LE COUP DE TARNAC

Première publication : dimanche 16 novembre 2008

A propos des constructions policières, souvenirs, souvenirs …

Dix personnes ont été interpellées mardi 11 novembre matin à Tarnac en Corrèze, à Paris, à Rouen et à Baccarat lors d’une opération baptisée « Taïga » qui a mobilisé 150 policiers. Neuf sont en garde à vue dans les locaux de la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) à Levallois, la dixième, mère d’une des gardées à vue, est en garde à vue à Nancy. Il leur est reproché d’appartenir à « l’ultra-gauche tendance anarcho-autonome » et d’être lié à une série de cinq sabotages de caténaires SNCF dans l’Oise, l’Yonne, la Seine-et-Marne et la Moselle. Un sixième cas de sabotage près de Narbonne a été évoqué puis écarté parce que de conception différente des premiers. Sous les coups de la législation anti-terroriste, cette garde à vue, a été reconduite quatre journées consécutives, durant 96 heures. Les suspects devront être ensuite, soit présentés à un magistrat anti-terroriste, soit remis en liberté sans charges.

D’après la ministre de l’intérieur Michèle Alliot-Marie et les services de police qui les espionnaient depuis des mois à la manière du KGB des films américains, les dix inculpés auraient été aperçus « a proximité des lieux » où les sabotages ont été commis « à des heures pouvant correspondre » mais les policiers n’ont cependant pas constaté qu’ils avaient mis en place un dispositif de sabotage et n’ont rien remarqué d’anormal sur le coup. En outre, la ministre affirme que « les perquisitions ont permis de recueillir beaucoup de documents très intéressants » et reproche à ces individus de se caractériser par « le rejet de toute expression politique démocratique et un discours extrêmement violent ». Ces maigres éléments, a priori tout à fait insuffisants pour engager de quelconques poursuites judiciaires, ont cependant suffit au ministère de l’intérieur pour prendre leurs fantasmes « d’une résurgence violente de l’extrémisme radical » pour une réalité et enclencher une vaste opération policière spectaculaire à grands retentissements médiatiques.

Alors que les policiers du renseignement intérieur et de la sous-direction anti-terroriste ne disposent pas pour l’instant de preuves, la présumée innocence des « présumés auteurs » a été piétinée en long, en large et en travers par le gouvernement, les médias mais aussi les syndicats et la LCR. Dès le début des opérations, le président Nicolas Sarkozy s’est aussitôt félicité des « progrès rapides et prometteurs obtenus dans le cadre de l’enquête » par cette « opération éclair » des services de police.

Les médias ont immédiatement emboîté le pas et relayé les théories fantasmagoriques du ministère de l’intérieur sans aucun travail d’enquête complémentaire ni émettre le moindre doute sur le bien fondé des accusations. Enfin, les syndicats des cheminots se sont publiquement et abondamment réjouis d’être si vite mis hors de cause parce qu’aucun employé de la SNCF n’a été arrêté. Le leader de la LCR, Olivier Besancenot, s’empresse de condamner des actes de sabotage qui ne « sont pas et ne seront jamais » ceux de la LCR. Pour Sud-Rail, il s’agit d’actes terroristes et le syndicat met en garde « ceux qui frisent la diffamation en voulant confondre terrorisme et action syndicale ». Bref, le bouc-émissaire que l’imaginaire douteux du ministère de l’intérieur a baptisé « ultra-gauche tendance anarcho-autonome » arrange tout le monde, excepté les quelques 350 habitants de Tarnac qui font bloc pour soutenir leurs épiciers et leur président du comité des fêtes.

Quand le spectre du terrorisme et son effet de vent glacial sera passé et apparaîtra pour ce qu’il est, une manipulation médiatique, il sera intéressant de mettre tous ces sbires hypocrites des syndicats soi disant radicaux et des partis soi disant révolutionnaires face à leurs discours parfois plus accusateurs encore que celui de la police, où ils se réjouissent sans détours de l’arrestation d’innocents, seulement coupables de ne pas avoir acheter la carte de leurs sectes, accusés de sabotages sans aucun éléments à charge et de terrorisme pour des actes qui n’ont pas encore été commis mais qui auraient pu l’être selon ces paranoïaques. Ils se sont tous empressés de condamner de façon définitive les 10 individus, se montrant ainsi encore plus expéditif que la justice de Sarkozy qui n’a pas encore rendu son verdict. A écouter tous ces charlatans professionnels du syndicalisme, il faudrait croire que le sabotage n’a jamais appartenu à leur histoire !

