Le chaos dans la gestion sanitaire de la crise n’est pas le résultat de l’Anarchie,mais celui de l’action combinée de l’Etat et du Capitalisme.
«L’Anarchie est la plus haute expression de l’Ordre. » (E RECLUS)
Finissons-en avec l’Etat et le Capitalisme !
La situation dans les hôpitaux est critique : nombre de lits insuffisants, pénurie de matériel pourtant basique tels que les masques, et surtout désorganisation totale. On envoie au front les agents de l’hôpital sans matériel et aussi sans aucune formation sérieuse pour traiter une maladie épidémique.
Résultat la diffusion nosocomiale s’intensifie et les personnels de santé sont touchés à leur tour.
Cette situation cauchemardesque ce n’est pas de l’anarchie. L’Anarchie c’est – pour reprendre les termes du grand savant Elysée RECLUS – la plus haute expression de l’Ordre : un système où chacun sait ce qu’il a à faire et où il le fait en pleine conscience et en pleine connaissance de sa responsabilité et de ses capacités. Un système où l’intérêt général n’est pas sacrifié aux intérêts particuliers égoïstes de quelques profiteurs. Un système où l’autorité n’est pas fondée sur la hiérarchie stupide, mais sur les compétences et uniquement dans le domaine concerné. C’est tout l’inverse de la situation actuelle, qui est le résultat de l’incompétence Etatique couplé à la cupidité Capitaliste.
Si nous voulons nous en sortir, nous n’avons pas d’autre choix que de nous débarrasser du chaos étatique et capitaliste pour qu’enfin vienne l’Anarchie !
Des travailleurs de la santé CNT-AIT
Il nous semble intéressant, à titre d’exemple, de diffuser le message ci-dessous de nos compagnons de la CNT-AIT de Madrid, qui décrivent une situation similaire à celle que nous vivons en France et qui proposent des pistes d’organisation pour faire face.
CONTRE L’ABSENCE DE SENS, L’EXPERIENCE.
PROTOCOLE HOSPITALIER DE LA SECTION SANTE DU SYNDICAT ANARCHISTE CNT-AIT DE MADRID
Parmi tant de supports d’information et de désinformation, nous souhaitons proposer des faits sur les personnes qui vivent cette pandémie au plus près: gardiens, assistants, infirmières, médecins et nettoyeurs d’hôpitaux. Chacun avec une expérience, chacun avec son impuissance et son désespoir.
De Madrid, où en théorie sont les plus grands hôpitaux du pays, avec le plus de ressources et le plus spécialisés; jusqu’aux plus petits hôpitaux ou ceux des autres provinces d’Espagne comme Salamanque ou Valladolid et les villes de Cáceres et Lugo : tout le système de santé de la géographie espagnole est affectés par la mauvaise gestion des politiciens, des conseillers et des directeurs d’hôpitaux. Une mauvaise prévoyance, même si l’exemple de l’Italie est si proche, et une prise de décision inadéquate continue de mettre constamment tous les personnels de santé, et donc tous les citoyens, en danger. Ces professionnels nous disent depuis les hôpitaux « Gregorio Marañón », « La Paz » et du « 12 octobre » que les urgences sont un vrai désastre en termes de manque de protocoles organisationnels, de risques professionnels et de formation du personnel.
Cela se traduit par: – travailler sans matériel (ou alors le ou partager), comme des lunettes et des blouses – diluer du gel alcoolique avec de l’eau « pour le faire durer plus longtemps »; Le matériel apparaît lorsque le personnel fait pression sur les autorités responsables de l’hôpital; répartition inégale du matériel de protection par la hiérarchie, de sorte que les agents d’entretien, même s’ils sont les plus exposés, sont ceux qui reçoivent le moins de protection. Les protocoles d’action sont en constante évolution, celui qui aurait dû être suivi hier, n’est plus valable aujourd’hui et ironiquement il s’adapte à la quantité de matériel qui existe et non aux informations sur le comportement du virus lui-même.
La mobilisation du personnel de nombreux autres services d’urgence et le manque de formation du personnel dans le domaine des maladies infectieuses provoquent un dysfonctionnement, en plus de son débordement. Les résidents en unités familiales, en anesthésie ou en cardiologie, pour la plupart peu familiarisés avec les urgences de ce type et moins formés aux protocoles d’action contre ces maladies, sont en première ligne au contact des personnes infectées que, de par leur nombre, ils n’ont ni les moyens ni le temps ni les moyens ni l’espace pour s’en occuper. En outre, de nombreux professionnels qui savent qu’ils sont infectés par les conditions dans lesquelles ils exercent leur travail sont contraints, selon leur éthique personnelle ou professionnelle, de continuer à travailler dans ces mêmes conditions.
