A propos des maquis anarchistes espagnols en Ariège : Une tentative de révision de l’histoire de la résistance en Ariège

samedi 27 octobre 2007

Pour information,

Veuillez trouver ci-dessus un droit de réponse adressé à la Dépêche du Midi suite à un article pour le moins incroyable expliquant, à l’occasion de l’anniversaire de la libération de Foix, que les maquisards anar étaient … des communistes qui se faisaient passer pour des anars !

La mode est décidément à la révision de l’histoire de la Résistance en ce moment …

A La Dépeche du Midi FOIX – 09 ARIEGE

Monsieur le Rédacteur en Chef,

Suite a la lecture de votre édition du 19 août 2007, nos deux organisations (voir signatures en bas de page) sont au regret de constater que les propos tenus par Mr DELPLA dans l’article concernant la Libération de la ville de Foix, le 19 août 1944, semblent plus orientés par les sympathies politiques de l’auteur que par un documentation historique un tant soi peu sérieuse. Nous vous demandons donc de publier notre réponse que vous voudrez bien trouver ci-dessous :

Dans un article concernant la Libération de Foix, sous la signature d’un Monsieur Delpla, La Dépêche (19 août 2007) a publié un article dans lequel un Monsieur Delpla tente rien moins qu’une indécente et grossière récupération politicienne : une opération qui consiste à déguiser les combattants anarchistes (les plus nombreux dans les maquis espagnols d’Ariège) en communistes. Rappelons tout d’abord que, si les maquis espagnols étaient en effet les mieux organisés du département, il ne faut pas pour autant oublier que les rangs de la résistance espagnole étaient composés d’individus venus de toutes les organisations issues de l’exil anti-franquiste (républicains, communistes, socialistes et anarchistes), un exil dans lequel les communistes étaient très minoritaires.

C’est dans ce contexte qu’il faut lire les allégations de Monsieur Delpla : « Le Capitaine Abel Rous alias « Richard », nommé par Toulouse chef départemental du Service d’Atterrissage et Parachutage (SAP), a pour mission de créer des terrains de parachutages bien protégés par des maquis solides et stables. Il constate que les seuls maquis solides et opérationnels capables de recevoir des parachutages et de garder des armes, sont ceux des Guérilleros espagnols. Toutefois, ces combattants étant communistes, les services de parachutages d’Alger n’enverront pas d’armes aux communistes. « Richard » qui a reçu la mission de préparer la libération de l’Ariège doit obtenir des armes pour chasser l’armée allemande. Il décide de truquer la réalité et fait enregistrer les guérilleros comme maquis libertaires de la « FAI » Fédération Anarchiste Ibérique ….. ».

Pour avancer sa théorie abracadabrantesque, Monsieur Delpla est obligé de supposer une fiction (le refus « par Alger » de parachuter des armes aux communistes) bien éloignée de la vérité historique : d’une part à « Alger » le pouvoir était truffé de communistes, d’autre part et surtout ce n’est pas « Alger » qui décidait des parachutages mais l’État-major Allié. Une preuve, entre mille autres, la déclaration d’Astier de la Vigerie, le 08 janvier 1944 a la tribune de l’Assemblée d’Alger « L’armement des maquis dépend uniquement des Alliés« . On ne saurait être plus clair. Mais entrons dans le vif du sujet : la libération de Foix est survenue le 19 août 1944. Or, en 1944, on n’était pas, loin s’en faut, dans la guerre froide que présuppose la théorie de Monsieur Delpla ! Bien au contraire : à partir de 1941 et jusqu’en 1945, en application de la loi US dite de prêtbail, les USA ont livré directement aux communistes – en l’occurrence à l’URSS stalinienne – des quantités industrielles d’armes : 15 000 avions de guerre, 10 000 chars d’assaut, 400 000 véhicules, 8 000 pièces d’artillerie, 1 300 000 mitrailleuses. A cette aide militaire considérable s’ajoutent, dés 1943, les effets politiques de l’alliance entre Churchill, Roosevelt et Staline (Conférence de Téhéran). A partir de 1943, les partis communistes européens, qui sont inféodés à Staline et à son système totalitaire, comme l’étaient le parti communiste espagnol et le parti communiste français, sont devenus des alliés potentiels des forces anglo-américaines. Il est donc parfaitement grotesque de laisser croire qu’un communiste aurait eu le moindre intérêt à se travestir en anarchiste pour bénéficier de la sympathie de l’État major allié.