Pourtant, le secrétaire adjoint de la CGT de 1901 à 1908, un certain Émile Pouget, loin de condamner les saboteurs de la machine, n’avait pas peur, lui, de saluer leurs actes et de les préconiser comme outil pour les luttes syndicales. A cette époque, où le droit de grève était piétiné par les patrons et les gouvernements, où les manifestations des travailleurs étaient réprimées dans le sang comme à Chicago ou à Fourmies, le sabotage apparaissait alors comme la solution, le moyen de lutte le plus efficace pour protester contre des conditions de travail inacceptables et revendiquer la journée de huit heures sans se faire fusiller. (on pourra télécharger une réédition de sa brochure ici : https://cntaittoulouse.lautre.net/spip.php?article215 )

Aujourd’hui encore, le droit de grève est attaqué de tout côté : il y a la pression de l’état avec le service minimum, la pression de l’employeur avec la précarisation de l’emploi et le chantage au licenciement, il y a aussi tous les chômeurs qui n’ont pas la possibilité de faire grève. On ne peut pas compter sur les syndicats pour le défendre, trop préoccupés qu’ils sont à négocier leur part du gâteau avec le Pouvoir.

Dans de telles circonstances, une résurgence et une prolifération des actes de sabotage est plus que prévisible, c’est une certitude logique et ce ne sont pas les discours complètement à côté de la plaque des syndicats, partis et autres imposteurs qui y changeront quoi que ce soit.

Le sabotage reste un outil à la disposition des travailleurs pour mettre en œuvre leur imagination combative dans le dessein de justes revendications.

L’état et le patronat ont réduit à la portion congrue le droit de grève et les possibilités des travailleurs d’y recourir mais ce n’est pas là une invention moderne. Dans le passé, face à cette situation, les travailleurs se sont fait saboteurs et ce n’est pas en les traitant de terroristes qu’on arrêtera leur œuvre.

Pour la Révolution sociale,

Vers le Communisme Libertaire !

CNT AIT (Syndicat Interco Paris Nord)

contact@cnt-ait

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Affaire sncf ou l’emballage médiatique

vendredi 14 novembre 2008

Le 11 Novembre au matin, une dizaine de personnes sont appréhendées au sujet des incidents survenus récemment sur les lignes SNCF et placées en garde à vue dans le cadre de la lutte anti-terroriste. Les accusations de notre ministre de l’intérieur déclenchent aussitôt une fièvre spectaculaire médiatique où l’on peut lire et entendre tout et son contraire au hasard des éditions. Seul la culpabilité d’une « mouvance anarcho-autonome » fait l’unanimité. Encore une fois, les médiats se font l’écho du gouvernement, rejetant la présomption d’innocence alors que les personnes arrêtées sont encore en garde a vue.

A ce jour, aucune preuve matérielle ne vient étayer l’hypothèse policière, alors que les suspects étaient surveillés et filés depuis des mois jusqu’au soir même. Mais il faut des coupables et vite! Ces dix personnes peuvent voir leur garde à vue prolongée jusqu’à 96 heures, 4 jours, dans les conditions dont l’on se doute sous le feu roulant et continu des interrogatoires, nourris de quelques sandwichs, dormant peu, ne pouvant se laver. Le Gouvernement est dans son rôle, pointant ceux qui, par leurs écrits, leurs façons de vivre, offre un autre possible que la société marchande. Il a besoin d’un ennemi pour vivre. L’injustice, l’isolement et la peur sont ses outils pour s’en fabriquer. La Direction Centrale du Renseignement Intérieur, créée cet été, doit prouver sa pertinence et son budget en faisant du rentable et du chiffre. Il faut des boucs émissaires.

