvernement). Pour justifier leurs appels à tuer Thakin Ba Tin, les dirigeants du PCB Thakin Than Tun et Thakin Zin avaient accusé Thakin Ba Tin d’être un anarchiste. C’est l’exemple parfait de la manière dont ces fascistes rouges maoïstes ont utilisé le terme anarchiste comme une insulte contre les militants de gauche avec lesquels ils ne sont pas d’accord. Cela révèle également leur analphabétisme et leur ignorance des différences entre les tactiques politiques du marxisme orthodoxe et de l’anarchisme.

Au début du 21e siècle, constatant l’évolution historique conjointe tant au niveau local du régime militaire stalinien que au niveau international des régimes maoïstes, quelques groupes minoritaires de gauchistes progressistes en Birmanie se mirent en recherché de nouvelles alternatives. Certains ont trouvé leurs alternatives dans les tendances marxistes orthodoxes telles que le léninisme et le trotskisme. D’autres se sont tournés vers l’approche sociale-démocrate des réformes graduelles. D’autres encore se sont décrits comme des anarchistes.

Il est très difficile de trouver des preuves historiques sur les mouvements anarchistes au début des années 2000. Cependant, le mouvement anarchiste en Birmanie a une influence considérable sur le mouvement athée du 21e siècle[5]. L’un des fondateurs des « athées birmans », Thiha JP, est connu pour être l’un des premiers anarchistes du courant anarchiste actuel. Il se décrit lui-même comme un « anarchiste punk autoproclamé« . Thiha JP est bien connu pour ses écrits perspicaces sur les anciennes philosophies matérialistes indiennes et sur l’anarchisme.

Tout comme en Occident, le mouvement de la contre-culture punk est largement lié à l’anarchisme au Myanmar. Même à l’heure actuelle, les anarchistes les plus populaires en Birmanie sont sans doute un groupe punk appelé « Rebel Riots ». Rebel Riots est bien connu pour ses projets d’entraide et ses chansons à paroles progressistes. Mais la pratique de déshumanisation ou de dégradation des personnes qui ne sont pas d’accord avec eux semble est encore aujourd’hui une pratique courante des marxistes. Rebel Riots, bien qu’ayant un grand éventail de projets d’entraide et d’activisme musical, est toujours accusé d’être une « ONG punk » par certains gauchistes staliniens en ligne qui n’ont rien fait d’efficace dans la lutte contre le capitalisme et la junte militaire.


L’anarchisme de synthèse ou les idiots utiles des « tankistes » staliniens

Étant donné qu’aucune littérature anarchiste n’a été traduite en birman, l’anarchisme en Birmanie est encore assez superficiel. La plupart des anarchistes autoproclamés n’ont aucune idée de la participation des  mouvements anarchistes révolutionnaires dans l’Histoire. En outre, le fétichisme de l’étiquette « anarchiste » tend à jouer un rôle pour les toxicomanes, les bohèmes et le lumpenprolétariat qui aiment faire tout ce qu’ils veulent [sans en assumer la responsabilité]. Bien qu’ils s’autoproclament anarchistes depuis une ou deux décennies, il s’avère qu’ils sont encore fortement influencés par les perspectives « tankistes »[6] staliniennes. La plupart d’entre eux croient encore aux cultes de la personnalité stalinienne et maoïste et sont influencés par des personnalités tankistes telles que Polpot, Ho Chi Minh et Fidel Castro. Bien qu’ils s’annoncent comme anarchistes, ils participent toujours activement à la politique des partis politiques, soutenant ou participant à la fois aux activités du Parti Communiste de Birmanie et à celles des Partis sociaux-démocrates de centre-gauche tels que le Parti Démocratique Pour Une Nouvelle Société (DPNS, Democratic Party for a New Society). Parmi ces exemples, on peut citer des figures de la gauche populiste comme « Zin L » et d’autres anarchistes auto-proclamés de sa génération.

