Il y a 20 ans, la guerre en Irak … on n’oublie pas !

retour sur le déclenchement de la guerre en Irak il y a 20 ans et les réactions des anarchosyndicalistes de la CNT-AIT

PRÉPARATIONS CONTRE LA/LES GUERRE(S)

vendredi 13 décembre 2002

Par la présente, le Secrétariat de l’AIT invite les Sections et Amis de l’AIT à accélérer le travail contre les guerres capitalistes en général, et spécialement contre la prochaine guerre à venir contre l’Irak. Des « experts » militaires annoncent que les principales attaques aériennes pourraient commencer dans les prochains 3 mois (décembre 2002 à février 2003).

La première période critique semble être après le 8 décembre, date à laquelle a été exigé de l’Irak qu’il expose son programme d’armement et qu’il fasse le clair sur sa possession d’armes de destruction massive. D’importantes forces dans l’administration de Bush voudraient commencer la guerre à la mi-décembre, avant qu’un grand nombre d’inspecteurs d’armement des Nations Unies ne se présente en Irak à la fin d’année. La justification est la suivante : si les irakiens disent qu’ils ont des armes de destruction massive, ceci est une « rupture objectives », et s’ils disent qu’ils n’en ont pas, les Etats-Unis diront que c’est une « fausse affirmation ».

Quoi qu’il en soit, que la guerre commence en décembre, ou en janvier/février, l’AIT, ses Sections et Amis doivent accélérer les préparatifs au moyen de :

I. L’examen des intérêts économiques de la guerre et agir contre les compagnies qui en tirent des profits.
II. Faire appel aux travailleurs du pétrole pour qu’ils n’acceptent pas d’accélérer la production de pétrole pendant une nouvelle Guerre du Golfe.
III. Entamer des préparatifs pour des grèves générales et des actions contre la guerre en cas d’attaque contre l’Irak.

Oslo, 2 décembre 2002.

Salutations Anarcho-syndicalistes du Secrétariat de l’AIT

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Irak, Palestine, Caucase, Côte d’Ivoire…

LE CAPITALISME C’EST LA GUERRE ! GUERRE AU CAPITALISME !

mercredi 18 décembre 2002

Avec l’effondrement du mur de Berlin, Georges Bush 1er décrétait la création d’un « nouvel ordre mondial ». Et, peu après, répondant à son appel, Mitterrand déclarait « nous sommes entrés dans une logique de guerre ». En 1991, en effet, le « nouvel ordre mondial » fêtait sa création par les bombardements massifs et des massacres en Irak lors de la première guerre du Golfe. Depuis, la « logique de guerre » est devenue le mode de gestion normale du capitalisme. La Yougoslavie et plusieurs anciennes républiques soviétiques (Moldavie, Azerbaïdjan/Arménie, Géorgie…) sombraient dans des guerres sanglantes. En Afrique, le plus grand génocide depuis 1945 au Rwanda (plus d’un million de morts) réalisé avec l’aide bienveillante de l’impérialisme français est le début d’une longue période de guerres et de barbaries dans la région des grands lacs. En 1999, nouvelle intervention sanglante de l’armée française, alors décidée par la gauche plurielle, aux côtés de l’OTAN, contre la Yougoslavie. En 2001, c’est la guerre contre l’Afghanistan, les USA s’en prennant aux réseaux islamistes qu’ils ont créés, avec encore une fois le soutien de la France, toujours dirigée par Jospin (même si l’intervention française s’est résumée en un remake de la « septième compagnie » perdue en Ouzbékistan).

Aujourd’hui, l’impérialisme américain se prépare à une nouvelle guerre en Irak. Depuis 1991, le peuple d’Irak crève sous l’embargo et les raids réguliers de l’aviation anglo-américaine, tandis que la clique de Saddam Hussein reste tranquillement au pouvoir. Une nouvelle guerre en perspective dans un monde déjà ensanglantée par de multiples conflits (Caucase, Moyen Orient, Côte d’Ivoire, ect…). Confrontée à la menace d’une crise économique sans précédent (crise qui se matérialise en particulier en Amérique latine), l’économie capitaliste mondiale n’a d’autres choix que de se tourner vers l’industrie de guerre, tandis que dans ce chaos généralisé, de multiples chefs de guerre (Bassaiev, Ben Laden, feu le général Massoud, etc…) rêvent d’accéder à une puissance étatique.

Contrairement à Mitterrand en 1990, à Jospin en 1999 et 2001, l’actuel gouvernement français prend aujourd’hui quelques distances face à la volonté de guerre des USA. Mais, nous ne pouvons nous leurrer, l’impérialisme français n’est ni moins sanglant ni moins brutal que celui des USA. Une des premières mesures du gouvernement Raffarin a d’ailleurs été de relancer l’industrie militaire. Et Chirac a représenté l’Etat français lors du sommet des bouchers de l’OTAN à Prague, sommet qui avait à l’ordre du jour, en plus de l’élargissement de l’Organisation Terroriste de l’Atlantique Nord en Europe de l’Est, la préparation de l’intervention militaire en Irak. Les tractations de la diplomatie, tractations dont le secret est à lui seul une preuve que la démocratie bourgeoise n’a de démocratique que le nom, peuvent très bien faire que l’armée française interviendra demain en Irak.

L’ennemi principal est dans notre propre pays !

