MORT AUX VACHES ! – APERCU SUR LA RESISTANCE DES ANARCHISTES DE MARSEILLE A TOULOUSE …

Chaque année depuis le 8 mai 1945, « la France » fête sa libération du joug Nazi.

Le pouvoir, en mal de « cohésion sociale » [1], cherche désespérément à sauter sur l’occasion pour montrer que le « peuple français » a su, dans ses périodes les plus sombres se serrer les coudes – et aussi la ceinture …

A ceux qui se plaignent de leurs petites vivicitudes matérielles quotidiennes de 2004, il leur est servi matin, midi et soir par la presse, la radio et la télé nationale la geste héroïque de la résistance française de 1944, qui nous est donc présentée comme un exemple à suivre. Nos aieux en ont chié en 40 et ils n’en ont pas fait tout un flan. Car quand il l’a fallu, tout gonflés de rutabaga et d’esprit patriote, ils ont su s’unir pour faire face. Et « l’opposition » d’emboîter le pas à l’action psychologique de propagande du gouvernement puisqu’ils n’ont rien trouvé de mieux que de réclamer le retour au Programme du Comité National de la Résistance ! [2]

Bref, tout ça fleure bon l’Union Sacrée et le bourrage de mou … Car contrairement à la légende que l’on voudrait nous faire gober, les résistants n’était pas légion dans le « peuple français » et d’ailleurs beaucoup des résistants n’étaient même pas français !

Et en plus, un certains nombres n’étaient même pas des patriotes ! Rendez vous compte !

Nous vous livrons ci-après le témoignage d’un de ces résistants libertaires, Andre Saulière dit Arru qui – de Marseille à Toulouse, avec des compagnons sénégalais, juifs russes, italiens, espagnols, … – continua le travail de sape idéologique du système, sur des bases clairement anarchistes internationalistes.

Un exemple, très actuel en effet, pour ceux qui – comme nous – pensons que la Liberation totale, celle du capitalisme, n’a pas encore eu lieu …

MORT AUX VACHES !

TEMOIGNAGE de Jean René SAULIERE, alias André ARRU, ANARCHISTE ET RESISTANT …

(Fait à Marseille le 20 août 1970 )

Pacifiste et anarchiste militant, J’avais décidé, quelques années avant la mobilisation de 1939, de refuser toute guerre. Aux motifs connus des pacifistes et des révolutionnaires qui considèrent la guerre comme une solution pire que le mal que l’on prétend vouloir combattre, il faut ajouter mon caractère qui empochait toute concession que ce soit en faveur de la facilité ou de la famille. Mes actes devaient affirmer la sincérité de ma propagande passée. J’en étais conscient et il ne m’est même pas venu à l’idée de reculer. Il était aussi bien entendu que mon refus ne s’accompagnait nullement d’une soumission volontaire à l’arrestation qui devait s’ensuivre. Mes vues étaient de tenter d’y échapper pour pouvoir ainsi continuer ma lutte de pacifiste et d’anarchiste.

C’était du reste un point de vue commun dans les milieux libertaires et syndicalistes révolutionnaires de cette époque. Dans le seul groupe anarchiste de Bordeaux, quelques mois avant la mobilisation générale, nous étions une bonne douzaine dans ces dispositions. Mais nous n’avons été que deux à ne pas nous rendre, le 3 septembre 1939, et, deux jours après, je restais tout seul.

Je me cachai donc pendant cinq mois à Bordeaux, d’abord chez divers camarades et amis et puis, à bout de caches, je retournai chez moi. Pendant tout ce temps, je restais cloîtré le jour et sortais quelquefois la nuit. C’était pénible et le danger de me faire prendre augmentait de jour en jour. Après m’être procuré un livret militaire de réformé n°2 [3], je me décidai à partir pour Marseille où j’arrivai, le 13 février 1940, à 6 heures du matin. La première impression, en prenant pied à la gare Saint-Charles, fut très désagréable. J’étais parti de Bordeaux avec une température de plus vingt, j’arrivais à Marseille le lendemain en plein mistral avec moins cinq .

En descendant l’escalier monumental de la gare, je faisais le bilan de la situation un peu en frissonnant, mais pas seulement de froid. Je devais en effet me mettre en tête que je m’appelais bien André ARRU, que, malgré ma stature, j’étais réformé définitif et qu’il fallait que je me débrouille. Je n’avais, comme pièce d’identité, qu’un seul livret militaire un peu gratté, pas de travail, pas de logement fixe ; je n’avais jamais mis les pieds à Marseille ni dans la région. Je ne connaissais personne. Je ne pouvais oublier que mon vrai nom était porté sur un bulletin de recherches qui traînait dans toutes les gendarmeries et commissariats de France et qu’il fallait que j’évite toute maladresse. Par contre ma fortune se montait à 5 000 francs d’époque, cachés sur moi. C’était tout de même la possibilité de vivre plusieurs mois. J’allais louer une chambre à la journée au premier hôtel venu sur le boulevard d’Athènes.