Lorsque on questionne ces anarchistes autoproclamés sur les rébellions de Cronstadt, de l’Armée révolutionnaire insurrectionnelle d’Ukraine, de la Rébellion paysanne contre les bolcheviks et d’autres mouvements de gauche radicale contre les bolcheviks, il s’avère que ces faits historiques leurs sont totalement inconnus. Lorsque j’ai écrit sur ces sujets dans le blog « Libertarian Marxism Myanmar« , ces idiots utiles du fascisme rouge et du maoïsme ont accusé ma page internet d’être de la propagande libertarienne de droite.

Seule une infime partie des anarchistes birmans qui connaissaient et lisaient déjà Nestor Makhno et Max Stirner m’ont approché pour discuter en détail de ces sujets. Suite à nos discussions, la politique anarchiste en Birmanie s’est transformée en un mouvement où les tankistes ne peuvent plus dicter leur loi aux anarchistes, puisque ces derniers se sont organisés idéologiquement. Maintenant, avec ces vrais anarchistes, nous prévoyons de former un groupe d’anarchosyndicalisme où nous pourrions réaliser des projets d’entraide, d’engagement communautaire et des campagnes pour produire du matériel de lecture anarchiste.

Personnellement, en tant que personne qui travaille également en étroite collaboration avec des groupes trotskystes occidentaux tels que l’Alternative socialiste internationale (International Socialist Alternative) et l’Alliance pour la liberté des travailleurs (Alliance for Workers’ Liberty), je n’ai généralement aucun problème à travailler avec des personnes ayant des pratiques différentes tant qu’elles ne sont pas bureaucratiquement autoritaires et hypocrites. Je suis heureux de travailler avec des progressistes de tous horizons idéologiques, tant que ce n’est pas de manière hiérarchique et bureaucratique. Cependant, les maoïstes en Birmanie sont hypocrites à tous points de vue. Tout en dénonçant la dictature militaire comme un mal, ils considèrent le Parti communiste chinois comme une sorte de sauveur pour eux. Alors qu’ils dénoncent le génocide des Rohingyas par opportunisme pour préparer leur retour politique, ils n’ont jamais dénoncé publiquement le Parti communiste chinois pour le génocide des Ouïghours. En fait, ils ont soutenu le génocide des Ouïghours pour défendre le Parti communiste chinois.

Dans le passé (début des années 2010), la plupart des anarcho-tankies (idiots utiles des fascistes rouges) n’ont rien fait d’efficace en ce qui concerne les mouvements d’entraide, les mouvements d’auto-organisation, les mouvements syndicalistes et les campagnes de lutte contre la censure. Ces activités sont menées par quelques anarchistes qui veulent éloigner leur mouvement des mouvements maoïstes (fascistes rouges).

Lorsque les anarchistes ne s’éduquent pas, le néolibéralisme profite de leur ignorance.

En outre, la plupart de ces fractions anarcho-tankistes sont mal informées sur la politique mondiale, bien qu’elles aient eu le privilège de fréquenter les meilleures universités privées et publiques de Birmanie grâce au soutien de leurs parents. En prenant la politique sociale-démocrate occidentale de Bernie Sanders et d’Alexandria Ocasio-Cortez AOC[7] pour la gauche radicale, ces anarchistes autoproclamés adoptent la politique du « test décisif » [et ainsi préservent en fait leurs opportunités pour une éventuelle prochaine carrière universitaire ou politique].[8]. La plupart d’entre eux ignorent totalement l’existence de groupes anarchosyndicalistes tels que l’AIT, les IWW, etc.

