C’est la sixième fois que nous commémorons cet événement depuis la naissance de notre groupe. Nous le faisons tout en confrontant et en désapprenant ce que nous avons absorbé des grandes luttes sociales du mouvement ouvrier libertaire mondial tout au long de l’histoire humaine et anarchiste.
Nous puisons notre inspiration dans notre parcours révolutionnaire, qui a débuté au cœur du soulèvement de 2018 visant à renverser le régime – un parcours qui a traversé l’horrible massacre du sit-in, la prise en charge de la révolution populaire par les partis politiques, leurs négociations avec le conseil militaire dictatorial, leur accord de partage du pouvoir et les conflits internes qui ont conduit au tristement célèbre coup d’État du 25 octobre – et, plus récemment, la guerre autoritaire sanglante du 15 avril, qui a engendré l’une des pires crises humanitaires de l’histoire moderne.
Vos camarades continuent de se battre avec courage, brandissant haut l’étendard de la liberté, enracinant les valeurs anarchistes et préservant le groupe en ces temps catastrophiques. Nous nous souvenons de nos martyrs tombés en secourant des victimes de guerre, de nos camarades qui ont perdu leurs maisons, des personnes déplacées et de celles qui continuent de se battre avec acharnement au Soudan.
Notre lutte mérite une documentation précise, afin de s’ajouter aux expériences libertaires plus vastes du monde, et plus particulièrement de l’Afrique, ce continent empêtré dans des conflits autoritaires clairs et divers. Nous avons appris que notre combat contre l’autorité doit être global :
Économiquement, en résistant au capitalisme, à l’esclavage salarié, au travail des enfants et à l’exploitation des femmes comme main-d’œuvre bon marché ; politiquement, en résistant aux systèmes totalitaires, aux dictatures militaires et au fascisme ;
Culturellement, en démantelant les principaux piliers des régimes autoritaires dans les États africains : le tribalisme et les divisions ethniques ;
Globalement, en empêchant nos peuples de devenir des rats de laboratoire dans les luttes de pouvoir mondiales.
Le Soudan, terre riche de culture et d’histoire ancienne, est soumis à la domination des autorités traditionnelles et militaires depuis le colonialisme britannique, ce qui a ouvert la voie à une politique de dépendance qui perdure encore aujourd’hui. Suivant le nouveau modèle mondial de démantèlement des peuples par la création de milices, le régime fasciste a donné naissance aux milices Janjawid, responsables de massacres effroyables à Khartoum, Al-Jazirah, Wad Al-Noora, Omdurman, Sennar et El-Fashir, ville qui continue d’être bombardée et soumise à un nettoyage ethnique.
À El-Fashir, nous avons perdu le camarade Omar Habbash, un médecin anarchiste héroïque qui a insisté pour rester soigner les blessés au milieu des bombardements systématiques et du génocide.
Nous nous souvenons également de la camarade Sara, tuée dans un attentat à Khartoum – Sara, qui a toujours rêvé d’un mouvement féministe fort et non autoritaire, d’un véritable front anarchiste et libérateur rejetant l’impérialisme, comprenant l’essence même de la lutte et capable d’atteindre ses objectifs et de libérer les femmes de notre pays des rouages, de l’idéologie et de la propagande du pouvoir.
Alors que nous continuons à résister – en soignant nos camarades volontaires blessées dans les zones dangereuses, en évacuant celles qui sont prises au piège dans les zones de conflit, en soutenant les moyens de subsistance des camarades déplacées et sans abri à l’étranger, en écrivant, en documentant et en construisant des projets d’autosuffisance – nous sommes profondément reconnaissants à tous ceux qui nous ont soutenus. Votre solidarité atténue la brutalité de la mort, des déplacements et des meurtres. Même les plus petites contributions ont un impact considérable – elles sauvent la vie de nos camarades et défendent leur droit à l’existence en tant qu’êtres humains.
Aujourd’hui, nous vous adressons la parole avec l’espoir que cette guerre, qui a détruit la vie de millions de personnes, les a déplacées, tuées et a alourdi leur existence, prendra fin. Nous promettons à nos camarades du monde entier que nous continuerons à lutter pour la liberté et l’anarchisme jusqu’à notre dernier souffle.
Soutenez notre expérience.
Soutenez notre lutte.
Nous luttons pour une société anarchiste libre.
Groupe Anarchiste du Soudan
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