Les prud’hommes ne défendent pas les travailleurs, ils les jugent.
samedi 26 octobre 2002
[Cet article a été publié à une époque où pour faire croire que les tribunaux prud’hommaux étaient une instance démocratique, il état laissé à chaque collège d’électeur (patrons, salariés) l’illusion de choisir leurs juges en les élisant. Depuis la nouvelle loi travail de Macron-Hollande et cie, l’Etat ne s’embarrasse plus d’alibi démocratique ni d’organiser des élections coûteuses et inutiles. Les juges prud’hommaux sont désignés par le Ministre de la Justice et celui du Travail sur proposition des organisations de collaboration de classe que sont les syndicats institutionnels de salariés et les associations patronales. Cela ne fait que renforcer notre analyse que les Prud’hommes ne défendent pas les travailleurs mais qu’ils les jugent, analyse à lire ici : https://cnt-ait.info/2024/11/22/prudhommes-jugent ]
A peine ont-ils fini de nous appeler aux urnes pour les présidentielles, qu’ils enchaînent avec les législatives. Et quand vous croyez que c’est fini ; non, il n’en est rien : on vous sort les prud’homales. Pour ces dernières, la campagne sera plus discrète : moins d’argent et de pouvoir sont en jeu. Quoique : ces élections permettent de nourrir des milliers de permanents syndicaux, soit qu’ils siègent aux prud’hommes, soit qu’ils assurent la « défense » des travailleurs devant eux. Dans tous les cas, cela fait rentrer de l’argent dans la caisse.
Très souvent, le « Conseil des Prud’hommes », c’est comme ça qu’on appelle le petit tribunal qui gère les désaccords dans le secteur privé entre patrons et salariés, est présenté comme le lieu où l’ouvrier peut enfin se défendre et obtenir réparation pour les torts qu’il a subi. Tout d’abord, il faut dire que, si les gens ont recours aux Prud’hommes, c’est qu’ils n’ont pas un rapport de force suffisant en leur faveur dans l’entreprise. Par exemple, quand un patron refuse de payer les heures supplémentaires à quelqu’un, si les travailleurs sont unis, le salarié spolié n’aura pas besoin d’aller quémander auprès des prud’hommes : une simple « visite » collective dans les bureaux suffira le plus souvent, sinon, l’enclenchement d’une lutte fera regretter au patron sa malhonnêteté. C’est quand il n’y a pas de lutte, quand on est isolé, quand on est sur le reculoir, quand on ne peut pas faire autrement que l’on se retrouve devant les prud’hommes. A partir de là, préparez vous à la paperasse et à la chicane. D’abord, il ne faut pas être pressé. Une « affaire » peut traîner, un an, deux, trois. Mais quand elle passe devant le tribunal, elle est expédiée en quelques minutes. Et surtout, elle est jugée en application de textes de lois qui sont essentiellement en faveur du patron. Autrement dit, après avoir attendu des mois, tout ce que vous pourrez espérer c’est de récupérer une partie de ce que le patron vous a volé (heures impayées…), parfois accompagné d’un petit dédommagement et … c’est tout. C’est ça qu’on appelle « gagner » aux prud’hommes ! Autrement dit, les prud’hommes ne font ni plus ni moins que ce que fait n’importe quel autre tribunal. Si, pour une fois les prud’hommes « laissaient parler leur cœur » et sortaient de la droite ligne juridique, le patron ferait appel et dans ce cas ce sont des magistrats professionnels qui trancheraient. Est-ce la peine alors de donner un vernis démocratique à cette institution en élisant des « conseillers ouvriers » ?
UNE PETITE VISITE S’IMPOSE.
Pour en savoir plus, le plus simple est d’aller passer deux ou trois matinée aux prud’hommes de votre secteur. L’entrée est libre et gratuite. Vous y entendrez sûrement, comme je l’ai entendu, un avocat -que nous appellerons A- défendre un ouvrier, presque avec des larmes aux yeux- Et un avocat B défendre avec conviction le patron. Et, une heure après, dans une affaire parfaitement identique, l’avocat A défendre avec énergie le patron avec les mêmes argumenta qu’avait B dans la première affaire, pendant que l’avocat B défendait l’ouvrier avec arguments de A , comme s’ils avaient échangé leurs plaidoiries ! Le tout, sous l’œil impassible des conseillers, manifestement habitués à ce cirque. Vous verrez que vous n’arriverez pas à distinguer, à travers leurs propos, les « conseillers patronaux » des « conseillers syndicalistes » ! Vous verrez aussi ce que « gagnent » réellement les ouvriers dans ce genre de procès, quand ils gagnent. Je vous assure, tout cela est réellement instructif !
Après ça, quiconque a un cerveau en état de fonctionnement ne peut que tirer une conclusion : pas une voix pour les apprentis-juges « syndicaux ». Abstention !