ETAT FRANÇAIS – MINISTERE DE L’INTERIEUR TRES SECRET : LE « MOUVEMENT LIBERTAIRE » ESPAGNOL EN FRANCE (1942)

(Extrait de la brochure des anarchistes espagnols en Résistance, tome 1)

Ce texte fait partie d’une brochure en cours d’édition sur les anarchosyndicalistes espagnols et la résistance

La présence en France, suite à la défaite de la Révolution et la Guerre d’Espagne en 1939, de milliers d’anarchistes fut un motif d’inquiétude tant pour la République que pour Vichy. Si la République les traita en indésirable, Vichy les traita en ennemis de l’intérieur potentiels. ils furent l’objet d’une surveillance particulière.

Nous reproduisons ci-après une lettre du Ministère de l’Intérieur de l’Etat Français adressée au Directeur du Camp de concentration de Vernet d’Ariège, accompagné d’une note qui décrit ce que Vichy connaissait de la réorganisation du Mouvement anarchiste espagnol en France. Il apparait qu’il n’en connaissait qu’une partie émergée de l’iceberg, la partie la plus visible autour notamment du « conseil national ». Mais les regroupements diffus, notamment autour du barrage de l’Aigle dans le Cantal, qui rejoignirent les maquis, ne leur semble pas connus alors. A la suite, nous joignons la reproduction de la réponse du directeur du Camp du Vernet, qui permet de voir comment les membres du « conseil national » avaient berné la surveillance étroite dont ils faisaient l’objet.

MINISTERE DE L’INTERIEUR
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Direction Générale
de la Police Nationale
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Inspection Générale Des Services
De Police Judiciaire
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N°8179 POL.JUD.2.T
rappeler la réf.
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ETAT FRANÇAIS

VICHY, le 26 janvier 1942
Le CONSEILLER D’ETAT
SECRETAIRE GENERAL pour la POLICE
A Monsieur le PREFET de l’ARIEGE
– Cabinet –
A FOIX

OBJET : Action du « Mouvement Libertaire », en France.

PIECES JOINTES : Une note du 20 Janvier 1942 et son annexe.

J’ai l’honneur de vous transmettre, sous ce pli, la copie d’une note, en date du 20 Janvier 1942, et de son annexe, relative à l’action du « Mouvement Libertaire » en France.

Je vous prie de vouloir bien faire procéder, d’extrême urgence, à une enquête approfondie sur les membres de cette organisation anarchiste résident dans votre département, et au domicile desquels il y aura lieu de faire effectuer une perquisition et de saisir tout document intéressant cette propagande étrangère.

Vous voudrez bien me tenir informé dans le moindre délai possible des résultats des opérations et me communiquer avec la notice individuelle, la fiche dactyloscopique en double exemplaire et la photographie des intéressés, contre lesquels je vous laisse le soin de prendre, le cas échéant, toute mesure administrative que vous jugerez utile.

Le Conseiller d’Etat
Secrétaire Général pour la Police

Notes manuscrites dans la marge (vraisemblablement du Préfet ou du Directeur de Cabinet) : En faire une copie supplémentaire pour en Barranchin ( ?) en tout 4

Note manuscrite en bas de page : Copie au Commandant Général, et au Commandant Lundman au Camp du Vernet, en le priant de m’adresser les renseignements demandés internés étrangers désignés dans la note ci jointe [illisible] internés au Vernet.

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Vichy, le 20 Janvier 1942
TRES SECRET


– NOTE –
« LE MOUVEMENT LIBERTAIRE »
Espagnol en France.

Il y a quelques mois, les services de police de Casablanca découvraient un centre de propagande anarchiste dans les milieux espagnols réfugiés au Maroc. Les mots d’ordre de cette propagande étrangère venaient de France où le mouvement semblait être dirigé par les nommés « ‘GERMINAL »  et « MARIN ».

Une enquête effectuée par le Commissaire TAUPIN de l’Inspection Générale des Services de Police Judiciaire devait amener l’identification des animateurs de ce « Mouvement Libertaire » qui s’étaient constitués en « Comité National».

Origine

L’origine de ce « mouvement libertaire » doit être cherchée en Espagne où il prit naissance il y a un peu moins d’un siècle, se développant sous l’influence des théoriciens de la Ière internationale dans les milieux ouvriers espagnols où ils devaient d’ailleurs trouver un terrain favorable, l’individu de par sa nature portant en lui le germe de l’anarchisme.