Il en résulte qu’ils sont fortement influencés par les politiques identitaires, qui sont enracinées dans la culpabilité blanche libérale et les politiques de « vertu ostentatoire » ou « signalement moral » (virtue signalling politics) des libéraux privilégiés occidentaux. Apparemment, avec leur ignorance de la littérature classique concernant la politique de gauche et avec leur conscience coupable de leur identité de bouddhistes ou de Birmans dans un pays à majorité bouddhiste ou birmane, ils ont fini par approuver et soutenir le mouvement nationaliste de droite des minorités ethniques et religieuses. Par exemple, Maung Zarni, un universitaire birman très populaire en Occident, a même accusé un autre universitaire mais américain, Kirt Mausert, d’avoir qualifié l’ARSA (Armée du salut des Rohingya de l’Arakan, Arakan Rohingya Salvation Army) de groupe terroriste et ce faisant d’avoir œuvré à l’augmentation de l’islamophobie en Birmanie. Il s’avère pourtant qu’apparemment, l’ARSA a tué un grand nombre de militants rohingyas progressistes et modérés dans les camps de réfugiés[9]. Cela explique le « syndrome du sauveur »[10] birman/bouddhiste de l’activiste néolibéral qui accuse d’islamophobie tous ceux qui ont tendance à avoir une opinion différente de la sienne lorsqu’il s’agit des problèmes de la communauté musulmane. Ce type de mentalité se retrouve chez la plupart des bouddhistes birmans/bamar[11] [auto-culpabilisés] qui se disent progressistes.

Outre ces néolibéraux birmans qui cultivent la haine de soi, il existe une autre tendance qui repose sur le syndrome du sauveur [et qui est son image en miroir]. Ainsi Maung Zarni, avec son syndrome du sauveur birman/bouddhiste, et Kirt Mausert, avec son syndrome du sauveur blanc, ont tous deux un point commun, même s’ils ont des différends personnels sur les questions liées à l’ARSA. Tous les deux n’hésitent pas à dénoncer l’ensemble de la classe ouvrière birmane comme étant des racistes monolithiques lorsqu’il s’agit de la question des Rohingyas. Ils n’ont pas reconnu la diversité des opinions au sein des communautés bouddhistes et musulmanes birmanes en ce qui concerne la question des Rohingyas. Ils n’ont pas tenu compte des différences entre les éléments progressistes, les éléments conservateurs et les éléments neutres (qui sont trop pauvres pour s’informer sur ces questions). Il me semble, en tant moi-même qu’ex-musulman/ex-bouddhiste de religion/race mixte, qu’il s’agit là d’un racisme anti-Bamar/Birman.

L’un des dirigeants les plus influents du parti communiste birman contemporain, le camarade Kyin Maung, a un point de vue différent sur la question du nationalisme ethnique, d’un point de vue de gauche classique ou orthodoxe. Dans ses articles, le camarade Kyin Maung a correctement souligné le contraste entre l’idéologie nationaliste et la politique de classe traditionnelle. Ainsi, le camarade Kyin Maung, bien qu’il soit maoïste, a souligné à juste titre que la solidarité de la classe ouvrière est nécessaire au-delà des origines ethniques et religieuses différentes qui peuvent exister au sein de la classe. Cette analyse me rappelle ce qu’a dit le professeur Adolph Reeds lorsque le mouvement Black Lives Matter a été adopté par l’antiracisme néolibéral en raison de l’incapacité des gauchistes à l’orienter vers les mouvements de solidarité avec la lutte des classes.

