Le Mandarom a été détruit. A quand le Sacré-Coeur ? VIVE LA COMMUNE !


Alors que l’on parle dans les milieux du Pouvoir de classer le Sacré Coeur au titre des Monuments historiques, nos archéologues militants ont exhumé un texte que nous avions diffusé pour les journées du patrimoine de 2002 mais qui garde toute son actualité


Le cadavre est à terre mais l’idée est debout


LA BASILIQUE DU SACRE COEUR

L’église du Sacré Coeur est un condensé de toute la superstition et de l’opposition à la laïcité exercées par la chrétienté. C’est d’abord, en entrant à gauche, une plaque commémorative qui témoigne d’une action divine : dans la nuit du 20 au 21 avril 1944 treize bombes éclatèrent dans les parages sans faire de victime. Une protection divine à n’en pas douter : la plaque atteste là d’une « intervention manifeste de la providence ». Il n’ est pas écrit pourquoi en cette période agitée de l’Histoire, « Dieu » choisit de procurer ses bienfaits à une église parisienne plutôt qu’aux millions de juifs enfermés et exterminés dans les camps nazis …

Plus loin, du côté gauche de la nef, une plaque affiche avec fierté la déclaration d’utilité publique, par l’Assemblée Nationale le 24 juillet 1873. Ce fut l’acte de naissance de la basilique actuelle construite en réaction à la Commune de Paris de 1871. Sachant que le mouvement avait été réprimé dans le sang par Thiers, il est en fait peu surprenant que l’Etat ait poursuivi son oeuvre par la construction à ses frais d’une église dans le 18ème arrondissement.

L’épisode de la Commune n’est à aucun endroit mentionné dans l’Eglise alors qu’il est l’événement déclencheur de sa construction. Seul le texte du voeu national au Sacré Coeur, adopté en 1872, du côté droit de la nef, y réfère de façon insidieuse :

LE VOEU NATIONAL DU SACRE-COEUR ET SA SIGNIFICATION

[Chaque phrase du voeu ci-dessous est accompagnée de sa « traduction », pour remettre ce texte dans son contexte]

En présence des malheurs qui désolent la France et des malheurs plus grands peut-être qui la menacent encore.

[Traduction : Pour expier les crimes de la Commune et prévenir de nouveaux troubles révolutionnaires]

En présence des attentats sacrilèges commis à Rome contre les droits de l’église et du Saint siège, et contre la personne sacrée du vicaire de Jésus Christ.

[Trad. : Pour protester contre la suppression des États Pontificaux à Rome.]

Nous nous humilions devant Dieu, et réunissant dans notre amour l’Eglise et notre patrie, nous reconnaissons que nous avons été coupables et justement châtiés.

[Trad. : Nous courbons l’échine pour attirer à nous les naïfs et les serviles.]

Et pour faire amende honorable de nos pêchés et obtenir de l’infinie miséricorde du Sacré Cœur de Notre Seigneur Jésus Christ le pardon de nos fautes, ainsi que les secours extraordinaires qui peuvent seuls délivrer le Souverain Pontife de sa captivité et faire cesser les malheurs de la France nous promettons de contribuer à l’érection à Paris, d’un sanctuaire dédié au Sacré Coeur de Jésus.

[Trad. : Et pour faire oublier nos innombrables fautes et crimes devant l’Humanité et obtenir l’amnésie de la société, la restauration des privilèges de l’Eglise au Vatican et ailleurs et tuer définitivement l’esprit révolutionnaire français, nous comptons fermement que l’Assemblée Nationale finance notre église où nous pourrons à loisir poursuivre notre action anti-révolutionnaire.]

QU’EST-CE QUE LE PATRIMOINE ?

En ces temps de célébration, inutile et couteuse, du patrimoine (au sens strict l’héritage du père, notion bourgeoise s’il en est) il est utile de rappeler que nombre de monuments construits avec l’argent public se sont édifiés sur les dépouilles des ouvriers qui les ont construits. On peut citer le cas des sans-papiers ou des innombrables sans-abris qui dorment sur les trottoirs de toutes les grandes métropoles, de Tokyo à Paris, de Abu Dabi à Pékin, en passant par New York ou Moscou, et qui sont – ironie cruelle du sort – souvent les anciens ouvriers qui ont construits les tours et buildings où ils sont aujourd’ hui indésirables. Sûrement n’ont-ils jamais reçu le salaire nécessaire pour avoir la chance de se loger ? « Vous avez faim ? » disait hier le maire de Paris à une délégation d’ouvriers venus lui demander audience. « Et bien mangez-vous les uns les autres ! »

DYNAMITONS LE SACRE-COEUR !

CNT-AIT Paris

RDV Dimanche 22 septembre 2002 à 11 heures sur le marché d’Aligre

Pour une contribution naturelle au cent-cinquantenaire de la Commune (dessin de Barbé paru dans Charlie-Hebdo en 1971 pour le centenaire de la Commune)

Pendant la réforme des retraites de 2023 …


Quelques articles sur une campagne pour inscrire la destruction du sacré coeur au budget participatif de la ville de Paris en 2017

Pourquoi veut-on la peau du Sacré-Cœur ?