Les unes de nos journaux vont de supputations en procès d’intention avec l’assurance de la vérité, jouant une pièce pour la millième fois. Les irlandais de Vincennes ne sont pas loin pourtant… Le quatrième pouvoir ne lâche pas la bride. 10 jeunes gens désignés comme terroristes, subissent des lois d’exceptions sans une preuve, avant même une inculpation, parce que quelques trains ce sont arrêtés, comme cela arrive tout les jours avec des gamins tirant sur les sonnettes d’alarmes… Hier le GIGN sautait sur un bateau parce que des grévistes utilisaient leur outil de travail, des juges même étaient bousculés en défendant le leur… Aujourd’hui des manifestants croupissent en préventive pour avoir transportés des fumigènes et des clous tordus pour crever des pneus, des Maires même, des élus, des magistrats sont menacés s’ils n’appliquent pas le service minimum lors des grèves…

Nous ne savons pas, nous anarcho-syndicalistes, ce qu’est une « mouvance anarcho-autonome », terme facile et flou inventé par les policiers. Nous savons ce qu’est l’anarchisme ouvrier, nous savons ce qu’est l’autonomie prolétarienne. Nous nous souvenons qu’un secrétaire général de la CGT, un fondateur, a théorisé le sabotage comme outil de lutte lorsque la grève et la manifestation ne sont plus possibles. Il fait partit de l’héritage du mouvement ouvrier, comme nos mutuelles et nos syndicats. Ce sont des anarchistes qui les ont créés, afin d’être autonome devant les corporations et les dames patronnesses. Un saboteur est il un terroriste? Un train sans électricité vaut il un détournement d’avion, voir les guillotines de Robespierre? Il est vrai que les résistants de la SNCF étaient appelés terroristes. La terminologie est réservé au pouvoir. Quel que soit l’auteur de ces sabotages, quel que soit ses motifs, une loi d’exception est absurde. Nous voyons a quel point notre société policière peut facilement, avec ses fichages, ses dérogations, sa puissance reprendre notre maigre liberté et notre faible égalité.

Libération immédiate des personnes arrêtées

Abolition des lois sécuritaires LSI, LSQ et Perben

CNT-AIT Rouen

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Nous sommes tous des terroristes

mercredi 19 novembre 2008

Depuis le 11 Novembre, notre ministre de l’intérieur et l’autorité judiciaire entretiennent savamment la fièvre médiatique autour du nouvel ennemi intérieur. Après l’immigration des travailleurs clandestins sapant l’économie, les réseaux de barbus infiltrés prés a répandre le sang, la racaille des cités populaires incendiant nos villes, les casseurs violents contre le CPE, le danger s’appelle « mouvance anarcho-autonome ». Sans preuves et sans procès, les coupables sont là. L’Etat, la justice et la presse piétinent allégrement la présomption d’innocence, heureux que la jeune Direction Centrale du Renseignement Intérieure leur offre si tôt de si beaux bouc-émissaires. La France peut avoir peur. Redite des Irlandais de Vincennes? Nous laissons aux prévenus et leurs avocats prouver leur innocence. 

La France a peur, oui. 9 jeunes gens subissent des lois d’exceptions, sont accusés de terrorisme. Parce qu’ils lisent. Parce qu’ils écrivent. Parce qu’ils communisent leurs revenus et leurs biens. Parce qu’ils cultivent un potager bio. Parce qu’ils préfèrent faire eux mêmes ce dont ils ont besoin. Parce qu’ils refusent l’individualisme sclérosant et déprimant en vivant en communauté. Parce qu’ils manifestent. Le GIGN saute sur un bateau parce que des grévistes utilisent leur outil de travail, des faucheurs d’OGM sont emprisonnés, des manifestants aussi pour avoir transportés des fumigènes et des clous tordus crevant des pneus. La France peut avoir peur, celle des révoltés et insoumis, celle aussi des blogueurs et forumeurs, des bibliophiles et des tricoteurs, des colocataires et pire, celle des bricoleurs et jardiniers. Nous sommes tous des terroristes. 

Des gamins tous les jours arrêtent les trains en tirant sur les sonnettes d’alarme. Saboteurs! Terroristes? Nous ne savons pas, nous anarcho-syndicalistes, ce qu’est une « mouvance anarcho-autonome », terme facile et flou inventé par les policiers. Nous savons ce qu’est l’anarchisme ouvrier, nous savons ce qu’est l’autonomie prolétarienne. Nous nous souvenons qu’un secrétaire général de la CGT, un fondateur, a théorisé le sabotage comme outil de lutte lorsque la grève et la manifestation ne sont plus possibles. Il fait partit de l’héritage du mouvement ouvrier, comme nos mutuelles et nos syndicats. Ce n’est pas du terrorisme. C’est de la résistance. Nous sommes loin de la lutte armée. Quel que soit l’auteur de ces sabotages, quel que soit ses motifs, une loi d’exception est absurde. Nous voyons a quel point notre société policière peut facilement, avec ses fichages, ses dérogations, sa puissance reprendre notre maigre liberté et notre faible égalité et détruire nos espaces de lutte. Comment il peut nous entôler si nous sortons de la norme et cherchons d’autres possibles. 