Un autre exemple de cette politique réactionnaire pourrait être celui d’un tankiste ou anarchiste autoproclamé appelé « Kyi T », qui a élevé la voix pour soutenir les talibans lorsque la classe ouvrière et les femmes progressistes d’Afghanistan luttaient pour se libérer des talibans et de leur islamisme. Ce type de politique, que l’on ne retrouve pas chez les anarchistes,  est courant chez les maoïstes, les staliniens et les tankistes qui ont eu la naïveté de considérer l’islamisme comme un anti-impérialisme. Néanmoins, de tels points de vue politiques ont été démystifiés à d’innombrables reprises par des musulmans eux-mêmes, des marxistes et des progressistes, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du Moyen-Orient. Même les marxistes et les anarchistes des pays voisins tels que le Pakistan et le Bangladesh sont dégoûtés par un tel « anti-impérialisme des imbéciles ». Même les réformateurs religieux musulmans de Birmanie ont déclaré publiquement que les talibans n’avaient rien à voir avec leur version progressiste de l’islam. Pourtant, ce trafiquant de drogue activiste d’influence maoïste et d’origine musulmane, « KYI Thit », qui se prétend anarchiste, a publiquement annoncé son soutien aux talibans. Ce type de pseudo-gauchistes musulmans, qui ne sont hostiles qu’à la communauté bouddhiste tout en soutenant les éléments fondamentalistes musulmans, deviennent progressivement plus nombreux que les véritables camarades musulmans progressistes de gauche qui osent s’opposer aux éléments fondamentalistes de la communauté musulmane et aux éléments racistes de la communauté bouddhiste en Birmanie.

Discriminations à l’encontre des anarchistes

Depuis que les anarchistes ne sont plus contrôlés par les tankistes et qu’ils ont commencé à remettre en question les crimes de guerre de Staline et de Léon Trotski, la gauche autoritaire en Birmanie a perdu patience avec les anarchistes. Nous nous attendons à une forte discrimination à l’encontre des anarchistes qui sont activement impliqués dans les milices de gauche telles que l’ALP, Armée de Libération Populaire (PLA, People Liberation Army, groupe para-militaire du Parti Communiste de Birmanie), etc.

Quand les sociaux-démocrates et les tankistes s’unissent

Superficiellement, il peut sembler difficile de digérer le fait que les sociaux-démocrates et les tankistes s’unissent parfois contre les organisations libertaires d’extrême-gauche. Mais dans les faits, un tel exemple est visible en Birmanie. Cependant, comme cela a été démontré par le marxiste Hal Draper dans sa brochure « les deux âmes du socialisme, le socialisme par en bas »[12], il est évident que le stalinisme et la social-démocratie réformiste sont similaires car ils adoptent une politique de socialisme par en haut.

La première publication des anarchistes birmans

En dépit de nombreux défis, les anarchistes birmans tentent de mettre en place de véritables fédérations qui leur permettraient de se démarquer des tendances autoritaires de l’avant-garde élitiste. La page internet « Libertarian Marxism Myanmar » joue son rôle de forteresse théorique de première ligne contre le fascisme rouge autoritaire. La chaîne Télégram « Autonomists« , où la plupart des anarchistes partagent leurs textes politiques locaux, a été créé récemment. A  titre d’exemple, quelques textes sur le Confédéralisme démocratique d’Ocalan, ou des textes de Murray Bookchin ou David Graeber ont été récemment traduits.

Projets personnels

Personnellement, je suis motivé pour compiler ou écrire des livres sur les « soulèvements de gauche contre les bolcheviks », qui incluent des sujets tels que la lutte de la rébellion de Kronstadt contre les bolcheviks ou encore la lutte de l’Armée révolutionnaire insurrectionnelle d’Ukraine.

De plus, en tant que communiste libertaire qui a trouvé beaucoup d’aspirations dans le leader trotskiste chinois Chen Duxiu et le leader marxiste iranien Mansoor Hekmat, je travaille dur pour écrire sur eux en birman également.

Résumé

En résumé, l’anarchisme en Birmanie était si superficiel qu’il a été influencé par quelques universitaires anarchistes occidentaux riches et autoproclamés, avec des syndromes de sauveur blanc. C’est pourquoi il était si réactionnaire et inefficace lorsqu’il s’agissait d’assimiler les valeurs politiques anti-autoritaires. À l’époque, certains anarchistes qui ont réussi à rompre leurs liens avec les fascistes rouges ont également fini par devenir des anarchistes individualistes en raison de l’absence d’une véritable compréhension historique de l’anarchisme.