C’est le deuxième édifice religieux le plus visité après la cathédrale Notre-Dame de Paris. Pourtant certains ne le portent pas dans leur cœur. C’est en tout cas ce qu’il semblerait suite au projet de destruction de Sacré-Cœur proposé lors du dernier budget participatif de la ville de Paris. Alors fantaisie passagère ou véritable détestation ? Que reproche-t-on exactement au Sacré-Cœur ?

par Jade Letard-Methon

publié par Libération le 28 février 2017 à 10h31

C’est le deuxième édifice religieux le plus visité après la cathédrale Notre-Dame de Paris. Pourtant certains ne le portent pas dans leur cœur. C’est en tout cas ce qu’il semblerait suite au projet de destruction de Sacré-Cœur proposé par un Parisien à l’occasion lors du dernier budget participatif de la ville de Paris. Alors fantaisie passagère ou véritable détestation ? Que reproche-t-on exactement au Sacré-Cœur ?

Quel est le projet proposé lors du budget participatif ?

«Le Sacré-Cœur est une verrue versaillaise qui insulte la mémoire de la Commune de Paris.» D’entrée de jeu, les intentions de «Nathalie Lemel» sont claires. Un Parisien, identifié sous le pseudonyme de cette figure féministe de la Commune de Paris, souhaite «la démolition totale de la basilique lors d’une grande fête populaire». Notons que le projet est le plus apprécié avec 267 «j’aime» et un peu plus d’une centaine de mentions «je souhaite m’associer à ce projet».

En quoi consiste le budget participatif parisien ?

Chaque année, la ville de Paris donne l’opportunité à ses habitants de proposer des idées d’investissements pour leur arrondissement et/ou tout Paris. Une enveloppe de 100 millions d’euros est consacrée au budget participatif de la ville dont 30 millions spécialement dédiés aux quartiers populaires. Les projets ne peuvent être soumis que par des personnes résidant dans la ville. Pour être recevable, il est impératif que le projet proposé relève de l’intérêt général, de la compétence de la Ville de Paris et rentre dans le budget d’investissement sans générer de dépenses de fonctionnement. On étudie la faisabilité et on établit un budget estimatif de chaque projet rentrant dans les critères. Puis, c’est aux commissions de chaque arrondissement et à l’échelle de Paris de réaliser un dernier écrémage qui permettra de soumettre les projets restants aux votes des Parisiens en septembre. Finalement, en décembre, le financement des projets vainqueurs est définitivement validé par le vote du budget de la ville.

Pourquoi le Sacré-Cœur suscite-t-il autant d’hostilité ?

La construction du Sacré-Cœur, à partir de 1875, se déroule dans un contexte «d’ordre moral» qui fait suite à la Commune de Paris, véritable insulte pour une partie de la France monarchiste et cléricale. L’amertume et la honte n’en sont que plus renforcées puisque la France vient de perdre face à la Prusse qui, en prime, a récupéré une partie de l’Alsace et de la Lorraine. Cette suite de malheurs ne peut être qu’une punition divine et il faut à tout prix se faire pardonner. Le Sacré-Cœur est donc le moyen «d’expier les péchés imputés à la Commune», explique Mathilde Larrère, maître de conférences en histoire contemporaine. Pour les partisans de la Commune, il est encore plus difficile de voir s’ériger cette basilique, symbole de l’obscurantisme le plus totale, à l’endroit où ont débuté les événements de la Commune. «Les communards voient cet édifice religieux comme un lieu d’asservissement des masses. Ils sont pour la séparation de l’Eglise et de l’Etat», détaille le père Jacques Benoist, historien et auteur de plusieurs ouvrages sur le Sacré-Cœur.

Quelles sont les contestations connues de ce monument ?

Dans son œuvre Paris, suite et fin du cycle romanesque dit des «Trois Villes», Emile Zola fait référence au Sacré-Cœur en ces termes : «Je ne connais pas de non-sens plus imbécile, Paris couronné, dominé par ce temple idolâtre, bâti à la glorification de l’absurde. Une telle impudence, un tel soufflet donné à la raison, après tant de travail, tant de siècles de science et de lutte !» Par ailleurs, le personnage de Guillaume Froment, qui est chimiste, a la volonté de faire sauter le Sacré-Cœur mais finit par y renoncer.

Autre figure associée au monument, celle du chevalier de La Barre. Après son exécution, ce jeune noble est devenu une icône prisée de l’anticléricalisme. C’est pourquoi en 1905, sous l’égide d’un conseil municipal majoritairement laïc et opposé à la construction, est érigée une statue du chevalier de la Barre. Elle est ensuite déplacée puis fondue [par les nazis et Vichy pendant la seconde guerre mondiale] et il faut attendre soixante ans pour qu’une nouvelle statue soit inaugurée en 2001 [mais elle est retiré de son emplacement initial devant la basilique, pour être déportée dans un petit parc loin des regards, parc aujourd’hui transformé en parc pour faire pisser les chiens …]. En 1907, toujours sur décision du même conseil municipal, la rue du Sacré-Cœur devient celle du Chevalier-de-La-Barre.

