L’ANARCHO-SYNDICALISME, C’EST QUOI ?

LA C.N.T.-A.I.T. , QU’EST-CE QUE C’EST ?

La Confédération Nationale du Travail est une organisation anarcho-syndicaliste : nous sommes la section française de l’A.I.T., c’est-à-dire que nous sommes les seuls membres français de l’Association Internationale des Travailleurs, laquelle regroupe des sections et amis dans toute l’Europe, mais aussi en Amérique Latine et en Amérique du Nord, ainsi qu’en Asie, Océanie et Afrique.

Il est fondamental de comprendre que l’anarcho-syndicalisme n’est pas une idéologie parmi d’autres, n’est pas un ensemble d’idées toutes faites que l’on cherche à plaquer sur la réalité, mais bien au contraire que la théorie et la pratique anarcho-syndicalistes sont le fruit de l’expérience des luttes de plusieurs générations de femmes et d’hommes dont le but a été et est toujours- la transformation radicale de la société et des conditions de vie.

Au centre même de l’anarchosyndicalisme, il y a donc le souci constant d’éviter tout écart entre ce qui est dit et ce qui est fait, entre ce qui est vécu et ce qui est pensé. Ni compilation de recettes révolutionnaires, ni idéologie momifiée, l’anarcho-syndicalisme est avant tout vivant et expérimental dans le sens où c’est le vécu de ses militants, leurs expériences de lutte et de vie qui engendrent la théorie et non l’inverse.

Hier comme aujourd’hui, chacun, chaque anarcho-syndicaliste, chaque militante, chaque militant apporte sa contribution à l’élaboration d’une théorie et d’une pratique, sa quote-part à la construction du mouvement. Les cénétistes espagnols (c’est-à-dire les militants de la C.N.T. espagnole qui firent la révolution de 1936) avaient coutume de dire de leur organisation : « Elle m’a construit », c’est vrai, mais il faut bien sûr ajouter que chacun construit et nourrit le mouvement de son énergie. C’est donc un mouvement qui part du vécu des personnes et qui a pour objectif de transformer les conditions de vie qui nous sont faites, qui nous sont imposées. le cri de ralliement des fascistes espagnols pendant la guerre civile était « Viva la muerte » (vive la mort). Pour nous cénétistes, c’est, cela a été et sera toujours « Vive la vie ! ».

LA VIE, OUI ! MAIS QUELLE VIE ?

Comment changer les conditions de vie qui nous sont imposées ? comment construire des rapports sociaux fondées sur autre chose que sur la domination et son corollaire, la soumission ? comment reprendre sa vie en mains ? Toute au long de l’Histoire (révoltes d’esclaves dans le monde romain, soulèvements paysans et millénaristes au Moyen Age par exemple), les hommes et les femmes assujettis au travail et à la misère ont avec constance toujours essayé de refuser le sort qui leur était fait et ont tenté de prendre leur destin en mains. Mais ce n’est qu’à la fin du XIXème siècle que le mouvement révolutionnaire, le mouvement ouvrier, va parvenir à s’organiser et va commencer à espérer pouvoir changer les conditions de vie, à espérer pouvoir changer les rapports sociaux : la Première Internationale des Travailleurs, la première A.I.T. naît à Londres en 1864. Notons qu’au nombre de participants, il y avait Bakounine et Marx. Dès le départ, le mouvement va être déchiré entre deux tendances : les socialistes autoritaires regroupés autour de Karl Marx, et les anti-autoritaires – ou fédéralistes- autour de Michel Bakounine. Pour les antiautoritaires, ce sont le pouvoir, la domination, l’autorité qui sont le fondement même de cette société, et rien ne changera vraiment si le mouvement qui prétend révolutionner le monde s’organise lui-même de façon hiérarchique, centralisatrice, autoritaire. On sait maintenant à quelle monstruosités le socialisme autoritaire a conduit et conduit encore. Les « libertaires » d’alors avaient très bien perçu les dangers et les dérives sanglantes possibles de cette doctrine. Après le Congrès de la Haye de Septembre 1872, la rupture entre les deux courants (autoritaire et antiautoritaire) est définitive. Après ce bref rappel de l’origine historique de notre mouvement, il faut surtout parier de ses grands axes et ses grands principes.

