Le film Barbie est incontestablement un succès commercial. Certains – notamment à gauche –voudraient aussi nous faire croire que c’est un succès politique, un film résolument féministe. En effet dans le film, la poupée de Mattel, se rebelle contre sa condition, monte dans sa décapotable rose et, après s’être aventurée dans le « monde réel », apprend non seulement comment les femmes sont contrôlées par le patriarcat, mais aussi leur potentiel de puissance. Pour nos « néo féministes », Barbie est une source d’autonomisation pour les filles, reflétant souvent leurs ambitions professionnelles – pensez au chirurgien Barbie, à l’officier Barbie, à l’astronaute Barbie et à la présidente Barbie. Mais il y a une Barbie que vous ne verrez jamais, ni dans le film, ni dans les rayons des magasins : la Barbie ouvrière !
Et encore moins ces travailleuses qui ont dû soumettre leur corps aux quotas de production de Mattel sur les chaînes d’assemblage de poupées Barbie dans la province du Guangdong, en Chine.
La pauvreté pousse les femmes des provinces rurales de Chine à travailler et à vivre dans les usines que Mattel et d’autres grandes entreprises de jouets utilisent pour sous-traiter leur production. Selon China Labor Watch, soit ces usines n’ont pas de syndicat, soit des syndicats existent mais sont inopérants, et les lois protectrices du travail peuvent être ignorées.
Les blagues « audacieuses » de la réalisatrice Gerwig sur les normes de genre n’ont aucun rapport avec les femmes condamnées à la production de masse de poupées Barbie, où le vacarme des machines est implacable, les yeux et la peau sont exposés à des produits chimiques nocifs et le harcèlement sexuel est monnaie courante.
Confinées à un poste de travail, les femmes effectuent la même tâche manuelle (faire fonctionner une machine d’injection de moules plastiques, coudre des vêtements ou attacher des parties du corps à chaque poupée) 10 heures par jour, six jours par semaine. Il s’agit d’un travail épuisant et abrutissant, qu’elles doivent accepter sous la contrainte économique brutale alors que l’alternative est souvent la faim. La devise de Barbie tirée d’une campagne publicitaire de 1985, « Nous, les filles, pouvons tout faire », ne s’applique pas à ces femmes. La pauvreté les piège en tant que main-d’œuvre exploitable.
Depuis plusieurs années, Mattel a élargi sa gamme de produits au nom de l’inclusivité : d’où la large gamme de couleurs de peau de poupée Barbie, sans oublier la Barbie LGBTQ+, la Barbie en fauteuil roulant, la Barbie courageuse qui subit une chimiothérapie, la Barbie avec un appareil auditif et la Barbie trisomique.
Mais une Barbie dont nous pouvons être sûrs qu’elle ne sera jamais produite est la Barbie de l’usine du Guangdong, en bleu de travail …
L’actrice principale, Margot Robbie a reçu 12,5 millions de dollars pour son rôle principal dans le film et devrait gagner 37 millions de plus en tant que productrice associée. Selon une enquête menée en 2020 par China Labor Watch, les travailleurs de Changan Mattel, dans la province du Guangdong, sont payés 2 dollars de l’heure. Pour gagner le salaire de Robbie, chaque travailleur devrait travailler 6 250 000 heures. Compte tenu de leurs journées de travail de 10 heures six jours par semaine, cela équivaut à plus de 2 000 ans de travail aliénant.
La mise en scène saturée de rose dans le film Barbie remplit la même fonction que l’emballage de Barbie dans une boîte rose : elle sépare la marchandise des sombres origines de sa production.
De plus, le film ignore le bilan de l’entreprise en matière de pollution plastique. Avec environ 60 millions de Barbie vendues chaque année, le Yale Environment Review estime que cette production génère des émissions équivalentes à la combustion de près de 1,5 MILLIARDS de litres d’essence. Et peut-être devrions-nous regarder au-delà de Barbieland vers la décharge de Barbie : combien de millions de poupées aux membres et aux cheveux manquants ont fini flottants dans les Océans de plastique ?
Ce film que certains voient comme une critique sociale n’est que feinte dissidence et spectacle. Surtout il ne faut pas que la marchandise ne soit pas remise en cause … A la fin c’est la Marché qui gagne, de toute façon.
Et ce qui vaut pour les ouvrières du Guandong en Chine est tout aussi valable ici pour toutes les ouvrières et le ouvriers, ces fameux « premiers de cordée / corvée » qu’on nous a tant vanté pendant le Covid, celles et ceux sans qui tout s’arrête mais qui continuent d’être exploités dans des conditions indignes. On nous a demandé de les applaudir, pour mieux les oublier aussitôt, jamais ils ne feront l’objet de films glamours – ni même satiriques.
Mais parce que l’exploitation c’est pas du cinéma, il est grand temps que les exploitées et les exploités du monde entier s’unissent pour déchirer l’écran du spectacle et commencent enfin à écrire le scénario de leur propre histoire, sans metteur en scène politique ni régisseur policier … pour une révolution libertaire, égalitaire et solidaire !
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