Les hommes politiques ne sont pas en reste. Ainsi en 2013, Ian Brossat, alors leader communiste du Front de Gauche au conseil de Paris, admet ne pas aimer le Sacré-Cœur. «[Il] visait à sanctionner d’une certaine manière les communards. Je pense que s’il y a un endroit où on pourrait faire autre chose, ça serait le Sacré-Cœur», déclare-t-il lors d’un entretien vidéo pour le Journal du Dimanche. Ian Brossat dit vouloir remplacer le monument par «un espace de solidarité». Lionel Jospin avait aussi son avis sur la question. Quand on lui demande quel monument il raserait s’il en avait le pouvoir, sa réponse est sans équivoque. Pour lui, le Sacré-Cœur est un symbole «d’obscurantisme, de mauvais goût et de réaction».

 Le projet est-il réalisable ?

Pas de chance pour «Nathalie Lemel» et les anti-Sacré-Cœur : il paraît difficile de détruire ce monument par ce biais. Le Sacré-Cœur n’appartient pas à la Ville de Paris (mais à l’archevêché), or, c’est une des conditions sine qua non pour qu’une proposition soit retenue. Par ailleurs, Pauline Véron, adjointe à la maire de Paris chargée de la démocratie locale, a rappelé sur France Info, que la construction est classée monument historique.


« Affreux », « disproportionné »… Un Parisien propose à la mairie de raser le Sacré-Cœur

Sur la plateforme de budget participatif de Paris, un habitant a proposé de détruire la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre, pour rappeler la mémoire de la Commune de Paris. Mais la mairie a répondu : c’est impossible.

Article rédigé par Robin Prudent

Publié le 22/02/2017

Tout en haut de la butte Montmartre, la basilique du Sacré-Cœur domine Paris depuis la fin du XIXe siècle. Mais pour combien de temps encore ? Un habitant du quartier a soumis, samedi 11 février, un projet au budget participatif de la ville pour le raser, purement et simplement. Une provocation qui a tout de même reçu le plus grand nombre de « J’aime » parmi les 2 448 projets soumis.

Pourquoi une telle volonté de destruction ? La description du projet est claire : « Le Sacré-Cœur est une verrue versaillaise qui insulte la mémoire de la Commune de Paris. Le projet consiste en la démolition totale de la basilique lors d’une grande fête populaire. » En effet, la Basilique a toujours été considérée comme le symbole de la répression et de l’expiation de la Commune pour de nombreux militants de gauche. Le bâtiment avait été érigé sur la colline de Montmartre, là ou commença l’insurrection de la Commune de Paris, le 18 mars 1871. Depuis, des tags anarchistes(Nouvelle fenêtre) sont régulièrement laissés sur le monument à chaque date anniversaire.

« C’est une provocation »

Derrière ce projet fou, signé « Nathalie Lemel », du nom d’une militante féministe de la Commune, se cache en réalité un homme, habitant du 18e arrondissement de Paris, impliqué dans la vie de son quartier. Ce n’est pas la première fois qu’il propose une idée sur la plateforme du budget participatif de la ville, qui permet de financer des projets à hauteur de 100 millions d’euros. Mais cette année, il a décidé de frapper les esprits. 

C’est une provocation pour rappeler ce qu’est le Sacré-Cœur dans la mémoire de la Commune de Paris.L’homme à l’origine du projet

à franceinfo

Plus prosaïquement, cet habitant n’en peut plus de voir cette édifice surplomber la ville. « Je le trouve vraiment affreux et disproportionné dans le quartier. Il écrase tous les autres bâtiments de ce petit village », explique-t-il. Mais pourra-t-il voir son projet se concrétiser ? Hélas pour lui, il semble bien mal engagé.

« Ce projet est non recevable », répond la mairie de Paris

Contactée par franceinfo, Pauline Véron, adjointe à la maire de Paris chargée de la démocratie locale, laisse peu d’espoir. « Manifestement, ce projet est non recevable et ne fera pas partie des projets pour lesquels les Parisiens pourront voter en septembre », explique-t-elle. Pourquoi ? Il ne semble manifestement pas remplir les critères fixés par la plateforme. « Le Sacré-Cœur n’appartient pas à la Ville de Paris et il s’agit d’un monument classé historique », précise Pauline Véron. En effet, le monument appartient à l’archevêché de Paris.

De toute façon, l’habitant à l’origine de cette folle proposition n’était pas dupe. « Je ne me fais pas d’illusion. C’est potache et cela permet aussi montrer les limites de cet exercice de démocratie directe », explique-t-il. De son côté, l’adjointe au maire invite tous les Parisiens à aller soutenir d’autres projets, avec un leitmotiv : « Nous essayons de construire des choses plutôt que de les détruire. »

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