Deux jours après mon arrivée, en traversant le square qui existait derrière la Chambre de Commerce, des « gardiens de la paix » (en 1940 !) ne demandaient mes papiers. Je sortais « mon » livret militaire, déclinais mes noms, prénoms, âge, profession, noms des père et mère et raison de ma présence à Marseille, sans bafouiller, mais le coeur en émoi. Je reprenais possession de « mon » livret ; les interlocuteurs étaient satisfaits. J’avais passé avec brio mon premier examen d’homme en rupture de ban.

Quelques jours après, je dénichais une chambre meublée à l’angle du boulevard Baille et de la rue de Lodi et, dans le un même temps me faisais embaucher comme employé-gérant d’un petit poste d’essence à Saint-Loup. Il y avait 5 000 francs de caution à donner immédiatement. Sous un prétexte quelconque, j’en donnais 4 500 ; il devait me rester une centaine de francs en poche. J’appris assez vite mon nouveau métier qui n’avait rien de commun avec mon passé de représentant. C’était dur par le travail lui-même et par sa durée. J’ouvrais à 6 heures du matin sans interruption jusqu’à 20 heures, mais ma « planque » ne paraissait bonne. Deux mois après, je trouvais une chambre à Saint-Loup. Je m’installais.

J’eus alors la chance d’entrer en relation avec un sympathisant libertaire d’origine italienne, François, qui ne présenta à d’autres. Ensuite, je me liais avec des réfugiés espagnols, libertaires pour la plupart, qui habitaient Saint-Loup. Tout ceci m’amena à connaître aussi des anarchistes français ayant milité avant la déclaration de la guerre.

Dans le même temps, un camarade de couleur noire, Armand, du groupe de Bordeaux, démobilisé de Syrie, vint se réfugier chez moi, ne pouvant rentrer en zone occupée. Avec lui, on commença à confectionner des papillons et des tracts tirés à la gélatine. On allait les glisser la nuit dans les boites aux lettres et les coller sur les poteaux de tramway. Puis l’essence fut rationnée, mon poste fut fermé et mon contrat suspendu pour cas de force majeure. Je demandais au propriétaire l’autorisation de monter dans son local un atelier de réparations de cycles. Nous parvînmes à un accord et, grâce au retour de ma caution, je pus m’acheter un peu de matériel. Je me fis inscrire au registre des métiers et, faisant mon apprentissage sur le tas, vaille que vaille, je réparais et montais des vélos.

Ainsi, je réussis à avoir normalement une carte d’identité puis, par un coup d’audace, un « duplicata » de ma sorte d’alimentation que je n’avais jamais une. À ce jour de ma vie, je n’avais jamais eu autant de papiers. J’étais en règle !

Petit à petit, avec beaucoup de passion et de conviction je réussissais à créer un groupe clandestin spécifiquement libertaire ; doublement clandestin je dois dire, puisque sa propagande attaquait le fascisme mais aussi tous les responsables de la guerre, le capitalisme et la dictature stalinienne. [4]

Je pris aussi des contacts avec l’extérieur, dans le Var d’abord ; ensuite, grâce au camarade Armand qui travaillait avec moi et qui m’aidait dans mon travail, je pus agrandir mon champ d’action. J’entrepris, au fur et à mesure de mes possibilités financières qui étaient maigres des voyages à Nimes, Lyon, Montpellier, Perpignan, Toulouse, Agen, Foix, Paris et sans aucun doute j’en oublie. Dans la plupart de ces villes, j’établissais des contacts dont la plupart furent conservés jusqu’à mon arrestation.

A Toulouse, deux imprimeurs, les frères Lyon , morts en déportation, qui étaient de conviction libertaire tout en appartenant et travaillant très activement pour la Résistance [5], imprimèrent nos affiches, tracts, une brochure de quarante-cinq pages intitulé « Les Coupables  » , le numéro un d’une revue intitulée «  La Raison  » [6]. Les affiches étaient surtout destinées à être collées à Marseille où notre groupe était vraiment actif. Tracts, brochure, revue ont été portés à tous les correspondants pour distribution à toute personne susceptible de s’intéresser à notre activité.

Voline, anarchiste russe, auteur (en français) de « La Révolution inconnue », emprisonné du temps des Tsars pour propagande révolutionnaire puis, sous Lénine, pour avoir été l’adjoint de Makhno , mis au courant de nos activités et de nos espoirs, se joignit tout de suite à nous, avec enthousiasme, ne rata pratiquement jamais une de nos réunions [7] Il voulait même coller des affiches [il avait alors plus de 60 ans !]. Il m’aida beaucoup dans la réalisation de la brochure « Les Coupables  » que j’allais d’autre part discuter avec Pierre Besnard, ancien secrétaire général de la CGT-SR (Confédération Générale du Travail Syndicaliste Révolutionnaire, section française de l’AIT) qui était réfugié à 6 km d’Agen.