Le « Mouvement Libertaire » se traduisit sur le plan politique par la création de la Fédération Anarchiste Ibérique et sur le plan syndical par la création de la Confédération Nationale du Travail. Il ne faut pas oublier que la F.A.I. restée toujours clandestine, avait besoin d’un organe officiel aux fins de pouvoir exercer son influence sur les pouvoirs publics. C’est par l’intermédiaire de la C.N.T. dont les membres dirigeants sont en général des adhérents de la F.A.I., ou tout au moins gagnés aux idées libertaires, que cette influence s’exerce. La participation au gouvernement Largo CABALLERO à titre de ministres, de quatre représentants de la C.N.T. en est un exemple frappant, car MONTSENY Frédérica [sic], GARCIA Oliver, Juan PEIRO, et Juan LOPEZ, sont avant tout, les représentants de la F.A.I.

La famille libertaire comprend donc : la C.N.T., la F.A.I., et les Jeunesses Libertaires.

Le Mouvement Libertaire en France :

La débâcle des armées républicaines espagnoles, obligea les dirigeants et les adhérents de la C.N.T. et de la F.A.I. à se réfugier en France.

Le Service d’Evacuation des Réfugiés Espagnols (S.E.R.E.) et la Junta de Auxilio a los Republicanos Espagnoles (J.A.R.E.) organes crées à Paris pour s’occuper des questions d’émigration et d’allocations aux réfugiés républicains, allaient permettre aux chefs du Mouvement Libertaire de tenter un timide essai pour regrouper leurs adhérents, mais cet essai fut sans lendemain le S.E.R.E. et la J.A.R.E. ayant été dissous et leurs dirigeants poursuivis devant les tribunaux de la Seine pour infraction aux décrets des 12 Août et 26 Septembre 1939 .

Malgré ces poursuites, la question d’émigration et d’allocations aux réfugiés continua à être agitée dans les milieux espagnols et les anciens collaborateurs du S.E.R.E. et de la J.A.R.E. continuèrent leur activité en relation avec la Légation du Mexique qui, en vertu des accords Franco-Mexicains du 23 Août 1941, se chargeait en France du problème des réfugiés espagnols se substituant en réalité aux organismes que ceux-ci avaient créées à Paris et qui avaient été, comme nous venons de le voir, dissous.

C’est sous le couvert de correspondances ou de circulaires traitant de ces questions d’émigration qu’allait prendre naissance la propagande libertaire, inspirée par un « Comité National » dont le Secrétaire Général n’était autre que le mari de la [sic] MONTSENY : ESGLEAS-JAIME José, né le 5 Octobre 1903 à Malgrat, dt à Salon (Dordogne), individu figurant sur les listes de suspects de la Police Nationale du 15 Juin 1938, comme anarchiste propagandiste.

Les autres membres du « Conseil National » étaient :

MONTSENY-MANE Frédérica  [sic], femme ESGLEAS, née le 12 février 1905 à Madrid, dt à Salon (Dordogne), ex-Ministre de la Santé Publique et de l’Assistance Sociale dans le Cabinet Largo CABALLERO, propagandiste notoire connue aux archives de la Police Nationale comme anarchiste.

DE SOUZA Germinal, né le 22 Mai 1906 à Porto (Portugal) de nationalité espagnole, Secrétaire de la F.A.I., membre de la C.N.T., figurant sur la liste n°2 des individus suspects de menées terroristes publiée par la Police Nationale avec la mention suivante « expulsé d’Espagne comme anarchiste dangereux ».

ISGLEAS-PIERNAU Francisco, né le 16 Février 1916 à St Féliu de Guixols, ancien Commissaire Politique aux Armées, Conseiller de défense de la Généralité de Catalogne, membre de la Commission politique de la C.N.T., membre de la F.A.I., figure comme terroriste sur la liste des suspects n°1 d’Avril 1939 de la Police Nationale.

MAS-CASAS Valério, né le 24 mai 1894 à Barcelone, Conseiller de l’Economie, des Services Publics, et de l’Assistance Sociale de la Généralité de Catalogne, membre de la C.N.T.

HERRA-CAMARERO Pedro, né le 18 janvier 1909 à Valladolid, Président de la Junte du Commerce Extérieur de Catalogne, Ministre de l’Assistance Sociale et de la Santé Publique dans le Gouvernement de Catalogne. Secrétaire du Syndicat de Catalogne C.N.T. Membre du Comité Péninsulaire de la F.A.I. et délégué du Conseil Général de la S.I.A. (Solidarité Internationale Antifasciste).