Travailleurs salariés ou chômeurs de France, notre ennemi n’est pas dans les usines d’Irak. Ce ne sont pas des ouvriers ou des paysans irakiens qui nous imposent les licenciements, la flexibilité, la privatisation des services publics, les bas salaires ou les remises en cause de nos retraites. Nos ennemis, ceux contre qui nous devons lutter, c’est le patronat et les gouvernements successifs à son service. D’ailleurs, les chefs d’Etats, dictateurs et barons de l’industrie qui profitent des guerres, les dirigeants d’états-majors et les médias qui nous abreuvent de chants guerriers (au nom de « la patrie », du « nouvel ordre mondial », de « la croisade anti-terroriste », de « la guerre humanitaire » ou du « djihad ») ne crèvent jamais des guerres. Ce sont toujours les classes populaires, de tous les pays, qui paient le prix de la barbarie des dirigeants. Ces mêmes bellicistes peuvent d’ailleurs oublier leurs conflits en cas de soulèvement populaire.
C’est ainsi qu’après la première guerre du Golfe, le peuple d’Irak, épuisé par une décennie de guerre, s’est soulevé contre Saddam Hussein. Or, les puissances occidentales, qui décrivaient alors Saddam comme le pire ennemi de l’humanité, l’ont tranquillement laissé massacrer son peuple.

Bush, Chirac, Bassaiev, Poutine, Ben Laden, Sharon, Tony Blair, Saddam Hussein, etc… font bien tous partie d’une même clique, celle des gestionnaires du capitalisme. Non contents de s’enrichir sur notre dos, ils tentent de nous embrigader dans des guerres qui ne sont pas les nôtres.
En Irak comme ailleurs, ce sont leurs guerres, des conflits pour leurs intérêts et ceux de l’oligarchie, tandis que nous, travailleurs de tous les pays, nous subissons partout la même exploitation capitaliste.

Contre la guerre, refusons la paix sociale ! Luttons, oui, mais pour nos propres intérêts : contre les licenciements, contre la misère, contre la remise en cause de nos acquis sociaux, et au delà contre ce système capitaliste qui n’offre à l’humanité que la guerre, le chaos et la misère !

CNT-AIT Besançon

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La plus terrible des armes de destruction massive : le marché

mercredi 12 février 2003

Il existe des guerres dont on nous parle tant et tant que l’on finit par les voir comme la pire horreur du monde. La guerre « promise » en Irak et peut-être dans tout le Moyen-Orient est de celles-là. Comme aux temps bénis des missiles « Scuds » et « Patriotes » de la Guerre du Golfe, on nous abreuve de fausses nouvelles, bien avant le début même des hostilités. Et soyons sûrs que grâce à CNN, Al Jesira et aux services de propagande de l’ONU et de l’armée américaine, on sera, par télé interposée, aux premières loges de ce nouveau War-Game planétaire.

La fin du show est paraît-il déjà prévue. L’ONU fera la police et les américains exploiteront le pétrole en attendant que les Irakiens apprennent les valeurs de la démocratie façon occidentale. Des milliers d’Irakiens vont mourir sous les bombes, et quelques G.I. feront d’émouvants macchabées décorés au nom de la liberté. L’axe du bien aura triomphé d’un tyran que l’on donnera en pâture à un pseudo tribunal international. Chacun ira de son hypothèse sur les raisons d’une telle boucherie : sauvetage de la démocratie, rééquilibrage stratégique, flicage occidentale du monde, OPA musclée sur le pétrole, opération électorale américaine, les analyses nous tomberont sur la tête comme une pluie de bombes sur Bagdad. On verra même des femmes en faire tomber leur voile et des humanitaires télégéniques en kaki nous rejouer la valse des sacs de blé, des sacs de riz. Ça, ce sont les guerres dont on nous parle, dont on meuble nos peurs intérieures et nos vieux souvenirs de liberté.

Et puis, il y les guerres dont on nous parle si peu, ou alors à voix basse, par un article à la sauvette au fond d’un quotidien pour intello gauchisant. Ce sont des combats sans armée, des embuscades sans revolver, des massacres sans bombe. Ainsi, à Genève, en décembre 2002, tandis que le petit écran se partageait entre l’axe du bien de chez Bush et le saumon fumé de chez Machin, un affrontement bref et terrifiant condamnait à une mort certaine près de 70 millions d’êtres humains. A cette date, se réunissaient les instances décisionnelles de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) pour ratifier un accord international sur la production de médicaments génériques [1].

« Aucune maladie rentable ne pourra être inclue dans la liste des maladies prioritaires »

Cet accord prévoyait la facilitation de l’accès aux médicaments génériques pour les pays en voie de développement, en autorisant leur fabrication par des pays émergents à faible prix sous licence. Il devait permettre aux pays pauvres de se procurer à bas prix les médicaments indispensables pour combattre les grandes épidémies qui les frappent (sida, malaria, tuberculose, etc.). Le système prévoyait une série d’exemptions sur les droits des brevets, permettant ainsi aux pays sans capacité de production nationale d’importer des copies bon marché de médicaments brevetés. Mais sur les 146 pays membres de l’OMC (il y a environ 200 pays sur cette planète), un seul refusa de voter cet accord, les Etats-Unis ! Raison invoquée : le texte n’était pas assez précis sur les maladies couvertes. En fait, l’administration américaine de Bush défend les intérêts des multinationales pharmaceutiques qui ont dépensé plus d’un milliard de dollars pour le soutenir lors des dernières élections américaines. L’industrie pharmaceutique voit d’un très mauvais oeil la fabrication de génériques, car cela réduirait les profits monstrueux qu’elle engrange en ayant, sous couvert de brevet, le monopole de la commercialisation de ces molécules qu’elle vend bien sûr à des prix sans rapport avec les coûts de production. Un représentant de l’industrie du médicament, présent à Genève, résuma la situation en affirmant, non sans cynisme « qu’aucune maladie rentable pour cette industrie ne pourra être inclue dans la liste des maladies prioritaires (qui auraient dû bénéficier de cet accord) ». L’accord fut rejeté car, l’OMC fonctionnant selon le principe du consensus, le refus d’un seul pays suffit à bloquer un accord. En réalité, les américains ont de tels moyens de répression économique (droits de douane exorbitants, embargo sur les matières premières, suspension des prêts bancaires) qu’aucun pays ne peut se permettre de les braver sous peine de faillite à moyen terme. Les pays européens [2], dont l’industrie du médicament se porte à merveille, jouent les humanistes effarouchés en votant « pour l’accord » mais ne bronchent pas davantage, trop heureux de voir les américains défendre seuls leurs intérêts communs.