Ainsi, en 1942, nous avons réussi à organiser un congrès anarchiste clandestin dont les membres se réunirent à Toulouse pendant deux jours chez le camarade Tricheux [8].

Il y avait là des délégués des groupes de villes déjà citées plus une représentation du Mouvement clandestin des libertaires espagnols de l’Ariège et de la Haute-Garonne. Voline, un camarade espagnol, San Clemente, et moi étions les délégués de Marseille.

Notre propagande se faisait sous l’étiquette de Fédération Internationale Syndicaliste Révolutionnaire et préconisait la Révolution par la grève générale, prélude à une nouvelle organisation sociale fondée sur la solidarité universelle des hommes en lieu et place de l’exploitation de l’homme par l’homme.

J’avais aussi une autre activité qui était maintenue, soutenue, développée par les contacts établis et qui dépassait très souvent les affinités philosophiques. Par un camarade d’Agen, j’avais pu me faire fabriquer une douzaine de faux tampons par les frères Lyon. J’avais eu des imprimés divers et je pouvais ainsi établir de : cartes d’identité, bulletins de naissance, actes de naturalisation, ordres de mission, etc. J’ai dû en faire quelques centaines. D’autre part, mon activité me mettant en liaison avec des tas de gens en difficulté, les pièces attenantes à mon atelier servirent souvent de refuge à des personnes recherchées : Juifs, réfugiés politiques. En relation avec les réfugiés tchécoslovaques qui résidaient au Château de la Blancherie à Saint-Loup, j’en sauvai plusieurs, traqués par les Allemands lors de l’invasion de la zone non occupée. Cela m’amena du reste à héberger pendant trois jours la femme russe (communiste) d’un député tchécoslovaque. Elle était recherchée tant par la police allemande que par celle de Vichy.

Mais un jour je commis une erreur, en me camouflant mal sans doute, après avoir accepté de faire de faux papiers à des Juifs (non révolutionnaires) que je ne connaissais pas mais présentés par des amis. Ils furent dénoncés et me dénoncèrent à leur tour lorsque, arrêtés, ils furent questionnés (mais non torturés) [9].

Mon atelier était fermé depuis le 1er août 1943. J’avais décidé de prendre quelques congés, ce qui me permettait, sous ce couvert, d’aller visiter les correspondants dans toute la partie de [l’ex]France non occupée. Le lendemain, un ami de Bordeaux, en difficulté parce que d’origine juive, était parti avec une dizaine de fausses cartes destinées à des personnes pourchassées du Lot-et-Garonne où il était lui-même réfugié.

Le 3 août, j’avais encore à mettre quelques papiers en fabrication et je venais de m’attaquer à un article destiné au numéro deux de « La Raison ». Sur l’évier de la cuisine, des boîtes en fer blanc, des éponges. Nous devions le soir même, à une dizaine de camarades, par équipe de deux, aller coller des affiches. Elles portaient en gros titre : « Mort Aux Vaches ! » [10]. C’est vers quinze heures que la police fit irruption chez moi et m’arrêta. Ma compagne, réfugiée politique espagnole, Julie Vinas, et un camarade anarchiste, Chauvet [11], qui travaillait avec moi, en rupture de S.T.O. [12] , arrivèrent quelques minutes après et furent à leur tour arrêtés. Les trois policiers, qui étaient des Renseignements généraux, furent affolés devant le matériel : tampons, tracts, affiches, brochures, papiers d’identité, etc.

Ils téléphonèrent – heureusement ! – d’un bistrot voisin pour demander des instructions à leur commissaire. Ce qui permit à tous les copains qui devaient, dans l’après-midi, prendre des affiches, d’être avertis à temps. C’est la police de Vichy du boulevard d’Athènes qui, avec une camionnette, vint prendre livraison du matériel et de nous [13].

Il était huit heures du soir. Nous fûmes transportés à l’Evêché. [14]

Chacune de nos feuilles d’écrou portait en rouge « à isoler, dangereux ». Ce qui ne fut pas fait car il n’ était pas prévu de cellules au dépôt. On nous sépara tout simplement : Julie avec les femmes, Chauvet dans une salle et moi dans une autre. J’étais avec un ivrogne [15].

Dans la nuit, Julie réussit à fléchir un gardien et à venir me voir. Puis ce fut cinq jours d’interrogatoire au boulevard d’Athènes, sans brutalités. Toutes les nuits, on nous ramenait à l’Evêché. Nous avons eu la chance de tomber sur l’équipe Mattei qui succédait à celle de Payan, qui avait une toute autre réputation. Enfin, de plus, en dehors des revers que commençaient à subir les armées allemandes, je crois que jouait en notre faveur le fait que les policiers avaient en face d’eux des gens qui n’étaient ni gaullistes, ni communistes. Les anarchistes sont réputés violents ou farfelus par ceux qui les méconnaissent. Comme la propagande trouvée, quoique révolutionnaire, était pacifiste, comme les perquisitions n’avaient fait découvrir ni bombe, ni armes d’aucune sorte, il semble bien que nous avons été classés dans la deuxième catégorie.