Il y a lieu de noter que certains membres du Mouvement Libertaire, entre-autre ceux qui avaient constitué à Madrid, sous la présidence du Général MIAJA, la Junte de défense de cette ville, dernier noyau de la défense républicaine et qui s’étaient réfugiés à Londres, en 1939, ne voulurent pas reconnaître l’autorité d’ESGLEAS ni celle du Comité National.

Cette tendance désignée sous le nom des « Amis de Londres » a pour représentant :

SALAGO Manuel, GONZALEZ José et PRADAS qui se trouveraient à Londres et :

GONZALES-MARIN Manuel : dit « MARIN Manuel », né le 4 juillet 1898 à Archena, dt à Albefeuille-Lagarde (Tarn et Garonne). Membre du Conseil National de la Junte de défense de Madrid et figurant aux archives de la Préfecture de Police comme membre actif de la C.N.T. et de la F.A.I. et comme anarchiste dangereux pour l’ordre public.

VAL-BESCOS Edouardo, dit « VAL », né le 13 octobre 1908 à Jaca, dt à Toulouse, 20 rue Beauséjour, Délégué du Gouvernement pour l’organisation des milices à Madrid. Conseiller de la Junte de défense de Madrid.

PONZAN-VIDAL François, né le 30 mars 1912 à Oviédo, dt chez une dame Vinuales, 41 rue Limarec à Toulouse.

Propagande

Elle se traduit par l’envoi de circulaires, par l’échange de lettres traitant en général des questions d’émigration ou de toute autre question relative au problème des réfugiés espagnols en France, à l’occasion desquelles sont développées des idées philosophiques à tendance anarchiste.

Elle tend à regrouper les adhérents de la C.N.T. à renouer et entretenir entre eux des liens de solidarité du passé et à maintenir le contact en vue d’un retour éventuel en Espagne. Le retour actuel au pays natal est dépeint comme impossible, de même que le départ vers les terres d’Amérique.

Elle a pour résultat de faire rester sur notre sol une masse d’individus ayant fait leurs preuves pendant la guerre civile espagnole et qui, prête à repasser la frontière en cas d’effondrement du régime franquiste, constitue un danger permanent pour l’ordre public de notre pays.

C’est dans ces milieux libertaires espagnols que peuvent être recrutés par le Parti Communiste français ou par les services de renseignement de puissances étrangères, les agents qui ont pour mission de commettre sur notre territoire des actes de sabotages ou des attentats.

La diffusion de circulaires et la propagande par lettres sont des causes d’agitation dans les milieux espagnols réfugiés en France.

Dans certaines villes, les représentants du Mouvement se sont constitués en comité, véritables cellules anarchistes, dont le rôle est de contrôler les adhérents de la région, de diffuser les circulaires et même comme au Maroc de faciliter l’évasion des internés des camps de séjour surveillé ou des compagnies de travailleurs étrangers dans lesquelles le Mouvement a également des représentants.

Le Comité National du Mouvement Libertaire en France, entretient également des liaisons avec les adhérents restés en Espagne et avec ceux réfugiés en Amérique ou en Angleterre. Ces liaisons sont effectuées par des agents.

En ce qui concerne les adhérents se trouvant en France, en Afrique du Nord ou au Maroc, la correspondance s’effectue par l’intermédiaire des nommés :

BARUTA-VILA Mattéo, poste restante, à Marseille, ou de SANCHEZ Francisco, Consulat du Mexique à Marseille ou Felix RAMBAUD, boite postale n°31 dans cette ville. Ces derniers groupent les lettres destinées à
« GERMINAL »  et les expédient au nommé GERMAIN André, boite postale n°49 à Périgueux, qui les fait parvenir au Secrétaire Général du Mouvement Libertaire. Quant à GONZALEZ-MARIN Manuel, il se fait adresser sa correspondance au nom de CAYETANA Alcaïne, 5 rue Bombet à Montauban.

Il y a lieu de noter qu’il est recommandé aux adhérents du Mouvement Libertaire d’employer un langage conventionnel pour leur correspondance.

Les nommés DE SOUZA Germinal, ISGLEAS-PIERNAU Francisco, MAS CASAS Valério et HERRA-CAMARERO Pedro sont actuellement internés au Camp du Vernet (Ariège).

