Par l’intermédiaire de notre syndicat frère français CNT-AIT, nous avons été informés d’une lutte de travailleurs et travailleurses dans une entreprise collective „anarchiste“ dans la ville de Montreuil. Les travailleurs se trouvent dans une situation très similaire à celle de nombreuses „entreprises alternatives“, où le travail salarié existe et où les contradictions du capitalisme apparaissent au grand jour.
L’absence d’analyse de classe conduit toujours aux mêmes structures, d’abord d’auto-exploitation puis des structures d’exploitation par des tiers. Dans tous les cas, l’argument selon lequel „ce projet est si important“ est placé au-dessus de la prévention de l’exploitation économique, même si c’est contre laquelle on s’est en fait battu un jour. Que ce soit dans la boulangerie „La conquête du pain“ en France, ou au Gagarin à Vienne. Même à Montreuil, des patron/patrones de l’entreprise collective prétendument anarchiste veulent minimiser l’exploitation réelle et dénoncer et publiquement diffammer les grévistes actuels. C’est pourquoi les (anciens ouvriers et anciennes ouvrières de la boulangerie LeFirin, de Gagarin et de Tüwi, organisées au sein du WAS, ont rédigé la lettre de solidarité suivante et l’ont envoyée à leurs camarades en France :
„En tant que travailleuses et travailleurs de Le Firin (boulangerie commerciale), du Café Gagarin et de Tüwi (cafés collectifs / coopératifs) organisés au sein de la WAS-AIT, nous comprenons profondément et compatissons avec la lutte de nos camarades de Montreuil que nous avons appris à connaître par nos camarades de la CNT-AIT.
Nous en avons assez des collectifs „gauchistes“, qui utilisent le drapeau anarchiste/autonome uniquement pour couvrir les façons dont les entreprises soi-disant anticapitalistes reproduisent les structures d’exploitation et de hiérarchie. Nous en avons également assez que nos entreprises (prétendument) gérées collectivement se présentent comme travaillant sans hiérarchie, alors qu’elles passent complètement à côté de l’analyse de classe.
Nous en avons assez de l’utilisation (erronée) des idéologies militantes pour créer un environnement où l’auto-exploitation est la norme et où une obéissance aveugle au groupe hégémonique ne laisse aucun espace pour la critique et pour des conditions de travail horribles.
Si les collectifs qui gèrent de telles coopératives finissent entre les mains de „managers“, aucune idéologie de gauche ne résiste : ils ont échoué dans leur mission. Si ces lieux sont incapables de faire passer les besoins et les droits des travailleuses et travailleurs avant le “business-as-usual” ou la crédibilité au sein de la scène, ils ont échoué. Si les patronnes et patrons militants ne parviennent pas à répondre aux besoins des travailleurs qui font partie intégrante de leur travail, ils et elles ne suivent pas les pratiques anticapitalistes et, dans la plupart des cas, ils et elles ne mettent pas en œuvre les lois fondamentales que les travailleuses et travailleurs ont établies au cours de décennies de lutte. Si, en plus de cela, ils et elles commencent à s’engager dans des activités de démantèlement syndical, comme faire honte publiquement aux travailleuses et travailleurs, en prétendant qu’ils ou elles ne représentent pas la plupart des travailleuses et travailleurs ou que les travailleuses et travailleurs en grève sont des nouveaux venus et qu’ils ne savent pas comment les choses sont gérées dans l’entreprise, ils ou elles ont échoué à maintenir leurs valeurs fondamentales d’organisation « du bas vers le haut ».
Nous ne voulons plus d’exploitation „au nom de la cause“. Notre cause est de soutenir les travailleuses et travailleurs partout dans le monde et notre cause est de meilleures conditions de travail pour toutes et tous, pas de nourrir les bouches des enfants privilégiés, bobos et „militants“ avec notre travail. Notre cause est de lutter contre l’exploitation structurelle en tout lieu, même au sein d’entreprises prétendument „gauchistes“. Nous voulons des heures supplémentaires payées, des congés maladie payés, des congés payés et prendre des décisions au sein de nos collectifs. Pas être marginalisés encore plus parce que nous dépendons du travail ou parce que nous sommes des migrantes et des migrants !
De Vienne, nous saluons votre lutte, et nous soutenons votre grève.
Lavorare meno, lavorare tutt* !“