Les années 2020 sont celles où notre génération d’anarchistes devra faire de son mieux pour produire du matériel d’apprentissage pour la compréhension historique de l’anarchisme et aussi pour les développements ultérieurs de l’anarchisme contemporain. Suite à ma confrontation peu commune contre les tendances autoritaires de gauche avec cette page Facebook « Libertarian Marxism Myanmar« , cela a été vraiment une grande chose que les anarchistes correctement éduqués en Birmanie se soient unis malgré leur appartenance à différentes tendances de l’anarchisme. Avec notre lutte commune pour produire plus de littérature anarchiste et organiser des communautés d’entraide, il est inévitable qu’il y ait des tendances anarchistes plus fortes en Birmanie pour la prochaine génération.

Hein Htet Kyaw, 26 mars 2023


[1]  Le 18 juin 1989, le nom officiel en anglais du pays (Burma, Birmanie en français) a été changé en Myanmar par le pouvoir dictatorial des généraux.

[2]  Earl Browder (1891-1973) : insoumis pendant la Première guerre mondiale, il rejoint la Parti Communiste des USA à sa création en 1920. Représentant des syndicats des mineurs du Kansas à Moscou pour le Congrès de fondation de l’Internationale Syndicale rouge (ISR) en juillet 1921. Organisateur pour le compte de l’Internationale communiste et de l’ISR, qu’il représente en Chine et en Asie à la fin des années 20, il rentre aux USA en 1930 où il est nommé secrétaire général du Parti communiste des États-Unis d’Amérique (CPUSA). Pendant les 15 années qui suivirent, Earl Browder devint la personnalité publique la plus connu du Parti Communiste Américain. Il entame le tournant réformiste du PC américain, s’alliant avec les sociaux-démocrates pour former un « front populaire » et soutenir le New Deal de Roosevelt. Brièvement arrêté à la suite de la signature du pacte sovieto-nazi (pacte Ribbentrop-Molotov) il est libéré par le gouvernement US en 1943 pour plaire à Staline. Dès lors, il devient un fervent partisan de la coopération étroite entre les États-Unis et l’Union soviétique pendant la Seconde Guerre mondiale et appelle à poursuivre la coopération entre ces deux puissances militaires dans les années d’après-guerre. Considérant que le rôle des communistes américains devait être celui d’un groupe de pression organisé au sein d’une large coalition gouvernementale, il dirigea en 1944 la transformation du CPUSA en une « association politique communiste ». Il est expulsé du Parti Communiste en 1946 au démarrage de la Guerre Froide. Sa vision du communisme  repose sur une coopération à long terme entre les puissances alliées (USA et URSS) à l’étranger et la paix civile à la maison par une alliance de Front Populaire entre communistes, sociaux-démocrates et forces progressistes. Le Browderisme est donc une politique communiste caractérisée par l’idée que la révolution armée n’est plus nécessaire pour établir une dictature du prolétariat, car le fascisme et l’impérialisme mondiaux ont été affaiblis durablement par la Seconde Guerre Mondiale, faisant des méthodes constitutionnelles une véritable option pour parvenir à la « libération nationale ». Hensengerth, Oliver (2005). « The Burmese Communist Party and the State-to-State Relations between China and Burma », Leeds East Asia Papers. 67.

[3]  Thakin Than Tun (1911-1968) : président du Parti communiste de Birmanie de 1945à sa mort.

Thakin Zin (1914-1995) : président du Parti communiste de Birmanie de 1975 à 1989.

Thakin Chit (1915-2005) : aussi connu sous le nom de Widuya Thakin Chit Maung, fondateur dans les années 1950 du Parti Birman des Travailleurs.

Les membres fondateurs du Parti Communiste Birman sont tous affublés du titre honorifique Thakin, d’après le surnom de leur premier groupe nationaliste et qui veut dire « les maîtres » car ils voulaient redevenir maitres de leur pays.