Ma compagne se défendit en jouant sur son état de santé déficient et sa méconnaissance de la langue française. Elle affirma ne s’occuper que de la cuisine et du linge. Chauvet, lui, déclara qu’il travaillait avec moi pour ne pas partir en Allemagne, ce qui était vrai, qu’il était anarchiste et qu’il approuvait ce que j’avais fait. On n’en tira rien d’autre. Quant à moi, je pris à ma charge tout ce que je ne pouvais pas nier. Au sujet de ce qui avait été trouvé et ramassé dans des valises lors de mon arrestation, je déclarai que c’était X, un « malconnu », qui les avaient entreposées. Au bout de cinq jours, les inspecteurs en avaient marre ; on tournait en rond ; on nous fit signer les procès-verbaux. Chauvet et moi étions écroués à Chave, Julie probablement à la prison des Présentines puis, quelques semaines après, comme elle était malade, aux consignés à l’hôpital de la Conception.

À Chave, on nous avait mis avec les droit commun. Dès que je sus qu’il existait un quartier où étaient réunis les politiques, je fis une réclamation au gardien-chef, faisant valoir nos inculpations : fabrication de faux tampons dans un but de subversion sociale, falsification de papiers français et étrangers, propagande antinationale et anarchiste. Mais il ne voulut rien savoir et je dus écrire au juge d’instruction, en accord avec Chauvet, pour que nous soyons transférés, une quinzaine de jours après notre arrivée, au quartier dit politique.

Le gardien qui nous prit en charge quand nous y arrivâmes nous demanda « Qu’est-ce que vous êtes, communistes ou gaullistes ? » – « Anarcho-syndicalistes » « Quoi ? Anarcho-syndicalistes ! … Ah ! Bon !… Bien !… Alors mettez-vous là » et il nous ouvrit une cellule vide qu’il referma derrière nous. Ainsi, nous sommes restés plusieurs semaines deux dans une cellule, ce qui est absolument interdit par le règlement !

Lors de la promenade suivante, nous fûmes bien accueillis par gaullistes et communistes. Nous étions à ce moment là une quarantaine environ. Je commis une gaffe dès le départ. Dans une discussion, j’affirmais que Pétain n’avait fait de bien qu’une chose : l’armistice. J’en suis toujours convaincu mais, dans le même cas, j’éviterais de le dire car les Gaullistes nous en ont tenu rigueur.

Plus tard, au début novembre, on nous proposa de commémorer l’anniversaire de la Révolution russe. Nous allions accepter lorsqu’on nous distribua des rubans tricolores pour parer nos revers de vestes ! Je ne me voyais pas, moi, l’insoumis, l’anar, me parer des couleurs de la patrie ; Chauvet pas davantage. Il en fût de même lorsque l’organisateur, questionné sur les chansons qui seraient entonnées, nous dit : « La Marseillaise et le Chant du Départ ». Et l’Internationale ? Ce n’était pas le moment et puis il ne fallait pas déplaire aux gaullistes, etc. etc. Alors tant pis, nous ne chanterions pas. Malgré ce et malgré notre rancoeur, nous décidâmes d’être présents à cette manifestation à titre de solidarité face à la chiourme [16] . Le 7, nous arborions donc une superbe cocarde, mais rouge et noire, et nous étions à côté des autres, mais nous n’avons pas chanté. Les communistes ne nous le pardonnèrent pas.

C’est pour cela que, lors de l’évasion de Chave, en mars 1944, nous n’avons pas été emmenés. Mais, à l’encontre des déclarations des évadés rapportées dans le livre de Madeleine Baudoin (Histoire des Groupes Francs de Marseille), nous n’avons pas été les seuls laissés pour compte. Le lendemain de l’évasion -je dois avouer que je n’avais rien entendu pendant la nuit, Chauvet non plus — nous nous retrouvions sept dans le quartier politique, soit : deux camarades socialistes, un communiste breton du nom d’Etiévant, un camarade âgé de 72 ans, impliqué dans l’affaire de l’attentat contre le Président de la Section spéciale d’Aix [17], Chauvet et moi, et enfin un communiste Colombani, qui était dans la cellule de Charles Poli, qui prétendait (entre nous) ne pas avoir pu s’évader. En fait, il n’avait pas voulu et le prouva par la suite.

Nous fûmes transférés à Aix deux ou trois jours après. Chacun de nous était enchaîné à un gendarme ; le reste du car était rempli de G.M.R. [18] armés de mitraillettes prêtes à l’emploi . Enfin, un autre véhicule nous suivait, garni aussi de G.M.R. armés. Notre arrivée à Aix fit sensation et nous avons quitté le car pour entrer en prison entre deux rangées de curieux.

