LOUISIANE : AVANT LA CATASTROPHE KATRINA …“Tout va très bien, madame la marquise »

mercredi 30 novembre 2005


Une irresponsabilité criminelle

Des anarchistes américains de la région témoignent : « Ils savaient tout à fait que se serait une saison à cyclones dévastateurs mais ils ont tout de même choisi d’utiliser les 79 millions de dollars attribués en principe à la réparation du vieux système de digues pour une guerre en Irak. Au final ils n’ont investi dans ce projet de renforcement des digues et voies navigables menant au lac Pontchartain qui protège La Nouvelle-Orléans, que la somme misérable de 10 millions de dollars. De plus ils savaient longtemps à l’avance que le cyclone serait au moins de force 4, et que le système des digues ne pourrait pas résister à un cyclone de plus de force 3« 

Ici comme ailleurs (pour ne pas dire à peu près partout sur cette planète) la population a donc été délibérément exposée à un risque majeur. La catastrophe avait été annoncée, des experts officiels avaient prédit l’engloutissement de la Nouvelle-Orléans en cas d’ouragan de forte amplitude, ils avaient fortement conseillé la réhabilitation des marais que le sur-endiguement du Mississipi condamnait, ils avaient même prévu des plans efficaces d’évacuation et une coordination dans l’organisation des secours. Tout cela en vain. Les crédits qui auraient pu être affectés à ces travaux ont trouvé une autre application : la guerre en Irak. Les victimes de Louisiane sont en quelque sorte des victimes de guerre, des victimes collatérales. Ce choix budgétaire rendait la catastrophe inévitable. Mais au moins, ses conséquences meurtrières auraient pu être grandement atténuées : l’État avait le temps de prendre toutes les mesures d’urgence. Il ne l’a pas fait non plus.

Cette absence de clairvoyance, ce manque souverain d’intérêt pour toutes les études d’anticipation d’un désastre montrent le niveau d’incurie des « pouvoirs publics », le degré d’irresponsabilité criminelle auquel ils sont parvenus.

« Ayez confiance » le message de l’ONU & du Monde Diplomatique

En février 2004 les Nations-Unies, publiaient un rapport affirmant que les pays prospères seraient les mieux placés pour prévenir les catastrophes. En effet, grâce au développement du capitalisme et aux moyens financiers qu’il engendre, les dirigeants des pays riches seraient en mesure de protéger beaucoup mieux leurs concitoyens.

Cette théorie a trouvé son apogée avec le tsunami du 25 décembre 2004. Dès le début de l’année 2005, les médias profitent du drame asiatique pour l’étayer et pour nous « rassurer » : un tel drame ne peut arriver dans un pays « civilisé ». En long, en large et en travers, c’est ce message qu’on nous a tartiné de TF1 au Monde Diplomatique. Ainsi avons-nous pu lire sous la plume sentencieuse du guide spirituel de l’intelligentsia de gauche cette conclusion sans appel : « Si le même tsunami s’était produit sur l’océan Pacifique le nombre de victimes aurait était beaucoup plus réduit. Parce que les états riverains, à l’initiative des deux grandes puissances, le Japon et les Etats-Unis, ont mis au point un système de détection et d’alerte en mesure d’avertir à l’avance de l’arrivée des vagues tueuses et permettant à la population côtière de se mettre à l’abri« . (Ignace Ramonet, Le Monde Diplomatique, numéro de janvier 2005)

L’énorme drame de la Nouvelle-Orléans prouve que de telles affirmations étaient totalement aberrantes. Six mois à peine après cette ramonesque déclaration, l’État américain, techniquement en mesure de prévenir les conséquences humaines de la catastrophe en évacuant la population côtière pour la protéger du cyclone Katrina, ne l’a pas fait. Les médias s’abstiennent bien aujourd’hui de revenir sur leurs stupides déclarations post-tsunami pour s’empresser de masquer, en se centrant sur la personnalité de Bush, la véritable signification des événements. C’est que les donneurs de leçons avaient éludé un aspect essentiel de la question : en dehors de l’aspect technique, lors des catastrophes, il y a un aspect bien plus important. Cet aspect, est tout simplement évacué par les institutions et leurs féaux. Car il révèle le véritable rôle de l’État dans les démocraties représentatives : oui, à la Nouvelle-Orléans, il s’agit de racisme, de politique anti-pauvres, de bêtise. Oui, mais pas seulement. La gestion de la crise est trop significative de l’idéologie du pouvoir, pour laisser le conjoncturel, l’anecdote, nous masquer ce qui est constant et permanent. Ce qui s’est produit là est le résultat d’un politique qui, avec ou sans Bush, a les mêmes fondements. C’est pourquoi nous avons vu et nous verrons les mêmes effets se reproduire ailleurs.

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