Une guerre sans arme, une guerre silencieuse, sans spectacle, une guerre de tous les jours où les morts se comptent par millions. Le sida frappe aujourd’hui 40 millions de personnes dans le monde, dont trois millions d’enfants, et plus de 90 % ne bénéficient pas d’anti-rétroviraux. La malaria frappe en Afrique un million de personnes par an, c’est-à-dire à peu près 3 000 par jour. Deux milliards de personnes n’ont pas accès aux médicaments essentiels. Chaque année, 17 millions de personnes meurent de maladies infectieuses. 90% d’entre elles vivent dans les pays dits « du Sud » alors que les pays dits « du Nord » accaparent 82 % du marché mondial des médicaments. Pourtant, pour un grand nombre de ces maladies, il existe des médicaments efficaces ou limitant fortement les effets de la maladie, mais ces médicaments sont à vendre… au prix fixé par les firmes pharmaceutiques. On atteint là le comble du cynisme capitaliste. Tandis que Bush et consorts nous font des leçons de bien et de mal en se préparant à offrir aux multinationales le pétrole irakien, ils assassinent au nom de la liberté du marché des millions d’êtres humains.

Ce triste bal genevois sous les lambris du palais moderne de l’OMC où le fric danse sur les cadavres du marché n’est qu’un épisode d’une guerre encore plus vaste. Ce non-accord international ou plutôt cet accord pour interdire de se soigner à la majorité des hommes et des femmes de cette terre, n’est qu’une des facettes d’une domination totale. Le même fonctionnement est assuré dans d’autres domaines par d’autres instances représentant le même pouvoir.

« les prédateurs … héritiers de cette classe de dominateurs qui gèrent l’économie depuis cinq cents ans. »

Banque mondiale et FMI (Fond Monétaire International) gèrent la planète à coups de prêts, d’accords économiques, de subventions, contre l’engagement des Etats à appliquer leurs directives. Dans un livre dénonçant ce pouvoir planétaire [3], Jean Ziegler, homme politique suisse se réclamant du mouvement des anti-mondialistes, explique qui sont ces maîtres du monde : « Ce sont les minces oligarchies qui détiennent le capital financier spéculatif mondialisé et que, dans mon livre, j’appelle les prédateurs. Ce sont les héritiers de cette classe de dominateurs blancs traditionnels qui gèrent l’économie depuis cinq cents ans. Près de 90 % des 1 000 milliards de dollars échangés chaque jour passent par les mains de ces sociétés. Des sociétés multinationales, comme Microsoft, l’Union des banques suisses, la Société Générale, General Food… Aujourd’hui, 200 de ces entreprises contrôlent près de 28 % de la production de richesse mondiale ». Ces maîtres du monde exercent leur pouvoir à travers les organisations supra-nationales telles que le Fond Monétaire International (FMI), la Banque mondiale et l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), qui mettent en oeuvre le consensus de Washington. Il s’agit d’un ensemble d’accords informels conclus tout au long des années 80-90 entre les principales sociétés transcontinentales, les banques de Wall Street, la Réserve fédérale américaine et les organismes financiers internationaux (FMI, Banque mondiale).

Ces accords informels visent à obtenir la liquidation de toute instance régulatrice (Etat ou organisation internationale), la libéralisation la plus totale et rapide de tous les marchés et l’instauration à terme d’un marché mondial unifié et totalement autorégulé.

La voilà, la guerre totale. L’armée du profit, sans couleur ni drapeau mais avec pour artillerie le dollar, pille et massacre la planète jour après jour.

De 1890 à 1990, la population mondiale à été multipliée par 4, la richesse par 14 et la production industrielle par 40 ! Les riches sont de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus pauvres. Aujourd’hui, 826 millions de personnes sont chroniquement et gravement sous-alimentées. Chaque jour, 100 000 personnes meurent de la faim ou de ses suites immédiates. En décidant en quelques minutes de déplacer leurs capitaux en fonction de la maximisation des profits, les « maîtres du monde » décident cha-que jour de la vie et de la mort de centaines de milliers de personnes. Saddam ou Oussama, purs produits du système capitaliste, despotes sanguinaires, qui nous sont vendus comme les bourreaux des temps modernes, ne servent-ils pas entre autres manipulations à nous faire oublier l’arme de destruction massive la plus efficiente : le marché ?

Interrogé par un journaleux sur le devenir de tout cela, ce même Jean Ziegler, député européen, expert auprès de l’ONU, sociologue établi, donc peu soupçonnable de terrorisme, répondit : « Il n’est pas question aujourd’hui de négocier une coalition hâtive entre quelques restes de gauchisme et des ruines du trotskisme. Il faut changer de perspective : on est aujourd’hui dans un moment de rupture des temps… Lorsque ces institutions nous demandent ce que nous voulons et nous reprochent de ne pas avoir de projet et donc de ne pouvoir dialoguer avec nous, je donne l’exemple des révolutionnaires de 1789 : ils savaient ce qu’ils ne voulaient pas, mais n’avaient pas de projet précis. Demander aux altermondialistes quel est leur projet, c’est comme demander, au soir du 14 juillet, à ceux qui avaient pris la Bastille de réciter le premier article de la Constitution de la Ière République ou de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ! Le programme du mouvement se fait en marchant ».

Adrien, Tarbes


(Image PNG)

OMC : Comment ça marche ?

L’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), constituée de 146 états-membres, a été créée en 1995 pour succéder au GATT (ancienne instance régissant les accords commerciaux). Elle se donne pour objet de définir les mesures assurant la régulation du commerce mondial. Trois organes gèrent conjointement l’OMC.