ESGLEAS-JAIME José, dit « GER » dit « GERMI » dit « GERMINAL » ; GONZALEZ-MARIN Manuel ; VAL-BESCOS Eduardo ; BARUTA-VILA Mattéo né le 18 juillet 1901 à Molina de Llobregat, dt Hôtel Sainte Claire, 12 Rue Ste Claire, à Marseille et SANCHEZ-MARTINEZ Francisco, né le 29 Avril 1909 à Villelongue de Santiago, dt 11, rue du Coq à Marseille, ont été arrêté et mis à disposition du Tribunal Militaire permanent de la 17è Division Militaire à Toulouse, sous l’inculpation de menées anarchistes portant atteinte à la sûreté extérieure de l’État, crime prévu par l’article 80 du Code Pénal §2.

PONZAN-VIDAL Francisco a été laissé en liberté provisoire et SANJURJO [sic]-LOPEZ Julio, dt 13 rue de la Redoube à l’Estaque Plage (Bouches du Rhône) en relation avec les militants du Maroc est en fuite.

Au cours des perquisitions de nombreuses adresses furent découvertes notamment celles figurant dans la liste ci-jointe.

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Camp du Vernet d’Ariège
Le Vernet, le 12 Janvier 1942.-
DH N° 80/D

SECRET

LE CHEF DE CAMP
A Monsieur le PREFET DE L’AIEGE
A FOIX

– :- :- :- :- :- :- :- :- :- :- :-

Me référant à votre note en date du 8 courant, transmissive d’une lettre du 2 Janvier de M. Le Conseiller d’Etat, Secrétaire Général pour la Police, à laquelle était joint un rapport d’information sur l’activité de certains anarchistes du camp,

J’ai l’honneur de vous rendre compte de ce qui suit :

Le Camp du Vernet est composé d’internés dont le passé, pour la plupart, plus ou moins chargé à motivé l’internement. Malheureusement, ainsi que j’ai déjà eu l’honneur de le signaler à plusieurs reprises, il est fréquent que ce passé ne soit pas porté à ma connaissance. Ce manque de renseignements précis est très regrettable car il ne permet pas de me faire une opinion immédiate sur les internés.-

Il en résulte que les commandants de quartier ne peuvent se baser pour assurer une bonne marche de leurs quartiers que sur la seule conduite au camp des internés qui leur sont confiés.-

Or, dans ce Camp, on compte une assez forte proportion de communistes d’une part et d’anarchistes italiens ou espagnols d’autre part.-

Ainsi que l’ont fait ressortir de nombreux rapports à ce sujet certains commandants de quartier ayant constaté l’animosité existant entre ces deux catégories d’internés s’en sont servis pour détruire l’action de celle de ces deux catégorie qui essayait de dominer.-

Pendant un certain temps, les communistes par une action lente et continue avaient réussi à obtenir les emplois assez nombreux qui qui ne peuvent être occupés que par des internés et dont ils se servaient comme des leviers de commande pour faciliter leur propagande.-

Afin de paralyser ce mouvement, le plus dangereux pour notre pays, puisque le communisme est international, les commandants de quartiers ont d’abord utilisé les éléments les plus intéressants. Ils ont dû toutefois placer à certains postes des internés ayant une personnalité suffisante pour s’imposer et capables de contrecarrer l’action des communistes. Certains de ces internés ont dû être pris parmi les anarchistes pour lesquels cependant aucun motif d’internement n’avait été communiqué et dont la conduite au camp ainsi que l’attitude à l’égard des autorités avaient toujours été parfaites.-

Ces internés ont certes conservés leur opinion politique mais rien jusqu’à présent n’a pu permettre de les suspecter de poursuivre avec l’extérieur leurs menées anarchistes.-

Lors de son enquête au camp, M. le Commissaire TAUPIN n’a d’ailleurs pu rien établir de positif à leur encontre. Dans la note jointe à la lettre du 2 janvier précitée, ce commissaire part du domaine du probable pour aboutir à une supposition du domaine de la certitude. Il écrit en effet, « que ces internés ont dû être au courant de la vie du mouvement libertaire et des faits qui se sont produits à une époque postérieure à leur internement, preuve qu’ils ont eu des contacts avec l’extérieur ». Il croit trouver cette preuve dans la découverte d’un document chez GONZALEZ-MARIN, suivant lequel un certain VAL devait se rendre au camp du Vernet pour y voir le reste des membres du conseil. Ce document prouve bien que VAL avait l’intention de rendre visite à tous les membres du conseil qu’il savait pour certains être au camp du Vernet mais il ne prouve nullement que ce soit les internés du camp du Vernet qui aient écrit à ce sujet. En tout cas VAL n’est jamais venu au camp.-