Dans d’autres régions d’Espagne, bien que confrontés aux mêmes problèmes techniques et organisationnels, les petits hôpitaux souffrent du retrait d’une partie de leur matériel, tels que les respirateurs, qui sont envoyés à Madrid, laissant à ces centres un nombre dérisoire d’appareils par rapport à ce qui est reconnu nécessaire. Les urgences de ces autres hôpitaux en dehors de Madrid, bien qu’ils aient été mobilisés plus tard, sont déjà submergées depuis quelques jours et, selon les informateurs de l’hôpital « La Moncloa », cela continue d’augmenter. L’improvisation des salles d’isolement, des unités de soins intensifs et des couloirs tels que les salles d’examen deviennent une routine pour le personnel qui, comme nous l’avons déjà dit, est peu ou pas familier avec ce type de maladie.
Une autre vision totalement opposée qui montre un bon exemple et un halo d’espoir est le travail dans les services (pas les urgences) de l’hôpital « Carlos III ». Ces professionnels de la santé, des médecins aux agents d’entretien, sont formés aux matières infectieuses (on se souvient que c’est l’hôpital qui a soigné les patients Ebola) qui leur permet, même avec une quantité réduite de matériel, d’en utiliser toutes les potentialités sans s’exposer à s’infecter, travailler dans un environnement de plus grande tranquillité et sécurité et offrir aux patients et à leurs familles (quelque chose qui semble avoir été oublié avec tant de confinement et d’isolement) de meilleurs soins de santé de meilleure qualité. Dans cet endroit, nous travaillons avec des protocoles très établis et intériorisés par le personnel que, espérons-le, les gestionnaires et les directeurs des autres hôpitaux seront disposés à dupliquer.
Les affiliés de la CNT-AIT de Madrid qui travaillent dans cet hôpital nous ont envoyé la manière dont Carlos III aborde la pandémie actuelle en suivant ses protocoles, qui se sont révélés efficaces pour contenir et traiter les épidémies. Nous pensons que leur mise en oeuvre généralisée dans tous les centres publics et privés où les patients atteints de coronavirus doivent être traités est d’une extrême nécessité, tout comme l’investissement inévitable en ressources de la part des chefs d’entreprises / directeurs d’hôpitaux, des actionnaires et de l’État. Nous reproduisons leur lettre: (…)
Grâce à l’expérience d’Ebola, nous disposons actuellement de 3 étages dédiés aux coronavirus. Pour toutes les chambres nous avons ajouté une fenêtre fermable dans chaque porte [tel un passe-plat], afin que nous puissions communiquer avec l’extérieur et aussi veiller sur les malades et nos compagnons lorsqu’ils sont dans la chambre.
Nous avons un registre où nous enregistrons toutes nos entrées: qui entre, nom, carte d’identité, téléphone, heure d’entrée, sortie et qui jour le rôle de « miroir ». Nous avons toujours une personne à l’extérieur de la chambre, que nous appelons le « miroir », qui sera en charge de donner toute la couverture nécessaire aux collègues qui sont à l’intérieur, aidera dans tout ce dont ils ont besoin et, finalement, les aidera à sortir de la chambre sans commettre d’erreur, au cas où la personne à l’intérieur deviendrait nerveuse. À l’intérieur de la pièce, nous avons 3 poubelles noires:
– L’une avec un sac bleu, où les vêtements usagés des patients sont déposés. Ce sac est sorti lorsqu’il est plein, selon une procédure qui consiste à d’abord le sortir de la poubelle / seau. Il est alors aspergé de Virkon(1) et remis au partenaire qui se trouve à l’extérieur de la pièce; la personne qui est à l’extérieur le reçoit sans le toucher dans un autre sac bleu, le referme puis le pulvérise avec du Virkon ; de là, il le met dans le chariot grillagé / cage (2) qui sera normalement amené au service de linge pour être lavé. Le service de lingerie auquel ces vétêments sont envoyés étant privatisé, nous ne savons pas comment les vêtements y sont traités.
– Les deux autres poubelles à l’intérieur de la chambre sont destinées aux déchets des malades ou à tout le matériel jetable des travailleurs qui entrent dans la salle pour soigner les patients (restes de nourriture, éponges, sérums, restes de médicaments, couches , papiers absorbants, bouteilles d’eau, gobelets en plastique, gaze, etc.) et pour les articles jetables liés à notre sécurité, tels que nos combinaisons / surblouses, masques, gants …
– À l’intérieur de la pièce, il y a une petite table près de la porte, sur laquelle nous avons du Virkon, de l’alcool, du Purell (désinfectant pour la peau), une boîte de gants de taille L – au cas où il serait nécessaire de mettre des gants à un moment donné – , des bacs (récipients) en carton jetables, des éponges, des sacs bleus pour les vêtements sales, des grands sacs verts et des petits sacs verts (nécessaires pour éliminer les couches, les savons ou tout le matériel résiduel pour l’hygiène du patient). Nous aurons également un conteneur jaune pour éliminer tout matériel tranchant qui, une fois plein, sera jeté dans un conteneur adapté.
– Ces conteneurs, quand ils sont pleins, sont fermés, aspergés de Virkon, et transmis à notre agent « miroir », qui les ramasse et les asperge de nouveau avec du Virkon. Ainsi, ils iront au service de nettoyage qui les récupérera et les emmènera à l’endroit indiqué pour leur destruction selon les moyens appropriés.