1_ l’Organe d’évaluation des politiques commerciales.
Il se compose de l’OMC elle-même, de la Banque Mondiale et du Fond Monétaire International. Les votes se font au prorata des contributions financières des pays membres (1 dollar = 1 voix). On imagine le poids des pays du Sud !

2 _ Le Conseil général.
Il gère les affaires courantes lors des réunions souvent informelles sur les sujets sensibles. Les émissaires des acteurs économiques les plus puissants sont omniprésents. Ils encadrent les travaux. Les pays pauvres n’ont pas les moyens de suivre les travaux simultanés et sont obligés de « choisir » leur sujet. Une quarantaine de ces pays n’ont même pas de représentant à Genève, ou réussissent seulement à se payer un ambassadeur commun à plusieurs. Les décisions doivent être prises au consensus, sans jamais de vote. Le calendrier et le contenu des négociations est entre les mains du « QUAD » (Etats-Unis, Canada, Japon, Union Européenne).

3_ L’organe de règlement des différends (ORD).
C’est la juridiction mondiale compétente pour tous les accords. Seuls les critères commerciaux sont pris en compte. L’accord de tous est nécessaire pour ne pas appliquer de sanctions.

[d’après un texte de la confédération paysanne]


[1] Médicament générique : lorsqu’une firme dépose un brevet pour une nouvelle molécule thérapeutique, elle a l’exclusivité de la fabrication et de la commercialisation de cette molécule. Après un certain nombre d’années, la protection du brevet tombe et cette molécule peut être fabriquée et vendue par n’importe quelle firme.

[2] L’Union européenne a lancé, jeudi 8 janvier 2002, une initiative pour tenter de débloquer les négociations à l’OMC sur l’accès des pays pauvres aux médicaments, en présentant un compromis qui donnerait un rôle d’arbitre à l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Sachant que l’OMS est également la proie des lobbies du médicament, on mesure le  » courage  » des gouvernants européens.

[3] Jean Ziegler,  » Les Nouveaux Maîtres du Monde et ceux qui leur résistent « .

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Ceux qui sont cause des guerres n’en meurent jamais

dimanche 16 février 2003

De jour en jour, la surveillance de l’Irak se renforce pour éviter une guerre qui semble inéluctable. Mais l’Irak subit l’embargo depuis des années et devrait être bien affaibli (cela ne semble pas, bizarrement, affecter le train de vie de ses dirigeants). Son agresseur, dans cette affaire, paraît bien plus lourdement armé et belliqueux. Que craignent les Etats-Unis ? Cette chasse au Grand Satan, épouvantail moderne à l’usage des populations, masque des enjeux bassement matérialistes, tels le pétrole. Les richesses naturelles motivent bien des conflits : diamants au Rwanda, eau au Proche Orient… ou une autre « denrée », le pouvoir, d’autant plus prisé qu’on le monopolise. En réalité, pétrole, eau et diamants ne servent qu’à départager quel sera le plus puissant, comme les entreprises françaises, Total Finna-Elf au Gabon et dans divers pays d’Afrique, les marchands d’armes, tels Dassault, un peu partout dans le monde… Chirac fait son travail de « représentant du peuple » au profit du capitalisme. Quand la France se prononce contre l’embargo et la guerre en Irak, c’est pour protéger ses entreprises et ses intérêts financiers.

Ne nous trompons pas d’ennemis : La clique des dirigeants de gauche comme de droite n’agit pas pour le bien des populations, mais pour celui de son portefeuille ; pour asseoir leur pouvoir personnel et les intérêts de la classe dominante. Des gens qui ne se connaissent ; pas se massacrent au profit le personnes qui, elles, se connaissent, mais ne se massacrent pas. La guerre est conséquence de la logique du pouvoir. Anéantir les pouvoirs, c’est donc la supprimer. A qui profite la guerre ?

A bas le capitalisme ! Pour la révolution sociale et internationale ! Ni talion, ni croisade, ni jihad !

Nous refusons de soutenir des oligarchies, qu’elles soient françaises, israéliennes, palestiniennes ou autres. Nous soutenons tout individu qui lutte pour la liberté et l’émancipation de tou(te)s. Palestiniens, Israéliens, Etats-uniens, etc. ne sont pas des agneaux tombés sous la dent des loups, mais une population qui a le droit de vivre en paix et sans crainte, dans des conditions décentes.

Dans tous les États.qui décide, les dirigeants ou les populations ?

Droit de tous et de chacun à décider de notre avenir !

Non à toutes les guerres ! A bas toutes les armées ! Démantèlement de tous les États !

CNT-AIT Paris

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Pouvoir assassin !

lundi 24 mars 2003

Le capitalisme régente la planète, se partage le monde ; ici on subit et partout on crève.

La guerre en Irak n’a pas commencé le mercredi 19 mars 2003. La guerre au Moyen-Orient est une affaire rentable qui dure depuis des années. Grâce aux armes vendues par la France et par l’Occident, il y a eu des millions de morts pendant la guerre Iran-Irak, avec  » au passage  » le massacre des Kurdes par Saddam Hussein à Hal-Abja. Puis cela a été la première guerre du Golfe en 1991 et ses 300 000 morts, et l’embargo qui a entraîné la mort de 500.000 enfants avec la bénédiction de l’ensemble de la classe politique française, droite comme gauche.

En Colombie, en Côte d’Ivoire, en Algérie, en Irak, et un peu partout, les populations civiles sont massacrées par des militaires.

La farce démocratique.

Les Etats soit-disant démocratiques comme la France et les Etats-Unis, n’attendent pas notre opinion pour tuer et massacrer. Ce qui les intéresse, c’est le profit – et l’ordre social qui le permet. C’est pourquoi ils choisissent quels seront les prochains dictateurs en Afrique, au Moyen-Orient, en Amérique du Sud. L’ONU n’y changera rien ; elle est le rassemblement des représentants de ces mêmes Etats. La preuve : ses  » bonnes  » résolutions et tout le bla-bla humanitaire n’ont pas evité le génocide du Rwanda, ont couvert les bombardements de Belgrade et n’empêchent pas le massacre des Palestiniens et des Tchétchènes.

