Solidaridad Obrera, 13 janvier 1937, numéro 1483
L’incorporation dans la législation sanitaire de la reconnaissance de l’avortement comme nécessité sociale représente pour les femmes et la société la conquête révolutionnaire de la plus grande importance, et dont seuls les moments actuels [révolutionnaire], ou bien encore un régime de liberté, ont permis la mise en œuvre.
La légalisation de l’avortement, comme mesure d’hygiène sociale et comme réparation d’ordre éthique, s’est toujours écrasée, même dans les pays de législation démocratique, contre le mur des préjugés et de l’hypocrisie des classes bourgeoises. Mais c’est une réalité que l’avortement est pratiqué clandestinement dans toutes les grandes villes du monde, donnant lieu à des espèces de « faiseuses d’anges » qui, sans aucune garantie hygiénique, mais avec des aspects répulsifs mélants entremeteuses et commerce du désespoir ou de la misère. autres. Mais cette exploitation [de la détresse] n’est pas le plus grave, comparée aux conséquences irréparables à court ou à long terme, qu’entraînent de telles pratiques clandestines.
Le premier droit de l’enfant, a-t-on dit, est d’être reçu avec joie. Combien de fois la grossesse engendre-t-elle un ressentiment secret et indicible envers un fruit qu’on ne peut pas occulter et qui, naturellement, avec la force des faits biologiques, annonce des chutes inexorablement tâchées par une morale rigide et lâche, en contradiction avec la vie des gens ! La femme enceinte hors mariage craignait la naissance de son enfant, car elle était la proclamation publique face à la société injuste d’une honte dont seule la mère était victime. Et, effrayé, fébrile, méfiante, elle avait recours à l’avortement clandestin.
Et qu’en est-il des familles nombreuses, accablées par le fardeau d’une progéniture toujours croissante ? La femme, appauvrie par la natalité constante ; l’économie de la maison s’effondre, la misère partagée entre tous, avec pour conséquence le rachitisme des enfants, la tuberculose et cent autres maladies terribles, causées par une mauvaise alimentation et la tristesse qui préside à la vie. Cet aspect de la régulation des naissances est peut-être le plus intéressant de ceux que résout le décret.
L’objectif principal poursuivi par le décret est de permettre au peuple travailleur, de manière sûre et sans risque, de réguler la natalité, lorsqu’il existe des causes puissantes, sentimentales, eugéniques ou thérapeutiques qui nécessitent l’interruption artificielle de la grossesse. Il nous semble une réussite du législateur, d’adapter le droit à la réalité humaine, d’établir la femme comme seule propriétaire du destin du fruit de ses entrailles, en lui reconnaissant le droit de demander un avortement, sans que ni sa famille ni ses proches ne puissent protester.
Il est aussi, heureusement, prévu l’aspect restrictif, qui encadre la question dans ses limites les plus prudentes, garantissant la santé des femmes, qui est la santé de la société.
Ce décret généreux est une réparation que la Révolution en cours offre aux femmes en route vers leur émancipation définitive , il a une portée éthique, sociale et eugénique de premier ordre.
Avec cela, nous pouvons mettre fin à ce charlatanisme opportuniste, honteux et sans scrupules des « faiseuses d’ange » qui, avec une incompétence fatale et à travers des procédures rudimentaires et absurdes, abritées dans l’ombre de la clandestinité, spéculaient sur la fonction la plus importante de toutes celles qui se réalisent dans la vie.
Ce qui compte maintenant, c’est que la femme se rende compte de cette conquête. Rien ne s’obtient en publiant des lois et des décrets dans les journaux officiels si le peuple ne les fait pas siens. Il est nécessaire que la femme, devenue l’unique propriétaire de sa grossesse, comprenne le but élevé et noble de ce décret et s’y réfugie, confiante et calme, quand c’est juste, comme un refuge qui la protège face à la société et qui veille sur sa vie.