29 avr 1999
C’est la huitième année consécutive que le 1er Mai se
passe en temps de guerre. Au cours de ce siècle, aucun autre pays
européen n’a subi une aussi longue guerre. Il est vrai, cependant, que
la Serbie n’était pas en guerre, en tout cas pas dans le sens qu’elle
aurait déclaré la guerre. Mais depuis huit ans la guerre est le
principal élément de notre vie et de notre sort. Depuis huit ans,
le 1er Mai des travailleurs est taché de sang, taché
à la fois par notre sang et par celui de ceux qui étaient
jusque récemment nos compatriotes.
Il y a maintenant huit ans que la Serbie vit sans sa classe ouvrière,
huit ans qu’ on entend des chansons et des slogans de marchands de guerre,
nationalistes et chauvins, huit ans qu’on nous divise entre « les serbes » et
« les autres », pendant qu' »au nom et dans l’intérêt de la classe
ouvrière », on ferme les usines, jetant les travailleurs à
la rue et sur les marchés aux puces, sans avenir ni espoir.
L’OTAN est arrivé à la fin du dernier acte de la
pièce. Les travailleurs dont les usines ont été finalement
détruites par l’OTAN ont rejoint les travailleurs chassés de leur
travail depuis des années grâce à la politique
aventuriste, irresponsable et anti-ouvrière du régime serbe.
Espérons que ce soit l’épisode final de notre tragédie
collective, de l’alliance contre nous des deux ennemis, des forces
intérieures et étrangères, et à l’occasion de
ce nouveau triste 1er Mai, espérons voir les travailleurs ouvrir les
yeux et dire pourquoi tout ceci est arrivé. Pendant toute cette
période, on nous a demandé de prouver notre patriotisme en
obéissant au pouvoir, de trahir nos intérêts de
travailleurs, de trahir le 1er Mai. Beaucoup d’entre nous on accepté
cela. C’est pourquoi la Serbie est en ruine. C’est pourquoi le 1er Mai est
taché de sang.
A partir de ce 1er Mai, les travailleurs doivent se servir de leur tête.
Il n’y a pas de place dans la tête d’un travailleur pour « les serbes »,
« les albanais », ou n’importe quelle autre appellation. La tête d’un
travailleur s’inquiète de savoir s’il y a du travail ou non, dans la
tête d’un travailleur, les serbes, les albanais, les habitants de
n’importe quelle autre nation combattent pour les droits et libertés
ouvriers, pour de meilleurs salaires, pour des régimes de retraite
meilleurs et plus sà»rs, pour une vie digne. Les travailleurs qui
ne sont pas divisés ethniquement, les travailleurs qui ne portent pas de
signes distinctifs peuvent apporter une contribution inestimable à
la construction d’une société démocratique, dans laquelle
l’individu passe devant la « nation ». C’est pourquoi nous réussirons
finalement à obtenir la paix et que nous garantirons que c’est le
dernier 1er Mai ensanglanté. Nous devons cela à tous nos
collègues travailleurs qui ont perdu la vie partout sur la
planète en combattant pour les intérêts du monde du travail
et dont nous semblons avoir oublié le sacrifice avec cette danse macabre
du nationalisme et du chauvinisme, pendant qu’on glorifie le mal.
C’est notre dernière chance de revenir aux valeurs qui fondent le 1er
Mai, fête internationale des travailleurs.
Belgrade, le 29 avril 1999.
Zaginflatch, Version française de NECEMO i NEDAMO
Feuille d’information
anti-autoritaire sur l’ex-Yougoslavie
C.N.T.-A.I.T.
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