 » Démocratie  » ou dictature, le capitalisme c’est la guerre.

Que faire ?

En Grande-Bretagne, les cheminots ont refusé de transporter les armes. En Italie, les manifestants ont bloqué les trains. En Irlande, les pacifistes ont envahi les aéroports militaires pour empêcher les avions de décoller. Aux USA, les opposants pratiquent la désobéissance civile.

D’une façon générale, c’est la machine économique qu’il faut paralyser si l’on veut stopper les guerres. En effet, le système capitaliste a besoin de nous pour produire et transporter tout le nécessaire pour ses guerres. Nous, nous n’avons pas besoin de lui. Pour en finir avec la guerre, il faut en finir avec le capitalisme !

Contre toutes les guerres, l’Etat et le capitalisme, solidarité internationale !

Organisons-nous,

Boycott et fermeture des usines de mort,

Désertion, Insoumission !

CNT-AIT

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Ils nous prennent vraiment pour des imbéciles ! Ont-ils raison ?

samedi 29 mars 2003

Qui « ils » ? Les politiciens qui décident des guerres et de notre misère, qui soi-disant nous « représentent » et qui en réalité ne sont que les gestionnaires des intérêts des possesseurs du capital, dans chaque pays.

Qui « nous » ? Ceux qui, dans tous les pays, développés ou sous-développés, produisons et faisons fonctionner pratiquement tout dans cette société, y compris les usines d’armement et qui, dans des temps de crise économique et de guerre (cela va souvent ensemble), voyons notre angoisse quotidienne s’intensifier, sous la réalité ou la menace du chômage et, pour certains d’entre nous, sous le feu des bombes ou l’emploi comme chair à canon.

Ils nous prennent pour des imbéciles, car ils mentent tous, froidement, cyniquement.

Ceux qui font la guerre et ceux qui s’y opposent. Ceux qui mènent la guerre ne le font pas pour les raisons qu’ils prétendent : Bush et compagnie parlent de croisade contre un tyran, de lutte de la démocratie contre la dictature, alors qu’il s’agit de pétrole, de marchés et de positions géo-stratégiques. Les gouvernements qui s’opposent à cette intervention militaire parlent d’amour de la paix et d’humanisme, alors qu’il s’agit… de pétrole, de marchés et de positions géo-stratégiques. Les soi-disant opposants ont aussi les mains pleines de sang et de poudre. L’administration française, la plus anti-guerre et anti-américaine aujourd’hui, porte une responsabilité directe dans les différentes guerres en ex-Yougoslavie, dans le génocide au Rwanda en 1994, dans la première guerre du Golfe, dans celle d’Afghanistan ; ses soldats jouent en permanence en Afrique un rôle actif et sanglant de police neo-coloniale, comme en ce moment en Côte d’Ivoire. Le capitalisme allemand n’est pas en reste, le russe n’en parlons pas.

Ont-ils raison de penser que nous croyons ce qu’ils nous racontent ?

Les sondages, pourtant objet connu de multiples manipulations, sont formels : les politiciens sont devenus, pour la grande majorité de la population des pays où on publie ce type d’enquêtes, un objet de méfiance, si ce n’est de dégoût. Beaucoup d’entre nous se méfient aujourd’hui des discours que tiennent les divers politiciens pour justifier ou s’opposer à cette deuxième guerre du Golfe. Rarement le caractère sordidement économique des guerres n’était apparu aussi ouvertement. Au point que parfois, devant la télé, même les plus blasés ont l’impression d’assister à un crime contre l’humanité en « prime time ».

Cependant, certains d’entre nous, nous nous consolons en croyant à ce que nos politiciens racontent… comme avec les religions, pour que le monde ne paraisse pas aussi horrible qu’il l’est. On va même parfois voter pour l’un d’entre eux, comme si des candidats à la gestion du capitalisme pouvaient être vraiment différents entre eux.

On se console avec des mensonges parce qu’on n’a pas de projet alternatif. Parce que nous sommes convaincus qu’un monde différent, un monde où simplement ce n’est pas l’argent et le profit qui gouvernent, où le bonheur humain peut devenir le seul objectif de toute production, de toute activité, qu’un tel monde est une pure utopie irréalisable.

Tant que nous penserons cela, nous serons condamnés à subir leurs lois, leur exploitation, leurs guerres absurdes, leur folie autodestructrice de la planète. Et, pour nous consoler, nous serons poussés à croire à leurs mensonges.

Un autre monde est possible

L’existence d’un nouveau monde, d’une nouvelle société, sans classes ni patries, basée sur la gratuité généralisée des biens, sur la coopération et le partage, dépend pourtant de nous, et seulement de nous. De ceux qui ne profitons pas des lois marchandes, qui ne vivons pas de l’exploitation du travail d’autrui, qui sommes exploités (quand on n’est pas laissés sur le pavé) et qui faisons par notre travail quotidien exister cette machine qui nous broie. C’est nous qui produisons tous les moyens matériels qui rendent possible les guerres, c’est nous qui nourrissons et entretenons les politiciens et les miliaires qui les conduisent. C’est nous qui pouvons leur enlever tout pouvoir de décision en le prenant nous-mêmes, collectivement, en devenant maîtres des moyens de production pour les orienter exclusivement vers la satisfaction des besoins humains.

Le vieux cri de guerre « Prolétaires de tous les pays, unissons-nous ! » est plus actuel que jamais. Non seulement parce que seule l’union de ceux qui mondialement subissons le système peut arrêter la logique capitaliste, mais aussi parce que les moyens matériels, technologiques de cette union se développent sous nos yeux.