Les détenus politiques de la prison d’Aix comprenaient assez mal que nous ne nous soyons pas évadés. Je fus clair et net : j’accusais Colombani d’être l’auteur du « choix » des évadés de Chave. Etiévant était de mon avis. Depuis, par le livre de Madeleine Baudoin, j’ai appris que le grand responsable était Charles Poli qui n’a pas voulu faire évader des détenus qui n’étaient pas patriotes. Sans aucun doute Charles Poli ne connaissait pas ses classiques du communisme. Il a confondu un grand virage avec la théorie mais ne connaissait-il, peut-être, que le grand virage ? Cette révélation m’a tout de même surpris, car je ne souvenais d’un Charles Poli très arrondisseur d’angles, jouant au diplomate tant avec les gardiens de prison qui défilaient prendre le vrai café dans sa cellule qu’avec les gaullistes ou encore avec moi-même, me demandant par exemple d’écrire un article pour le journal confectionné en prison, article qui fut écrit, qui passa non censuré et signé A.A.A. (André Arru, Anarchiste).

À Aix la vie était très différente de celle de Chave. Dans cette dernière prison,, nous étions à plusieurs, de deux à cinq, dans des cellules qui avaient été prévues sous Napoléon comme individuelles. Chez les droit commun, ils étaient jusqu’à neuf. À partir de septembre ou octobre 1943, on nous ouvrait les cellules le matin et on ne les refermait que le soir. Nous pouvions donc discuter, jouer aux cartes ou aux échecs, nous promener dans l’espèce de pas perdus qui était entouré de cellules et fermé par une grille. Nous pouvions aussi rester dans notre cellule à lire, écrire ou dessiner.

À Aix, nous étions toute la journée dans une cour attenante à ce qu’on appelait le « chauffoir », salle où on mettait nos affaires (c’est comme cela que j’y ai attrapé des poux de corps) et où on mangeait. Le soir, en montait dans des dortoirs qui réunissaient plus ou moins de détenus. Les laissés pour compte de Chave avaient été mis ensemble dans l’un d’eux, sauf le dénommé Colombani qui avait préféré éviter notre rogne. Un jeune camarade gaulliste (Alexandre ?), qui avait été transféré à Aix avant l’évasion de Chave, était aussi avec nous. Il faisait partie d’une équipe qui avait été arrêtée et emprisonnée à Lyon (à Montluc si mes souvenirs sont exacts). Après avoir été en désaccord avec moi à Chave (c’est lui qui m’apprit ma gaffe sur l’armistice), il m’avoua s’intéresser à nos idées et vouloir mieux les connaître. Notre conduite, nos raisonnements, lui paraissaient beaucoup plus conformes à nos idées que ceux des communistes qui avaient pu passer de l’internationalisme antifasciste au pacte germano-soviétique, puis à l’ultra-patriotisme français,

Ce camarade voulut tout tenter pour s’évader. Il était en prison depuis dix-huit mois et craignait, après son jugement, de ne pouvoir le faire. Une nuit, il simula une crise d’appendicite. C’est moi qui appelai le gardien, expliquai les souffrances du détenu qui ne cessait de gémir. Il fut transporté d’urgence à l’hôpital d’Aix. Il pensait qu’il pourrait plus facilement s’enfuir de là-bas. Hélas, son jeu avait tellement convaincu le chirurgien qu’il fut opéré et nous apprîmes sa mort, au maquis, après notre évasion. J’en eus une grande peine car nous avions fortement sympathisé. De plus, j’enrageais qu’il ait raté cette évasion, lui qui ne pensait qu’à cela. Enfin, ce corps jeune, sain, qui ne résiste pas à une opération assez bénigne me laisse encore, lorsque j’y pense, un malaise, d’autant plus que le chirurgien était, parait-il, un collabo.

En ce qui me concerne et pour la plupart des détenus politiques, notre fuite d’Aix fût une bonne surprise. Un jour, dans une conversation, un camarade communiste me demanda si je participerais à une évasion dans le cas où cela ne présenterait. Je lui répondis que j’étais prêt à tout instant, ne serait-ce que pour faire la nique aux geôliers, mais qu’hélas en ayant raté une récemment, je ne pensais pas qu’une si belle occasion ne renouvellerait de sitôt. «  En tout cas, me dit-il, si cela se produit, nous, nous ouvrirons les portes pour tout le monde ».

Dans la nuit du 24 au 25 août 1944 – il devait être 3 heures – les verrous et la serrure de la porte de notre dortoir se mirent en branle. Je crus qu’on venait nous chercher pour nous transférer ailleurs ; le bruit en avait couru. Mais, à la place d’un aboiement de gardien, une voix amie nous disait : «  ne faites pas de bruit, n’allumez pas la lumière ; que ceux qui veulent partir avec nous s’habillent. Dépêchez-vous !  » Nous sommes tous partis sauf le vieux camarade italien qui, vu son âge, ne pouvait pas suivre et, dans le dortoir voisin, le fameux Colombani qui, une fois de plus, refusa de s’évader ! Un de ses camarades communistes avait une sérieuse envie de lui faire un mauvais sort ; de rage, il le verrouilla dans le dortoir.