– En dehors de la chambre, nous avons une autre table avec : du Virkon, de l’alcool, du Purell, des serviettes jetables, des gants, des masques chirurgicaux, des blouses vertes, des sacs bleus pour les vêtements, des sacs verts petits et grands, du papier absorbant et des lingettes antiseptiques et désinfectantes et une autre poubelle pour ce que nous aurions besoin de jeter.
– Nous faisons une réunion pour répartir tous les patients sur plusieurs tandems formés par un TCAE (Technicien en Soins Auxiliaires Infirmiers) et une infirmière, selon le personnel dont nous disposons. Avant d’entrer dans chaque chambre, chaque groupe évaluera qui entre, où chacun se positionne et ce qu’il va faire. Afin d’économiser du matériel sans prendre de risques et de pouvoir prendre en charge les patients de manière adéquate, en particulier ceux qui sont dépendant pour la couverture de leurs besoins fondamentaux (alimentation, hygiène personnelle, prise de médicaments, sécurisation, etc.), nous parcourons toutes les chambres qui nous concernent avec la même blouse chirurgicale, un masque FPP2 et des lunettes étanches, et nous changerons nos gants (que nous porterons en deux paires l’une au-dessus de l’autre pour les changer sans risque de contact), une surblouse verte jetable et un masque chirurgical qui nous aurons mis, avant d’entrer, au-dessus du FPP2.
Dans chaque chambre, avant de partir pour la suivante, nous jetterons la surblouse verte, les gants et le masque chirurgical, en gardant la blouse chirurgicale, le masque FFP2 et les lunettes étanches. Bien sûr, tout tandem d’infirmières TCAE aura besoin du soutien d’un autre groupe de l’extérieur, il y aura donc toujours quelqu’un qui nous attendra. Notre agent « miroir » nous attend avec des alèses jetables imbibées de Virkon sur le sol devant la porte de la chambre, pour que nous y trempions nos sabots.
Nous passons alors à la chambre suivante et nous enfilons de nouveau une surblouse verte, des gants et un autre masque chirurgical devant le FFP2. Lorsque nous avons fini toutes nos chambres, nous disposons de nos lunettes étanches dans un seau jaune pour qu’elles soient vaporisées d’alcool, puis lavés à l’eau et au savon et séchées, afin de les réutiliser. Nous mettons notre masque FFP2 dans un sac en plastique avec notre nom, et nous l’utiliserons pendant tout le quart de travail. Le personnel « miroir » à l’extérieur des chambres enfilera une surblouse verte, un masque chirurgical et des lunettes non étanches.
À l’intérieur de la salle, nous avons un thermomètre pour chaque patient et un brassard pour deux patients. Chaque fois que nous devons prendre des tensions ou une saturation, nous introduisons les appareils nécessaires; et à la sortie, c’est notre « miroir » qui les récupère à la porte quand nous avons fini. Il nettoie les roulettes au Virkon et nettoie le reste avec des lingettes désinfectantes. Il écrit sur une feuille depuis l’extérieur de la chambre toutes les constantes biologiques que nous lui indiquons, car nous ne pouvons pas mettre du papier et des stylo dans chaque pièce pour écrire. La nourriture est servie dans des contenants jetables, qui seront jetés dans les poubelles noires. Ce qui doit être sorti de la chambre l’est toujours après avoir été vaporisé au Virkon.
Pour toute action ne nécessitant pas de contact avec le patient, telle que l’introduction de nourriture, l’enlèvement d’un défunt dans son sac scellé (que nous aurons préalablement vaporisé de Virkon) ou tout autre acte sans contact et à distance, on utilise une surblouse verte, un masque FPP2 et des lunettes non étanches, car il n’y a aucun risque de contact avec des sécrétions ou des gouttelettes porteuses du virus.
Le personnel de nettoyage appartient à une entreprise privée, car il est externalisé, et ils utilisent la même procédure que nous, bien qu’ils utilisent le matériel infirmier parce que leur entreprise ne leur fournit pas le nécessaire (…) Pour tout cela, nous exigeons une plus grande organisation des urgences et des services de tous les hôpitaux espagnols, une formation explicite des travailleurs pour faire face à cette situation, ainsi que du matériel suffisant pour protéger les professionnels (employés publics ou privés) et les patients, matériel qui ne soit pas pris d’autres hôpitaux ou centres de santé. En outre, nous reconnaissons l’énorme effort physique et moral de tous ces agents de santé qui travaillent sans compter et dans les pires conditions, ainsi que des malades et des proches qui, contraints de se rendre à l’hôpital, sont témoins du manque de moyens et d’organisation.
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1. Le Virkon est un produit désinfectant à usage sanitaire efficace contre les virus.
2. Les cages sont des chariots en forme de cage qui sont utilisés pour l’accumulation et le transfert de vêtements et autres effets personnels en grande quantité.