Développer notre confiance en nous-mêmes. Transformer nos luttes immédiates, partielles, en moments de lutte contre le capitalisme lui-même, cherchant l’unification la plus large, réfléchissant, discutant collectivement les contours de la société que nous pouvons et devons bâtir. Il n’y a pas d’autre chemin, si nous voulons qu’un jour il n’y ait plus personne pour nous prendre pour des imbéciles.

Des internationalistes
20 mars 2003

Adresse Internet : cerclediscussionparis@hotmail.com

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« Que faire contre les guerres ? »

mardi 29 avril 2003

« Que faire contre les guerres ? », c’est le sujet de la revue « Ni patrie ni frontières » dont le N°3 (mars 2003) vient de sortir. Sa lecture m’a permis de comprendre pourquoi je ne me sentais pas l’envie de manifester contre la guerre en Irak : ça fait trop ’harmonie en chiraquie. Quel amour en effet entre l’opinion publique et Chirac ! Ces manifestations arrangent l’état français. Tout le monde est content donc : le gouvernement et l’opposition qui a son terrain de jeu. II y a dans cette revue un témoignage de la manif parisienne du 15 février 2003 où étaient présents tous les crabes politiciens. L’article s’intitule « Un bain de haine chauvine ». On y voit défiler les partis et syndicats. Je comprends qu’il pêchent au filet dérivant leurs futurs électeurs dans le marécage de la contestation consensuelle. Pour cela, ils se vautrent dans I’antiaméricanisme et l’antisémitisme primaires. Ils écrasent les critiques contre le régime sanguinaire irakien, ils permettent à l’extrême droite de manifester au nom de la paix et de crier « mort aux juifs’ derrière le drapeau bleu-blanc-rouge. Cela n’a pourtant rien à voir avec du pacifisme. C’est une dérive patriotique. Jusqu’à prendre parti pour un Etat, I’Etat français (mais aussi irakien ou palestinien) contre d’autres états (américain ou juif). De quoi alimenter de nouveaux massacres ! Comme le dit un autre texte, « Misère de I’anti-guerre en Europe » les choix immédiats « représentent des inconvénients rédhibitoires ». En France, une organisation révolutionnaire se trouve devant deux choix :

– Le premier est d’essayer de toucher « les masses » et manifester contre la guerre en Irak. Mais c’est crédibiliser la politique extérieure française, qui est tout aussi colonialiste et impérialiste que n’importe qu’elle politique étatique. Le journal « Lutte ouvrière » ne s’y trompe pas, puisqu’il écrit : « Non à l’intervention américaine, non à l’union nationale derrière Chirac ». Tout à fait d’accord. Mais alors, que font les militants de LO dans les faits ? Tous les samedis et jeudis, ils défilent bien sagement derrière la politique de Chirac ! D’autre part, cette politique consiste à minorer le fait qu’en Irak il existe bel et bien une dictature sanguinaire laquelle, d’une façon ou d’une autre, doit être détruite.

– Le deuxième choix, c’est celui d’un travail de fond et de réflexion, mené en dehors du sentiment d’urgence pour se sonner le temps de bien aborder tous les problèmes dans les quartiers et les entreprises. C’est, je crois, ce que les militants de la CNT-AIT ont choisi de faire. Tant pis si cela doit nous marginaliser aux yeux d’un microcosme libertaire dont la « majorité » mesure son importance aux rush des cameras.

M.

(Cette revue est disponible chez Y. Coleman (sans autre mention), 10 rue Jean-Dolent, 75014 Paris, 7.5 euros l’exemplaire. Elle regroupe une collection de textes pacifistes, anarchistes et marxistes de la première guerre mondiale aux récents conflits Irak/Etats Unis. yvescoleman@wanadoo.fr)

Article du Combat Syndicaliste de Midi-Pyrénées n°80 – Avril_Mai 2003

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C’est LA guerre, n’est ce pas ?

jeudi 17 avril 2003

C’est LA guerre n’est ce pas ? Elle dîne tous les soirs à la maison à l’heure des premiers bombardements « War Game » à la télévision. Cest en Irak et pas ailleurs ce printemps nous dit-on. C’est LA guerre pour tout le monde, pacifiste ou faucon, belliciste ou vrai con. Y’en a pour tous les goûts,. toutes les morales, tous les dégoûts. Avalanches d’images, pluies de bombes et de chiffres : Bush obtient du . congrès américain 75 milliards de dollars de rallonge pour sa croisade tandis que I’ONU espère trouver 2 milliards de dollars pour l’aide humanitaire. Avalanches d’images et pluies de regards : Les civils irakiens qui souffrent et meurent en mondovision. Taches de sang, enfant brûlé, bras arrachés. Pendant ce temps là, les mercenaires anglais et américains ne meurent pas, ils disparaissent, ou leurs cadavres sont au fond de caisses en alu qui prennent l’avion. Avalanches d’images et pluies de mots. Les espions viennent à la télé nous livrer le plan de bataille. Les philosophes sortent de leur crâne gris, le pétrole, dieu et la démocratie (mention spéciale à Gluksman, éternel con va-t-en guerre, petit caporal de salon). Et les politicards font leur numéro de bouffon, version « j’ai des principes », oubliant un peu vite leurs envolées guerrières contre l’Irak en 1991.

C’est LA guerre n’est ce pas ? Non, c’est une lampe-piège pour papillons, c’est un bidet pour nos trop-pleins d’indignation, un miroir aux alouettes, un trompe-couillon. C’est pas LA guerre, c’est une démonstration. Une façon de nous dire que le Kapital ne souffre aucune contestation. Gare au désordre, gare aux envies de révolution. LE marché et la caste qui s’en repaît n’accepteront jamais une quelconque remise en cause de la domination. Que les peuples s’indignent de la cruauté de la guerre, voilà qui rassure les tenants de l’ordre mondial et les fabricants de canons. C’est une opération de police mondiale, une ratonnade, une exécution. Les gens de Bagdad, après 20 ans de Saddam, petit frère de Bush, de Sharon et de Ben Laden, après 10 ans d’embargo et plus d’un million de morts faute de nourriture et de médicaments, vont très certainement subir un nouveau terrible carnage.