QUELQUES GRANDS PRINCIPES

Nous sommes des partisans de la démocratie directe : toujours soucieux d’immédiateté, en tant qu’anarcho-syndicalistes, nous avons adopté la maxime « ici et maintenant ». Si l’on veut que les choses changent, il faut que le pouvoir appartiennent à la base et à la base uniquement. Les assemblées générales sont donc souveraines, elles décident des orientations et des actions car nous n’avons ni dirigeant, ni permanent. Les délégués reçoivent des mandats précis et sont révocables à tout moment. Les organes exécutifs n’ont aucun pouvoir décisionnel : ils sont simplement là pour appliquer les décisions prises par les assemblées générales. On sait à quelles aberrations ont mené des organisations extrêmement hiérarchisées, centralisées. La domination, la coercition, quel que soit le drapeau derrière lequel elles se cadrent, ne peuvent aboutir qu’à la soumission, pas à l’émancipation. Nous sommes persuadés que, si l’on veut qu’il y ait des lendemains qui chantent, il faut d’abord que le présent appartienne le plus possible à chacun et à tous, pour qu’il y ait un autre futur. Seule la démocratie directe offre des garanties de contrôle de la lutte pour tous. C’est cette volonté de réappropriation de la lutte qui nous fait opter pour l’action syndicale directe, pour l’action sans intermédiaire. Nous n’avons aucune confiance dans les spécialistes de la médiation ». Pour être plus précis, pour nous la conduite d’une grève appartient aux grévistes et à eux seuls. Les assemblées générales doivent être souveraines, le comité de grève ne doit avoir aucun pouvoir décisionnel, les contacts avec le patronat doivent être directs, sans passer ni par le comité d’entreprise, ni par les élus politiques. Ce n’est qu’en se réappropriant toutes ses capacités, toutes ses potentialités (souvent mises à mal par l’organisation sociale actuelle) que chacun et que tous accéderont à l’autonomie. Pour nous c’est clair « l’émancipation des travailleurs sera l’oeuvre des travailleurs eux-mêmes. »

LA SOLIDARITÉ

Le système social actuel fondé sur la domination et la soumission, sur la prise en charge et la déresponsabilisation empêche en fait, chacun, chacune d’entre nous d’accéder à un contrôle réel sur sa vie : ce n’est que dans les moments forts des mouvements sociaux, en cas de grève générale, que les gens redressent la tête et s’aperçoivent qu’ils sont tout à fait capables d’organiser la seule chose qui leur appartiennent et qui sans cesse leur échappe : à savoir l’organisation de leurs vies. Ils découvrent alors dans ces moments privilégiés, que « l’individualisme frileux » dans lequel le système voudrait les enfermer n’est que peu de choses par rapport à la richesse et à la joie de partage qu’apporte la solidarité. Pour nous anarcho-syndicalistes, la solidarité c’est la clef de voûte du mouvement, c’est le sel de la vie. Sans elle rien ne se fait, rien n’est possible. Pour nous entre compagnons de la C.N.T., elle est vécue au jour le jour sans jamais être prise en défaut. Pour nous la solidarité plus qu’un devoir, c’est un plaisir. Démocratie directe, autogestion collective directe des luttes, solidarité entre tous et par delà les frontières, voilà les grands principes de l’anarcho-syndicalisme.

NOTRE BUT

Le système capitaliste ne peut être aménagé, il faut rompre avec ce mode de fonctionnement social. Mais les moyens employés pour parvenir à ce changement doivent être en totale adéquation avec les buts poursuivis : la méthode marxiste-léniniste a échoué en faisant couler beaucoup de sang, au point que l’idée même de révolution est devenue extrêmement suspecte à beaucoup et très intimement liée à l’idée de terreur. Pour nous anarcho-syndicalistes, pour nous libertaires, aucun changement ne se fera sans adhésion massive, sans le concours volontaire et conscient de la majorité de la population. A tous les impatients graves, à toutes les élites avant-gardistes, à tous les bombophiles et dynamitomanes, à tous les détraqués de la gâchette , nous disons que nous n’avons rien avoir avec vous, la société que vous établiriez avec de tels moyens risque fort d’être cauchemardesque. Pour nous c’est clair, les promesses ou les actions d’éclats de quelques uns ne remplaceront jamais l’élan de tous.

Un militant de Quercy Rouergue

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