Nous fines le tour de la prison par les couloirs à la queue-leu-leu, jusqu’à l’escalier qui menait à la chambre des gardiens. La nuit, ils étaient quatre. L’un était notre complice [19]. Des camarades armés allèrent ligoter les autres. Toujours dans le plus grand silence nous tenant par la main, on s’engagea dans le souterrain qui relie la prison au palais de justice qui mène à la grande salle des pas-perdus. On traversa cette dernière, on était dehors où nous attendaient des camarades de la Résistance plus ou moins armés. On parcourut la ville à une quarantaine dont trente évadés. Il devait être 4 h 30. On rencontra une seule personne, un employé de trams qui dû nous suivre pendant environ une heure.

C’est à travers les chemins de colline que nous sommes allés rejoindre un point prévu, la forme de Lambruisse, au-dessus de Vauvenargues, soit à 25 ou 30 km. La journée était chaude, le ciel d’un bleu sans faille, les senteurs de la colline enivrantes pour des hommes qui étaient restés de six mois à deux ans en prison. Malgré notre joie, la journée fut rude car nous manquions d’entraînement et nous n’avions ni à manger ni à boire Partis à 4 heures, nous sommes arrivés à 18 heures après avoir laissé en route, dans des taillis, deux camarades, l’un des socialistes, pris de malaise, et Paul, un communiste atteint d’une maladie de coeur. Le lendemain des camarades de la Résistance nous les amenaient.

Arrivés à la forme de Lambruisse, le couple de métayers qui nous recevait, d’origine italienne, était libertaire ; Chauvet les connaissait ayant milité avec eux avant guerre. En arrivant, nous eûmes droit chacun à trois au quatre pommes de terre bouillies, ce qui était déjà un régal à cette époque de plein rationnement et aussi parce que nous n’avions pas mangé depuis la veille 16 heures. La première nuit, nous fûmes répartis entre grange et étable. Le lendemain, nous prenions le maquis au-dessus de la ferme.

J’appris là , au fil des jours, une partie de l’histoire de notre évasion Comme à Chave, il y avait un gardien qui y participait, mais les prémisses valent la peine d’être contés. A Aix, il y avait, détenu de droit commun, un membre d’une famille de gangsters notoires de Marseille (un Guerini, ne semble-t-il qui tenait une boîte, rue Vacon). Il avait été ramassé pour une histoire de recel de bijoux. Ce détenu avait des « droits » inhérents à sa personnalité. Il se promenait librement dans la prison, vêtu richement, exhibant oignon [montre] en or, chaîne et bagouses. Il sortait aussi de prison plusieurs fois par semaine – accompagné par un gardien, il est vrai – pour faire des achats pour l’économat. Il n’oubliait pas de venir faire sa petite ballade quotidienne au quartier politique et bavarder avec les uns et les autres, surtout avec ses compatriotes [Corses ?]. Il raconta à l’un d’eux, Santucci (communiste, membre des F.T.P.). qu’il avait des histoires avec un gardien qui cherchait à lui faire enlever ses passe-droits, mais qu’il avait les manches assez longues et que le bonhomme allait voir ce qu’il allait voir. Plus tard, il lui confia encore qu’il allait faire passer ledit gardien en conseil de discipline. Santucci qui avait, au fur et à mesure, mûri son plan, avertit le gardien en question, lui fit des propositions et, après acceptation, le mit en relation avec la Résistance. Un condamné de droit commun, qui en avait pour vingt ans et était à ce moment-là au cachot, fut mis dans le coup. Le secret bien gardé, l’affaire se déclencha dans la nuit du 24 au 25 avril 1944 Cette nuit là, « notre » gardien était de service. Lors de la ronde qui se faisait à deux, il s’attarda et, en vérifiant verrous et serrure, laissa le verrou du guichet à judas (pisté) ouvert ainsi que celui situé au bas de la porte du détenu au cachot. Ce dernier, muni d’une clé précédemment entrée en fraude, ouvrit sa cellule en passant le bras par le guichet, fit jouer le verrou du haut, vint ouvrir le dortoir de Santucci, puis ce fut le tour des autres, le ligotage des gardiens et le départ.

Le plan avait fonctionné à merveille. Le gardien-chef avait un logement au deuxième étage. Il donna l’alerte à 5 heures du matin m’a-t-on dit. Il était enfermé dans sa prison, nous, nous étions en train de cheminer dans les collines. Ce fut une journée merveilleuse et, chaque fois que je m’y reporte, une pensée reconnaissante va vers les organisateurs de l’évasion.