C’est LA guerre n’est ce pas ? Non, c’est LEUR guerre, celle des puissants, celle des patrons. Comme toujours les cadavres sont de chez nous : civils, hommes, femmes et enfants, et petits troufions. Les généraux et les banquiers dealent au fond des bunkers et affinent leurs prévisions loin des canons. Le deal est d’envergure : qui sera le patron ? Ces messieurs ne sont plus d’accord sur le partage du monde.

C’est LA guerre, n’est ce pas ? Non, c’est le spectacle de la guerre, c’est la guerre-spectacle. L’autre, la VRAIE guerre, celle de la domination, elle n’a jamais cessé. Elle est là tous les jours, dans toutes les régions pillées par les intérêts occidentaux, dans les régions dévastées par la malaria ou le VIH faute de pouvoir payer les thérapies, dans les régions sous la botte de dictateurs présentables au grand cirque des nations. La vraie guerre ne se fait pas seulement à coups de raids aériens, il y a aussi les raids boursiers, les blocus, les monopoles, les prêts bancaires, et les plans de restructuration de la Banque mondiale et du FMI. On meurt pour de l’argent à grands coups d’innovations technologiques, de modernité industrielle, et de sciences mortifères. Nous, cette guerre spectacle, on la vomit comme on vomit les morts de la misère et de l’exploitation, mais on ne veut pas en faire un combat pour les nationalismes, un combat pour I’ONU, un combat pour des religions. « Ni Le Pen, ni Chirac » disait-on il n’y a pas si longtemps. Et bien là c’est pareil : Ni Bush, ni Saddam, ni I’ONU. On ne veut rien de leur combine. Et notre espoir d’une société sans Etat vaut mille fois leurs rêves affreux d’une pseudo- démocratie où les citoyens vont en file indienne à l’auge puis à l’usine tandis que les élites se regardent penser et que les banquiers comptent leurs ronds.

Calice

Edito du Combat Syndicaliste CNT-AIT n°80 Avril/Mai 2003

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Guerre & propagande

samedi 3 mai 2003

Les troupes américaines et anglaises, une fois de plus, ont attaqué l’Irak, déjà anéanti par la guerre de 1991, et par les années d’embargo et de bombardements réguliers qui l’ont suivie. La même histoire se répète, pour les mêmes raisons, contre un même ennemi fantoche.

Mais quel délice, ou quel dégoût, selon l’humeur, de voir la propagande française sur la guerre en Irak et d’entendre aujourd’hui sur toutes les ondes les arguments que l’on tentait d’opposer à la propagande étatique de 1991 ! Les américains ne seraient intéressés que par les réserves pétrolières du Golfe ? C’était déjà le cas en 1991. Ils auraient surgonflé la puissance de leur ennemi pour justifier leur attaque ? C’était aussi le cas en 1991. Leur argument simpliste de la lutte du bien contre le mal serait un prétexte pour justifier par avance l’annexion de l’Irak ? En 1991, le prétexte était la défense du Droit international.

En 1991 comme aujourd’hui, les deux-tiers des réserves pétrolières mondiales gisent dans le Moyen-Orient et les trois-quarts des importations mondiales de pétrole vont vers les USA et l’Europe, premiers consommateurs d’or noir. Aucune tentative de contrôle du pétrole du Moyen-Orient par le Moyen-Orient lui-même n’a jamais pu aboutir. Chaque fois, les USA les ont directement ou indirectement brisées, par des assassinats, des coups d’Etat ou des mesures économiques punitives. La guerre du Golfe de 1991 leur a permis de s’installer durablement en Arabie Saoudite, qui refusait jusqu’alors cette intrusion. Mais l’Arabie Saoudite est aujourd’hui bien trop mouillée avec le terrorisme d’Oussama Ben Laden et d’Al-Quaida. Très loin du Moyen-Orient, le Venezuela est en réalité le premier fournisseur de pétrole brut des USA. Mais il vient d’être nationalisé par Chavez et, tout en entretenant la grève des classes moyennes pour déstabiliser le régime, les USA ont besoin d’une alternative. L’Irak, avec ses puits de pétrole, très affaibli, sans défense sérieuse possible, diabolisé depuis longtemps au travers de son dictateur, est une cible parfaite. Il n’est pas possible de s’entendre avec Saddam Hussein ? Qu’à cela ne tienne, cette fois-ci, on le remplacera. La guerre coûte cher ? Peu importe, elle rapporte encore plus. En 1991, elle aurait coûté 40 milliards de dollars, mais l’augmentation du prix du baril de brut (de 15$ jusqu’à 42$) aurait rapporté 60 milliards de dollars, le solde pour les firmes pétrolières et l’Etat américain étant largement positif. Et puis quand le pays est détruit, il faut bien le reconstruire. L’Etat US, qui s’occupe de tout, vient d’offrir le plus gros contrat de cette reconstruction à une boite américaine dont l’ancien PDG est l’actuel vice-président des Etats-Unis, Dick Cheney.

On n’a pas trop de mal à savoir tout ça aujourd’hui, et ce n’est plus du tout contestataire de manifester contre la guerre dans le Golfe. Au contraire, les médias nous y encourageraient ! Quelle pitrerie d’aller gueuler contre la guerre sous les fenêtres d’un pitre, qui se voit déjà prix Nobel de la paix ! Pour un peu, il viendrait serrer les louches des manifestants !