D’autant que, poids lourds parmi ces alliés, le gouvernement des USA a toujours poursuivi les anarchistes d’une haine mortelle. Faut-il rappeler que, uniquement à cause de leurs idéaux anarchistes Sacco et Vanzetti ont été exécutés sur la chaise électrique ? Faut-il rappeler que quelques années avant les martyrs de Chicago, militants anarchistes eux aussi, ont été pendus dans l’injustice la plus totale ? (base de l’histoire du 1er Mai) A qui fera-t-on croire que le gouvernement US était prêt a armer ceux qu’il électrocutait et pendait plutôt que ses propres alliés ?

Passons maintenant à l’autre présupposé de Monsieur Delpla et à cet « Alger » qui, d’après lui, discriminait tellement les communistes qu’il les obligeait à se faire passer pour des anarchistes. Monsieur Delpla semble ignorer qu’à Alger, siège provisoire de la France libre, depuis avril 1944, il y avait des représentants officiels du parti communistes au sommet des plus hautes instances ! Que ce soit au sein du Gouvernement Provisoire de la République Française, du Conseil National de la Résistance, de l’Assemblée Provisoire, les communistes y étaient, et en nombre ! Où est donc la discrimination ? Par quelle étrange aberration les communistes de France métropolitaine n’auraient reçu aucun appui du gouvernement d’Alger où ils siégeaient ; alors que la FAI, qui, elle, n’y avait aucune représentation, aucun appui, mais qui y comptait de nombreux ennemis (à commencer par les staliniens), en aurait reçu ?

Pendant des décades les épigones communistes se sont ingéniés à passer sous silence le pacte Hitler-Staline (et son application par tous les partis communistes européens). Voici qu’une fois de plus, ils tentent de récupérer toute la résistance, en particulier la résistance anarchiste. Comme nous l’avons démontré ci-dessus, en 1944, les communistes espagnols de Foix bénéficiaient d’un soutien des Alliés et d’Alger à tous les niveaux. Ils n’avaient nul besoin de se faire passer pour des anarchistes. A l’inverse, dès avant cette époque, en application des consignes de Staline, les communistes ont eu pour politique de liquider physiquement ceux qui ont été leurs opposants, tels que les anarchistes.

Si Monsieur Delpla veut à toutes forces repeindre en rouge les maquis anarchistes, il y a une raison : c’est, qu’effectivement les anarchistes dans les maquis d’Ariège étaient très nombreux, très actifs et bien organisés. Même si cela fait mal à certains, telle est la vérité historique. A ceux qui ne peuvent la digérer, à ceux qui ne peuvent rendre hommage aux anarchistes tombés sous les balles nazies pour la Libération de Foix et de l’Ariège, demandons au moins d’avoir la décence de ne pas salir leur mémoire en les affublant, 60 ans après leur action, d’une étiquette qu’ils ont toujours rejetée.

Dernier point, qui démontre la méconnaissance, par certains, du sujet : la majorité des maquisards n’était pas « de la FAI » (qui a toujours été une organisation numériquement légère) mais de la CNT, qui, en tant qu’organisation anarchosyndicaliste, était et est toujours l’expression de l’anarchisme militant.


-  Syndicat inter-professionnel des travailleurs(ses) avec ou sans emploi de l’Ariège (CNT 09).
http://cnt09.ouvaton.org

-  Syndicat Intercorporatif de Toulouse (CNT-AIT).
7 rue St Rémésy 31000 TOULOUSE
http://cntaittoulouse.lautre.net

contact@cntaittoulouse.lautre.net

05 61 52 86 48

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