[4]   « On the Present Political Situation in Burma and Our Task »

[5]   La manière dont les maoïstes et les staliniens se sont approprié le bouddhisme pour le rendre compatible avec leurs idéologies sera l’objet d’un autre article

[6]  NdT : Dans l’argot politique nord-américain et plus largement anglo-saxon, les tankistes sont des personnes qui sont idéologiquement alignées sur le Communisme soviétique ou Maoïste sans aucune réserve ni esprit critique, aussi subtils que des chars d’assauts T62 écrasant les insurrections de Budapest 56 ou Prague 68, d’où ce surnom moqueur.

[7]   Bernie Sanders et Alexandria Ocasio-Cortez sont les tendances dites « de gauche » du Parti Démocrate américain

[8]  NdT : «  these self-claiming anarchists adopted the litmus test politics  ». La “politique du test décisif” est une expression nord-américaine qui fait référence au fait que les jurys d’examen des candidats aux postes élevés dans l’administration US ou aux postes universitaires leur pose une question décisive pour s’assure que le candidat partage les mêmes valeurs démocratiques que l’institution pour laquelle ils postulent. La pseudo-radicalité de façade des anarchistes de façade est en fait compatible avec leur intégration et leur évolution au sein de l’administration ou des entreprises, un peu à l’image des jeunes « radicaux » français de Mai 68 qui tout en tenant un discours enflammé sur la nécessité de la révolution se préparaient à intégrer les rouages du système où nombre d’entre eux ont fini sénateurs, rédacteurs en chef de journaux ou chef d’entreprise une fois passée leur crise d’adolescence rebelle.

[9]  NdT : L’ARSA est aussi accusé par Amnesty International d’exactions contre des civils hindous et notamment du massacre de 53 villageois, dont 20 hommes, 10 femmes et 23 enfants, à Kha Maung Seik, près de Maungdaw (en), le 25 août 2017. « Un groupe armé rohingya massacre des dizaines d’Hindous », Amnesty International, 23 mai 2018, https://www.amnesty.fr/conflits-armes-et-populations/actualites/un-groupe-arme-rohingya-massacre-des-dizaines-dhindous

[10] NdT : Le syndrome ou complexe du sauveur (saviour complex) est un comportement par lequel les personnes ont un besoin permanent et exacerbé de recevoir de la gratitude et de la reconnaissance d’autrui. Ainsi, il présente une empathie et un besoin de sacrifice pour les autres, qui est constant. Derrière cette apparente gentillesse se cache en fait une profonde blessure narcissique. Ce que le « sauveur » recherche, bien sûr le plus souvent inconsciemment, est non pas d’aider les autres, mais de savoir qu’il a aidé, et de faire savoir qu’il a aidé. En somme, de regonfler son égo, à ses yeux et aux yeux du monde. Pour ce faire, un sauveur se tourne principalement vers des personnes fragiles, en difficulté psychologique ou financière, malades, pris dans une addiction, etc. Le sauveur va agir sur un besoin de sécurité que rencontre la personne aidée. Le sauveur ne cherche pas à sortir les personnes qu’il aide de leur situation, au contraire. Le sauveur est en fait en quête d’une reconnaissance infinie de la part de la personne qu’il a aidée. C’est cette dimension de dette, de déséquilibre dans la relation, qui créé une situation malsaine, même si c’est la plupart du temps inconscient de part et d’autre.

[11]  NdT : les bamars sont l’ethnie majoritaire de Birmanie.

[12]  Hal Draper, The Two Souls of Socialism, 1966

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Texte tiré de la brochure  » La révolution du printemps au Myanmar :Une révolution oubliée en cours » 

Table des matières :

La révolution du printemps au Myanmar : Une révolution oubliée en cours.

La lutte anarchiste en Birmanie.

La lutte des travailleurs de Myanmar Pou Chen, sous-traitant d’Adidas.

Bref résumé historique du Parti Communiste de Birmanie.

Création d’une initiative de l’AIT au Myanmar.

Pourquoi les anarchistes ne soutiennent pas Aung San Suu Kyi ?

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