N’oublions pas que tout cela n’est qu’un spectacle pour opinions publiques. Gouvernements et médias jouaient leurs rôles quand ils marchaient dans la combine de Bush, faisant semblant de croire que l’Irak (pays exsangue) fricotait avec Al-Quaida, possédait des armes de destruction massive, et représentait un grave danger pour l’Occident. Ils jouaient leur rôle quand ils vomissaient de l’ONU toute la journée en réclamant encore et encore des expertises pour vérifier que l’Irak ne détenait plus les armes sophistiquées qu’ils lui avaient vendues, eux qui détiennent de quoi détruire plusieurs fois la planète. Et maintenant encore ils jouent, quand ils sont tous à dénoncer poliment cette guerre, en s’offusquant des futurs morts irakiens, jouant les blanches colombes face aux méchants faucons américains.

Tout cela n’est que le spectacle de ce début de printemps : Irak II, le retour. Qu’on se le dise et qu’on ne parle plus de rien d’autre. Ni des révoltes contre l’Etat français colonisateur en Afrique, ni du génocide des Tchétchènes par les « colombes » russes offusquées de la guerre en Irak.

Avant la guerre du Golfe en 1991, la majorité des français étaient contre ; mais après plusieurs semaines de propagande, la majorité des français étaient pour. Je m’étonnais hier encore que les britanniques soient majoritairement contre la guerre. Que font leurs médias, me demandais-je. Eh bien ça y est : ce matin, nouveau sondage, la majorité des britanniques est pour la guerre. Les anglais n’ont rien à nous envier, leurs médias sont aussi efficaces que les nôtres.

Pendant ce temps, Bush réclame une rallonge de 75 milliards de dollars au congrès américain pour poursuivre la guerre, et l’ONU va jouer son rôle en réclamant un peu plus d’un milliard de dollars pour « faire face » au désastre humanitaire qui s’annonce, aux probables épidémies de choléra dans la population déjà victime de mal-nutrition. Qu’importent ces populations que le sauveur états-unien vient soi-disant libérer, qu’importent les kurdes, qui vont se faire écraser par les turcs après avoir servi de première ligne au nord, qu’importent les chiites, qui se sont déjà fait massacrer après avoir été encouragés à se révolter par les « alliés » en 1991 !

L’Etat américain a visiblement un objectif plus ambitieux, celui de montrer au monde qu’il est désormais le seul flic de la planète. Après l’Afghanistan, l’Irak ; pétrole oblige. Le prochain est probablement la Corée du nord, peut-être l’Inde ou le Pakistan. Ceux qui sont les « colombes » d’aujourd’hui (faucons d’hier ou d’ailleurs) ne découvrent pas l’horreur de la guerre, ils tentent simplement de lui résister, de l’obliger à compter avec eux pour le partage du pouvoir et des richesses. En 1991, ils ont parié sur les profits à tirer d’être aux côtés du vainqueur et se sont fait avoir. Aujourd’hui, ils parient sur les profits à tirer à ne pas se mouiller dans cette guerre, sans plus d’état d’âme.

Fred

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France-Poire : C’est l’anarchie en iraki !


Journal épisodique et prophétique de la lente mais inexorable déliquescence du monde de la domination

lundi 12 mai 2003

PPDA l’a dit, Hérouet l’a maudit, Plénel l’a pleuré, tous les journaleux l’ont bramé : « C’est l’anarchie en Iraki ! Pillage, saccage, mise à sac de palais, de quartiers cossus et de bâtiments publics (commissariats et casernes compris), c’est le bordel, le chaos. Sous l’irakien à genou couvait le barbare. Pire que le Sida ou la vache folle, plus rapide que la pneumonie chinoise, V’la l’Anarchie ! ».

Tout doux les scribouilleurs, retenez la plume et le clavier, rassurez vos seigneurs et maîtres, ce n’est point là retour en barbarie, juste des gens oppressés par un dictateur depuis des dizaines d’années, et qui le plus honnêtement du monde reprennent à leur voleur une maigre partie de leur dû. Ce sont juste des gens qui, depuis 1991 et la fatwa de l’ONU proclamant l’embargo mondial sur l’Irak, voient leurs enfants mourir, faute de médicaments. Expliquez bien à vos maîtres qu’il arrive parfois que le peuple se venge de la misère et des humiliations subies. Du fauteuil au lustre, de la photocopieuse au bouquet de fleurs, tout cela est à eux. Ce n’est pas du vol, mais de la réappropriation.

Allons, messieurs les hagiographes de la domination, un peu de tenue, torchez vos diarrhées de panique, ce n’est pas encore l’Anarchie. Certes, ces razzias dans les palais et les quartiers chics sont revigorantes, rappelant quelques images ravissantes d’éphémères instants révolutionnaires passés, mais pour l’anarchie, on est un peu loin du compte. D’ailleurs, que pourraient donc choisir de vivre les irakiens coincés entre un GI bardé de mitraille, un mollah aux aguets, et un dollars parfumé au pétrole ? Non, non, l’anarchie, ce n’est pas cela, c’est plus tonique, c’est plus gai, c’est plus solidaire, c’est plus généreux. Si c’était l’anarchie en Iraki, il n’y aurait ni GI, ni mollah, ni dollars ou alors des GI défroqués et des mollahs désarmés. Si c’était l’anarchie en Iraki, messieurs les journaleux, vous filmeriez des assemblées générales, des coopératives et des conseils de quartier. Vous filmeriez des regards pleins de dignité et d’espoir, des sourires, des gens debout, vivants, sans peur.

Allez, reprenez la place au cul du carrosse, maudits laquais, n’ayez crainte, il n’y a là ni barbarie, ni anarchie. Vos puissants et vos maîtres ont seulement voulu vous faire peur jusqu’à vous entendre bramer en notre nom à la gloire de l’Etat, cette forme normalisée de la domination, et de l’ONU, ce club très réservé pour bouchers, équarisseurs et maquignons.

CICONA – Production/Confédération Internationale des Collectifs Otonomes pour une Nalternative Anarchiste/G. Henein Grup.

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