Le seul point bien établi à retenir et qui e parait intéressant c’est la découverte au cours d’opérations effectuées à Marseille d’une correspondance émanant d’internés, correspondance ne portant pas le cachet du service de la censure du camp et postée à Pamiers. Quelle était la valeur de cette correspondance ? – Portait-elle sur des questions politiques ou ne donnait-elle que des renseignements d’ordre privé ? –

Il y aurait eu intérêt, semble-t-il à donner des précisions sur ce point et surtout à me signaler ces infractions graves au règlement du camp, ce qui m’aurait permis d’établir une surveillance plus serrée dans un sens bien déterminé et le cas échéant, d’obtenir des éclaircissements voire même de prendre des sanctions, indépendamment de l’avantage pour la Direction d’être tenu au courant de tout fait relevé à l’extérieur du camp sur l’activité des internés.-

En outre, cette correspondance émanait-elle des internés mentionnés à savoir :

DE SOUZA Furtado Germinal

ISGELAS – PIERANU Francisco

HERRERA – CAMARERO Pedro

MAS – CASES Valerio

Pour ce qui est de ces internés, il y a lieu de remarquer que !

1° DE SOUZA est effectivement employé à l’Hôpital comme secrétaire-adjoint du Médecin-Chef. A ce titre, il est chargé de surveiller le travail des internés qui y sont employés. C’est sans doute ce qui fait dire qu’il est chef du personnel. Il contrôle la distribution de la nourriture, établit la liste des internés loqueteux, veille à la propreté des salles et de l’Hôpital.-

Il a toujours accompli son service consciencieusement, avec dévouement et intelligence à l’entière satisfaction du Médecin-Chef qui a pu constater que l’action de DE SOUZA a été heureuse à tous les points de vue.-

Etant également agent de liaison du Médecin-Chef avec les différents services, il a été muni d’une carte de circulation dans le Camp.-

2° ISGLEAS – PIERNAU est chef de baraque au quartier B et a pour mission au bureau central du travail de signaler les internés communistes qui auraient pu être proposés pour une corvée, afin d’éviter leur emploi dans des corvées extérieures.

Il est chargé de se rendre de temps à autre, sur l’ordre du Major des Internés, dans les corvées extérieures pour vérifier si aucune action politique ne s’y est créée.-

Le Major des Internés a toujours été satisfait de ses services et n’a jamais pu relever contre lui aucun acte répréhensible.-

3° HERRERA-CAMARERP est chef de l’équipe de travailleurs mise à la disposition du Lieutenant-Colonel Commandant l’Ecole préparatoire de Gendarmerie de Pamiers. Il est sous la surveillance de la gendarmerie et ne peut quitter seul la caserne.-

4° MAS – CASAS est chef de la corvée agricole mis à la disposition, sur ordre de M. le Préfet de l’Ariège, de M. RETHALER, à la ferme Lafargette commune de BONNAC.-

En aucun cas, le Chef du Camp pas plus que le Commissaire Spécial n’ont eu recours directement à ces internés pour en obtenir des renseignements. Il s’agit là seulement d’une question de cuisine intérieure de quartiers, contrôlée et autorisée certes par la Direction, mais uniquement destinée à faciliter la tâche des commandants de quartiers et du Major des Internés.-

Dans un Camp comme celui du Vernet où il existe des travaux de toutes sortes, tant intérieurs qu’extérieurs, exécutés par des internés, il est absolument indispensable que chaque chef de service puisse se sentir au courant de toutes les manifestations possibles d’opinons parmi les internés dont il a la charge de façon à pouvoir prendre, le cas échéant, toutes les précautions indispensables. Ceci ne va pas sans difficultés. Il y a toujours un risque à courir. C’est à amoindrir ce risque que tend notre action de tous les instants.-

Quoiqu’il en soit, et bien que depuis leur internement aucune preuve d’activité politique avec l’extérieur ou même avec leurs camarades internés n’ait été portée à ma connaissance contre les internés DE SOUZA, ISLGEAS, HERRERA et MAS CASES dont la conduite ici n’a jamais laissé à désirer et dont les services rendus au camp sont certains, j’ai décidé, pour répondre au désir exprimé par l’Inspection générale des Services de Police Judiciaire, de leur faire réintégrer leur quartier et de retirer à ceux qui en étaient détenteurs la carte de circulation qui leur avait été délivrée.-

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