Notre maquis fut d’attente et sans histoire. Malgré les difficultés, le ravitaillement pour les trente personnes fonctionna au mieux de ce que l’on peut demander en ce cas. Des responsables F.T.P. vinrent nous voir et nous demander si nous désirions faire partie d’un maquis ou nous débrouiller par nos propres moyens. Chauvet et moi avons choisi cette dernière solution et, après trois ou quatre semaines de séjour, nous étions amenés dans une camionnette, munis de faux papiers et de quelques tickets d’alimentations, jusqu’à Meyrargues. C’était le soir ; pas de place à l’hôtel. On y mangea tout de même, puis nous avons couché dans un wagon du petit train qui sillonnait alors la Provence de part et d’autre. Le lendemain, Chauvet partait rejoindre un ami dans le Vaucluse, moi un autre à Lorgues (Var). C’était un camarade du groupe clandestin de Marseille qui devait coller des afficher le soir de mon arrestation. Il me reçut à bras ouverts. Grâce à lui, je fis connaissance d’un chef de service de la mairie de Draguignan, qui me procura des papiers très officiels. Je restai un mois. Ma compagne Julie, qui avait été libérée six mois après notre arrestation, vient me rejoindre. J’avais décidé de partir sur Toulouse.

Pour éviter Marseille, nous voulions emprunter la petite ligne de Provence, par laquelle j’étais arrivé, pour rejoindre Avignon ; mais le maquis la fit sauter la veille. Nous étions prêts ; il fallait vraiment s’en aller ; nous avons donc été prendre le train à la gare des Arcs. Une surprise nous y attendait. D’abord trois jours d’attente, les lignes ayant été bombardées ; puis, le jour de notre départ, sur les quais de la gare, nous aperçûmes les photographes de la brigade du boulevard d’Athènes qui prenaient le même train que nous ! Nous avons attendu qu’ils soient montés pour prendre le wagon le plus éloigné. Nous savions qu’il était impossible de se déplacer en cours de voyage, les trains étant plus que bondés.

Nous étions en fin Juin 1944. Arrivés à Marseille, nous avons été obligés d’y passer la nuit et, la chance nous aidant, nous avons trouvé de la place à l’hôtel Terminus. Le lendemains nous prenions le train pour Toulouse ; il mit dix-sept heures pour faire le trajet.

Là, je repris contact avec mes camarades, Ils n’avaient pas été inquiétés du fait de notre arrestation ; personne, du reste, ne le fût. Je ranimai le groupe clandestin en sommeil et la libération de Toulouse, en août 1944,. nous trouva prêts. Un tract était imprimé et distribué pendant les jours mêmes de départ de l’armée allemande.

Quelques jours après je devenais secrétaire à la propagande des Jeunesses Syndicalistes Révolutionnaires, secrétaire adjoint du syndicat des employés de la Haute-Garonne puis, un peu plus tard, secrétaire national de la Solidarité Internationale Antifasciste (SIA). Ce qui ne m’empêchait pas d’être animateur du groupe anarchiste.

Au mois de mai 1945, je réintégrai Marseille.

En 1948, je fis opposition à mon jugement par contumace d’insoumis et fus à nouveau condamné à cinq ans de prison, mais avec sursis. Le tribunal, malgré sa sévérité m’a-t-on dit, avait tenu compte du dossier que j’avais fourni comprenant dix-huit attestations de personnes qui avaient connu mes activités ou y avaient participé.

J’avais le droit de faire amnistier cette condamnation. J’ai refusé de m’en occuper car il eut fallu que je fasse des démarches qui me déplaisaient.

Elle représente du reste pour moi ce que d’autres accordent à leur Légion d’honneur.

Quoique ayant assez bien prévu que la fin de la guerre ne serait pas le règne de la justice sociale, je pensais à une évolution constante, croyant que les hommes tiendraient compte des leçons de l’histoire. J’étais naïf. J’ai bien peur de ne plus l’être autant. Malgré ce, je ne regrette rien ; plus exactement, je suis content de ce que j’ai fait. À refaire, je recommencerais mais, à l’encontre des autres, je n’oublierais pas certaines leçons (i)


[1] à tel point qu’il a nommé un ministre à cet effet ! on croit rêver ! La cohésion sur décret …

[2] qui au passage se résume par ces mots de Thorez : Produire, produire et encore produire …

[3] C’est un de ses amis, ARRU, qui avait donné à Jean SAULIERE son livret militaire de réformé n°2.Marcel André ARRU était né le 15 février 1909 à Bordeaux Gironde). Chauffeur. Décédé le 22 septembre 1970, à Bordeaux.

[4] Ce groupe libertaire comprenait une dizaine de membres.

[5] Les frères LION, imprimeurs à Toulouse, rue Croix-Baragnon, imprimaient aussi les tracts et périodique du mouvement « Combat  ». La place devant la Halle aux Grains porte aujourd’hui leur nom

[6] La brochure «  Les Coupables  » a été imprimée en 1943 à 1 000 exemplaires environ. Elle porte comme en-tête : Fédération Internationale Syndicaliste Révolutionnaire.