Contre la répression du mouvement social 
Rassemblement devant le Palais de Justice Samedi 22 Novembre 14H 

CNT-AIT Rouen

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REPRESSION, SOLIDARITE, CONCESSIONS ?

samedi 31 janvier 2009

Les « rebondissements » médiatico-judiciaires de l’affaire de Tarnac permettent aujourd’hui de constater le vide sidéral qui constitue la non-matière de ce dossier. Elle a aussi permit de mettre en avant la valse des avis et opinions, et un œil (pas nécessairement) averti aura bien capté les médias comme ce qu’ils sont : une fabrique de l’opinion.

D’abord largement qualifiés d’irresponsables, de dangereux terroristes, d’avant-garde illuminée et déconnectée de la réalité de la lutte sociale [1], et ce au mépris de la présomption d’innocence, les inculpés de Tarnac sont aujourd’hui devenus pour beaucoup de malheureuses victimes d’un appareil outrancièrement répressif et arbitraire.

On peut évidemment se réjouir du fait que cet acharnement contre une supposée « mouvance anarcho-autonome », possible bouc émissaire livré en pâture pour l’exemple de ce qui pourrait advenir de ceux qui contestent, apparaisse pour ce qu’il est : une falsification.

Il faut néanmoins garder à l’esprit que la répression est un des rôles majeurs de l’état. Elle est une des justifications avancées pour son existence (l’état régalien), une partie de sa substance, et une des clés de sa survie. Qu’elle soit affirmée, assumée, violente ou sournoise et normative, la répression est l’expression de l’état, de son bras armé ou de sa main gantée de velours, qui a pour but de faire rentrer dans le rang tout ce qui sort du cadre dans lequel « il » veut voir ses sujets évoluer. Elle est l’expression de velléités autoritaires d’un appareil de gestion capitaliste des hommes.

Nous réaffirmons notre soutien aux inculpés de Tarnac, et demandons leur libération.

Nous affirmons aussi notre soutien à toutes les victimes de la répression, arbitraire ou non.

Contre l’état, pour l’anarchie, liberté !

CNT AIT Syndicat Interco Paris Nord


[1] On se rappellera notamment de la réaction d’Olivier Besancenot, affirmant que « les actes de sabotage ne sont pas et ne seront jamais ceux de la LCR ». Plus largement, un communiqué de la LCR dit : « Dans ce climat, la LCR – qui condamne totalement ces agissements – appelle à déjouer toutes les provocations et à faire de cette journée une grande initiative unitaire de défense de ce service public en voie de démantèlement et de privatisation ». Nathalie Bonnet, secrétaire fédérale de SUD rail déclarait le 11 novembre sur TF1 : « nous sommes soulagés que les responsables des actes de sabotage soient arrêtés »

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MANIF le 31 Janvier 2009

Il reste un embastillé parmis les 9 inculpés du 11 Novembre. L’accusation fallatieuse « d’entreprise terroriste » pourtant dégonflée médiatiquement reste le mot d’ordre de la Justice et du Gouvernement, dans cette affaire comme dans d’autres. Comme un avertissement pour nos luttes, nos modes de vies, nos espoirs, le Pouvoir joue l’irrationnel et la suffisance. Il hausse le ton en ces temps de « crises » pour nous rappeler que l’isolement et le silence des prisons, des hopitaux psychiatriques, des foyers, de tous ces lieux d’enfermement concentrationnaires que nous subissons ne sont plus une menace mais doivent devenir la norme de notre quotidien a tous. Il nous rappel que ne pas ce plier à cette norme est forcement une sédition et que la crise des banquiers impose l’Ordre et la Soumission.

Pour la libération et la levée des inculpations de toutes les victimes de « l’anti-terrorisme »

Pour l’abrogation des lois d’exeptions

Manifestation Nationale le 31 Janvier à Paris 

Fontaine  Saint Michel 15 Heures

CNT AIT Rouen 

Banderole de la CNT-AIT Paris au rassemblement du 31 janvier 2009