La revue « La Raison  » (n°1) a été imprimée en juin 1943 à 2000 exemplaires environ. Elle porte en sous titre « Organe de la Fédération Internationale Syndicaliste Révolutionnaire  ». Le sommaire propose les articles suivants : La raison de « La Raison » ; Cette fois, c’en est fini ! ; La forêt de Katyn ; Histoire : un peu d’histoire de la Révolution espagnole ; Syndicalisme : les leçons du passé.

[7] Vsévolod Mikhaïlovitch Eichenbaum, dit Voline, était né le 11 août 1882 dans le gouvernement de Voronèje (Russie). Décédé le 18 septembre 1945 à Paris.

[8] Militant anarcho-syndicaliste de la CGT-SR de Toulouse

[9] Il n’agit de Jacob GRINDLINGER, né le 18 octobre 1896, en Pologne, et de son épouse Frédérique GRINDLINGER, née le 25 avril 1904, en Pologne. Tous deux de rationalité autrichienne. Sans enfant. Ces personnes avaient été dénoncées à la police par lettre anonyme signalant qu’elles étaient munies de fausses pièces d’identité (Rapport du 7 août 1943 du Commissaire de police de Sûreté Robert MATTEI de la Section des Affaires politiques de la IXe Brigade régionale de la Police de Sûreté. Référence : Archives départementales, Marseille).

[10] « … L’en-tête de l’affiche « MORT AUX VACHES » était surtout fait pour attirer l’oeil du passant. Les « vaches » que nous désignions ainsi étaient les chefs d’état HITLER, MUSSOLINI, FRANCO, STALINE, PETAIN, CHURCHILL, ROOSEVELT, leurs généraux, leurs complices. Ils nous apparaissaient les uns et les autres responsables de la guerre et des horreurs qui en découlaient. En 1977 [date de relecture du manuscrit par ARRU – NDLR] pour moi cette idée s’est affermie. … »

[11] Etienne Charles Simon CHAUVET est né le 21 novembre 1896, à Lyon (Rhône). -Monteur en charpentes métalliques. A participé activement aux colonnes confédérales lros de la Révolution espagnole de 1936. Au cours de notre entretien du 18 avril 1977 à Marseille, Etienne CHAUVET nous a dit grand bien d’André ARRU et nous a précisé ceci « je n’ai pas fait grand chose pendant la guerre mais j’ai été en prison. Je n’aime pas trop que l’on parle de moi dans les livres. ». [Il semble s’être éloigné du mouvement libertaire après la guerre.]

[12] S.T.O. : Service du Travail Obligatoire institué par la loi n° 106 du 16 février 1943.[Les requis devaient partir travailler en Allemagne, pour le bénéfice de la machine de guerre Hitlérienne]

[13] Il s’agit de la Neuvième Brigade mobile, 20 boulevard d’Athènes à Marseille

[14] L’Evêché : Hôtel de police, sis rue del’Evêché

[15] La loi n°3515 du 14 août 1941, instituant les Sections Spéciales, réprimait l’activité communiste ou anarchiste.

Voici le texte de l’article Premier de ladite loi :

« Nous,, Maréchal de France,, chef de l’Etat français ; Le Conseil des Ministres entendu ;

DECRETONS :

ARTICLE PREMIER. – Il est institué auprès de chaque tribunal militaire ou de chaque tribunal maritime une ou plusieurs sections spéciales auxquelles sont déférés les auteurs de toutes infractions pénales, quelles qu’elles soient, commises dans une intention d’activité communiste ou anarchiste.

Dans les parties du territoire où ne siégeraient pas de tribunaux militaires ou maritimes, la compétence des sections spéciales prévues à l’alinéa ci-dessus sera dévolue à une section de la cour d’appel qui statue sans énonciation des motifs en se prononçant seulement sur la culpabilité et la peine. »

[16] La chiourme : les gardiens de prisons

[17] Il s’agit de l’attentat commis par la M.O.I. (Main-d’Oeuvre Immigrée) contre Henri Verdun, président de la Section spéciale de la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

[18] G.M.R. : Groupes mobiles de Réserve, institués par le Gouvernement de Vichy en 1942, après la démobilisation de l’armée de l’armistice et le licenciement d’une partie de la Gendarmerie. Les G.M.R. furent utilisés dans la lutte contre les « terroristes rouges » et les maquisards. Endoctrinés par la Révolution nationale pétainiste, bien entraînés, les G.M.R. furent redoutables. A la Libération, les G.M.R. faits prisonniers par la Résistance, furent promptement libérés par le gouvernement proviroire, soucieux de ne rien perdre des « forces de l’ordre ». Quelques mois après, les G.M.R. furent intégrés dans les C.R.S. (Compagnies Républicaines de Sécurité) par le Ministre del’intérieur, le socialiste Jules MOCH.

[19] René NAVARRE, surveillant, qui devait prendre la fuite avec les évadés.